L’acte est passé relativement inaperçu à la rentrée, il peut pourtant être considéré comme un changement fondamental dans la politique salariale d’une grande société suisse. La banque Julius Baer, très présente en Suisse romande, a révolutionné sa façon de rémunérer ses cadres, en particulier dans l’attribution des bonus.
Ses 1500 gérants de fortune ne seront ainsi plus rémunérés en fonction de leurs apports de clients et des millions apportés par leur biais. C’est un véritable séisme qui a secoué ces gérants, habitués à des bonus substantiels. La course effrénée à la masse sous gestion est ainsi abandonnée, les problèmes liés au blanchiment et aux potentiels clients douteux sont priés de disparaître également.
Une nouvelle ère?
Cette décision symbolise-t-elle l’avènement d’une nouvelle ère? D’autres sociétés pourraient-elles suivre le mouvement? Les experts questionnés en doutent. Charlotte Vitoux, directrice générale de Morgan Philips Executive Search Suisse, se montre prudente: «Nous ne constatons pas de mouvement de ce style chez nos grands clients et nous sommes multisectoriels. En revanche, les bonus seront évidemment moins florissants en 2021. Mais les employeurs cherchent plutôt en ce moment à protéger leurs collaborateurs en maintenant des rémunérations stables.»
Fabio Ronga, directeur de Beqom, qui conçoit notamment des logiciels spécialisés dans la gestion des ressources humaines, abonde dans le même sens. «Je ne vois pas de tendance à la fin de bonus. Au contraire, les nouvelles générations cherchent de la flexibilité. Les employeurs veulent attirer et garder les talents, ils leur proposent donc aussi des rémunérations à la carte. Les rémunérations variables en font partie. A noter que c’est un choix de l’employé et qu’elles ne sont pas assurées.» La fin des bonus ne semble donc pas prévue pour demain, malgré la révolution entamée chez Julius Baer.