«Le ski fait partie de l’identité suisse. Les consommateurs aiment ainsi acheter de l’équipement spécial, que tout le monde n’a pas, qui peut les distinguer des autres. Les petites marques qui offrent cette quasi-exclusivité répondent bien à la tendance.» Tim Marklowski, de l’ONG Mountain Wilderness, observe l’essor des marques de niche. La Suisse ne dispose pas d’un grand secteur de fabrication d’articles de sport, résume le cabinet Hanser Consulting dans une étude réalisée pour l’Association suisse des magasins d’articles de sport en février 2021. «Il y a, d’une part, quelques grands fabricants, qui n’ont toutefois pas leur production en Suisse, et, d’autre part, quelques dizaines de petits fabricants sur des marchés de niche.»

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Dans le domaine particulier des skis, les marques historiques suisses ont, à partir des années 1980, presque toutes disparu, d’Attenhofer à Streule, en passant par la vaudoise Authier. Le marché s’est concentré autour de quelques grandes marques et groupes internationaux (Rossignol-Dynastar, Atomic, Head, Nordica, etc.). Mais aujourd’hui, de petits fabricants gagnent de nouveau des parts de marché, parmi les quelque 200 000 paires vendues chaque année en moyenne en Suisse.

Tim Marklowski, auteur de l’étude de durabilité «De quoi est fait le ski et qui se cache derrière?», nuance néanmoins: «Une partie de ces entreprises font fabriquer leurs skis dans les mêmes usines que les grandes marques. Elles ne s’occupent finalement que du développement produit et du marketing. Et, dans ce cas, l’empreinte écologique n’est pas forcément meilleure.»

L’organisation de défense de l’environnement alpin basée à Berne a interrogé 21 marques de ski bien représentées dans le commerce en Suisse (environ 30% d’entre elles seulement ont livré des données). «Il n’existe pas de labels, comme dans le textile de sports de montagne. Pourtant, le matériel a aussi un impact écologique.» A la suite de son analyse, Mountain Wilderness a identifié les principales sources de pollution dans la fabrication des skis: l’utilisation d’énergies fossiles, les noyaux de bois exotiques, le recours à des produits chimiques nocifs ou encore l’absence de «recyclabilité». L’empreinte de skis écologiques est toutefois deux fois moins élevée que celle de skis standards (voir infographie ci--dessus).

Il y a une vraie place à prendre pour des marques qui mettraient en œuvre les principes de durabilité, estime Tim Marklowski. «Dans le domaine des sports de montagne, le niveau d’éducation des usagers est élevé, tout comme leur pouvoir d’achat, ce qui est en fait un domaine propice à l’achat de produits durables.»


Des airbags high-tech pour avalanche

Détentrice d’un savoir-faire unique au monde, l’entreprise neuchâteloise Alpride a réussi à s’imposer sur le marché européen et à exporter aux Etats-Unis avec une technologie novatrice et brevetée qui s’adresse aux skieurs freeride, aux randonneurs et aux conducteurs de motoneiges.

Marc Antoine Schaer

Marc-Antoine Schaer, diplômé en microtechnique à l’EPFL, a fondé Alpride en 2009.

© Guillaume Perret

«Nous sommes les seuls au monde à avoir développé et à produire des airbags électriques à supercondensateurs pour avalanche.» Marc-Antoine Schaer, diplômé en microtechnique à l’EPFL, a fondé Alpride en 2009. Détentrice du brevet, l’entreprise est la seule à produire ce type d’airbags électriques, les autres du marché étant mécaniques (à cartouche) ou basés sur une batterie traditionnelle.

Ces airbags s’adressent principalement aux skieurs freeride, aux randonneurs et aux conducteurs de motoneiges. Ils sont vendus aux grandes marques de produits sportifs, telles que Scott, Osprey ou encore Millet. Ces fabricants intègrent ensuite la technologie prémontée à leurs sacs à dos. «Nous produisons également de petites séries de sacs finis que nous vendons sur notre site internet, mais 95% de nos ventes se font en B2B», précise le CEO.

Alpride compte 50% de ses clients en Europe, l’autre moitié aux Etats-Unis ou au Canada. Cette exportation permet notamment à l’entreprise d’être moins dépendante des conditions météorologiques: «Les ventes basses d’un hiver peu neigeux en Suisse sont rattrapées par les ventes nord-américaines.»

Basé à Lignières (NE), Alpride compte trois employés et collabore avec des partenaires indépendants: le bureau d’ingénieurs Micro-Beam à Yverdon (VD) pour le développement des produits et l’usine Locatis, à Bassecourt, dans le Jura, pour la production des circuits électroniques. L’assemblage final est effectué au Vietnam, «pour une raison très simple: tous les fabricants de marques de sport sont au Vietnam, donc nous les livrons ainsi directement dans leurs usines d’assemblage».

Ce qui est novateur, c’est le remplacement des cartouches de gaz par un turbo-compresseur électrique pour gonfler le ballon. Au niveau de l’alimentation, ce ne sont plus des batteries classiques sensibles à la température mais des condensateurs résistant aux grands froids. Pesant moins de 1,3 kg, l’airbag électrique d’Alpride est également le plus léger du marché. Les sacs sont vendus autour de 1000 francs pour la version électrique, autour de 700 francs pour ceux à cartouche.

Aujourd’hui, Alpride produit 20 000 airbags par année, soit quatre fois plus qu’en 2018, et espère augmenter sa production à 30 000 pièces dans les années à venir. «Nous enregistrons une croissance constante et stable ces dernières années. Si le covid n’a pas spécialement touché notre secteur, nous sommes affectés par la pénurie de microprocesseurs électroniques.»


Ça farte toujours pour la société centenaire

Marque iconique du ski suisse, Toko est leader sur le marché du fart pour toute l’Europe centrale. Après être passée entre différentes mains, dont celles de Mammut, la société fait désormais partie du groupe norvégien Brav. Elle poursuit deux objectifs principaux: développer sa gamme respectueuse de l’environnement et conquérir le marché américain.

Toko propose depuis près de 90 ans des produits d’entretien ou de fartage, qui permettent aux skieurs une meilleure glisse ou, au contraire, adhésion à la neige.

Lorsque l’athlète la plus titrée de l’histoire du skicross, la Vaudoise Fanny Smith, monte sur un podium, un ruban jaune, à écriture noire, entoure ses skis. Ce logo bien visible est celui de Toko. Cette marque propose depuis près de 90 ans des produits d’entretien ou de fartage, qui permettent aux skieurs une meilleure glisse ou, au contraire, adhésion à la neige. Bien implantée dans les boutiques suisses de sports d’hiver et chez les amateurs, l’entreprise trouve ses origines dans le canton de Saint-Gall, à Altstätten.

A sa création, en 1916, Toko – pour Tobler & Kompany – fabrique un produit d’entretien pour bottes militaires, avant de mettre au point le «lubrifiant fixe» Ski Glisse en 1933. Ce dernier se vendra à l’international et vaudra à la marque de figurer parmi les fournisseurs officiels des Jeux olympiques de Saint-Moritz de 1948. La PME suisse développe, au fil des décennies, diverses formules de fart, notamment la paraffine incluant du fluor (1991) et une variante liquide (2002). Désormais, elle oriente ses activités de développement vers une ligne respectueuse de l’environnement. «A l’avenir, Toko développera ses nouveaux produits sans fluor, soutient Manuela Eisele, responsable des ventes de Toko. Nos produits WorldCup ont déjà été modifié cette année et le fluor remplacé par une nouvelle technologie.»

Toko a connu plusieurs changements de propriétaires et restructurations. En 2010, la PME a été rachetée aux Suisses de Mammut (lire ci-après) par le groupe norvégien Brav. Ce dernier détient la marque de fart Swix Sport, leader en Scandinavie. «Les deux marques se sont développées indépendamment l’une de l’autre, explique Manuela Eisele. L’équipe de recherche de Toko et son laboratoire sont toujours basés à Altstätten. Notre équipe de vente en Suisse représente toutefois désormais les cinq marques du groupe, soit Toko, Swix, Helsport, Lundhags et Ulvang.» La société, qui se nomme depuis 2021 Brav Switzerland, emploie dix collaborateurs fixes à Altstätten, une dizaine d’experts externes et engagera deux nouvelles personnes à partir de février. «En raison du passage au sans fluor, notre budget de développement a été augmenté», ajoute la responsable.

L’alliance des deux marques historiques place les produits de fart du groupe Brav en tête des ventes en Europe. «Notre objectif est d’augmenter notre présence sur d’autres continents au cours des prochaines années», relève la chargée des ventes. Toko commercialise également des produits d’entretien pour les textiles et les chaussures. «Nous aimerions développer davantage cette partie de notre activité, qui correspond à environ 20% de nos ventes. L’avantage de ce domaine est qu’il est moins lié au caractère saisonnier des sports d’hiver.»


Leader de la peau de phoque

L’entreprise vaudoise  Pomoca est parvenue à s’imposer sur le marché mondial de la fabrication de peaux de phoque. La PME équipe les athlètes qui participent aux Jeux olympiques.

PORTRAIT LE TEMPS CASTELLET POMOCA

L’entreprise de 50 employés basée à Denges (VD) produit des peaux de phoque, ces bandes de tissu collées aux skis afin d’adhérer à la neige en ski de randonnée.

© Valentin Flauraud

«Le covid a mis le ski alpin en quarantaine, ce qui a poussé de nombreuses personnes à se tourner vers le ski de randonnée.» Josep Castellet dirige Pomoca depuis 2011. L’entreprise de 50 employés basée à Denges (VD) produit des peaux de phoque, ces bandes de tissu collées aux skis afin d’adhérer à la neige en ski de randonnée.

Pomoca domine le marché mondial de la peau de phoque. Avec la popularisation du sport, l’entreprise a produit 250 000 paires de peaux en 2021, soit le double de sa production de 2020, entraînant une croissance de 95% de son chiffre d’affaires! De 1,8 million de francs en 2009, il a connu une augmentation spectaculaire, passant à 7,5 millions en 2019, puis à 15,3 millions en 2021. «Notre croissance a été explosive. Il était difficile de répondre à la demande.» En 2011, Pomoca avait été rachetée par le groupe italien Oberalp, spécialisé en produits sportifs de compétition. Les produits manufacturés en Suisse sont envoyés en Italie, d’où ils sont redistribués internationalement dans des magasins revendeurs.

Vendus environ 200 francs la paire, les produits Pomoca visent une clientèle aisée. «La technicité des matériaux et le savoir-faire suisse ont un coût. Mais les amateurs de ski de randonnée sont généralement des passionnés pour qui le bon matériel compte plus que le prix.» Pomoca fabrique également des peaux de phoque plus basiques qu’elle vend aux marques de sport sans y apposer son nom, ce qui représente environ 10% de son chiffre d’affaires.

Niveau visibilité, Pomoca bénéficie de la publicité des athlètes qui s’affichent avec ses produits, et notamment avec les reconnaissables peaux roses destinées aux professionnels. «Nous offrons le matériel aux athlètes, mais nous n’avons pas les capacités financières d’être leur sponsor, explique Josep Castellet. Ce sont eux qui choisissent d’utiliser nos peaux, ce dont nous sommes très fiers.» Au palmarès des Suisses, le freeskieur Jérémie Heitz ou encore le skieur-alpiniste Yannick Ecoeur.

Pour la première fois de l’histoire, le ski-alpinisme sera inscrit comme sport olympique pour les JO d’hiver en 2026 à Milan-Cortina. «Nous n’attendons pas de croissance particulière liée aux JO, car le ski de randonnée reste une activité d’initiés exigeant un bon environnement, de l’équipement et une forme physique adéquats.» Pour répondre à la demande croissante, Pomoca vient d’acquérir un terrain à Chavornay (VD) afin d’y faire construire un espace deux fois plus grand, d’une surface de 3000 m². Le déménagement est prévu pour 2023. A noter que fin 2021, le groupe Oberalp, propriétaire de Pomoca, a racheté Velotex, fournisseur allemand de velours mohair, matériau utilisé dans la conception des peaux.


Fabricant valaisan de skis et d’images

Spécialisée dans la fabrication de skis freeride, Faction , basée à Verbier (VS), rayonne des Alpes aux Rocheuses, en passant par le Japon. Sa particularité: concevoir des skis freestyle de qualité supérieure accessibles au plus grand nombre.

De Candide Thovex (photo) à Sarah Höfflin, en passant par Sam Anthamatten, la marque a su séduire les plus grands noms du freeride à l’international.

S'opposer à la majorité, tel est le mantra de l’entreprise de skis Faction. «La production de masse atteint ses limites en termes de qualité, soutient Alex Hoye, cofondateur de Faction, c’est pour cela que nous avons eu l’idée de proposer une alternative à l’industrie dominante du marché, en offrant à un large public des skis freeride de qualité premium fabriqués en Europe.»

Fondée en 2006 par Alex Hoye et son associé Tony McWilliam, l’entreprise s’inscrit sur un marché où les skis hybrides et freeride commencent à s’imposer face aux traditionnels skis de piste ou de course. En 2021, Faction a ainsi vendu près de 33 000 paires de skis, dont le prix oscille entre 300 et 1200 francs la paire. Les skis sont produits en Autriche et en Pologne avec des matériaux provenant majoritairement de fournisseurs locaux, à l’exception de certains bois spécifiques qui viennent d’Asie. Seule la partie design est réalisée à Verbier.

A l’issue de la saison 2020-2021, et ce, malgré la pandémie, le chiffre d’affaires de Faction enregistre une croissance annuelle de plus de 2%, alors que le secteur européen des sports d’hiver subit des pertes avoisinant les 50% sur la même période, selon l’étude 2021 de la Federation of the European Sporting Goods Industry (FESI). Cette saison, l’entreprise prévoit d’augmenter encore ses ventes de près de 37% et vise à faire passer la barre des 10,5 millions de francs à son chiffre d’affaires.

«Plusieurs facteurs ont joué en notre faveur: d’abord, le ski de randonnée et le freeride ont connu un engouement sans précédent l’année dernière, explique Alex Hoye. Ensuite, notre entreprise ne compte que 49 salariés à plein temps, répartis entre la Suisse, l’Autriche, la Scandinavie, l’Amérique du Nord et l’Asie. Pour nous, travailler à distance a toujours fait partie du quotidien. Nous n’avons pas dû nous réorganiser dans l’urgence. Enfin, notre stratégie de communication basée sur le numérique nous a permis de garder contact avec notre communauté.»

En marge de la fabrication de skis, Faction s’est distinguée par la production de films mettant en scène des freeriders professionnels en action. Le dernier en date, Roots, a d’ailleurs été projeté dans plusieurs villes du monde ainsi qu’en Suisse romande à l’automne 2021. Le film retrace l’évolution du freeski avec 26 des meilleurs athlètes internationaux de la discipline. Une stratégie marketing qu’Alex Hoye assume pleinement: «Plutôt que de débourser des millions pour nous hisser en tête des résultats des moteurs de recherche, nous avons opté pour aller à la rencontre des passionnés et susciter leur curiosité en produisant nos propres films avec un budget relativement modeste.»


L’art de la chaussette performante

Le fabricant saint-gallois Rohner se spécialise dans la confection de chaussettes depuis presque cent ans. Il use de sa longue expérience et d’innovations techniques pour élaborer des produits adaptés à la rudesse des sports d’hiver.

Rohner Copper Jet

Le produit phare de l’entreprise, soit le plus vendu, est la chaussette antidérapante SupeR, lancée sur le marché en 1980. En 2013 apparaît la version en coton biologique.

La manufacture Rohner voit le jour en 1930 dans la petite ville de Balgach (SG). Son fondateur, Jacob Rohner, ambitionne alors de créer une chaussette qui se distingue par ses performances, son confort, sa qualité et son design. Les premières productions se destinent à l’armée suisse, mais très vite, l’usine élabore des chaussettes pour les civils, notamment pour les amateurs de sports d’hiver. «Dès les années 1970 et jusqu’au milieu des années 2000, la société Jacob Rohner équipait les athlètes suisses lors des Jeux olympiques, relate Hermman Lion, l’actuel CEO. Les sports d’hiver font intégralement partie de notre ADN.»

Dans son usine de production établie au Portugal, qui compte une cinquantaine d’employés, un parc de machines à la pointe de la technologie délivre des chaussettes prêtes à s’adapter à la morphologie de chaque pied. Et les matériaux choisis ne sont pas en reste: un savant mélange de fibres naturelles et synthétiques est élaboré pour un confort optimal. «Nous cherchons à développer une gamme large en matière de tailles et d’épaisseurs de tissu, pour convenir à chaque situation.» L’entreprise a réinvesti près de 1 million de francs ces cinq dernières années dans son parc de machines et se tourne vers l’industrie 4.0, avec notamment un système de visualisation en 3D pour la conception de ses produits. En Suisse, elle emploie 35 équivalents plein-temps, actifs dans la logistique, le marketing, la vente, l’administration et la gestion de la production.

L’an dernier, Rohner a établi un partenariat avec le Club alpin suisse et équipe ainsi les guides de montagne pour le trekking estival. En 2022, le partenariat s’élargira aux sports d’hiver. Un bon moyen d’obtenir des feed-back rapides et précis venant du terrain, pour améliorer toujours les performances et le confort des chaussettes spécialisées. «Nous avons quelques produits de niche, par exemple pour de la randonnée en haute montagne, à plus de 4000 mètres dans l’Himalaya. Recevoir des avis éclairés sur ce type de produits se révèle extrêmement précieux.»

Des efforts de recherche d’excellence récompensés, puisque Rohner a remporté en 2020 le 1er prix de l’ISPO – le plus grand salon des équipements de sports d’hiver du monde –, dans le segment «Sports d’hiver», catégorie «Chaussettes», avec son produit Copper Jet. «Ce prix constitue une belle reconnaissance, qui se reflète maintenant au niveau de nos ventes. Il nous a donné une visibilité internationale: les gens viennent de loin pour s’approvisionner en chaussettes Rohner.» Sur les 2 millions de paires de chaussettes que vend l’entreprise chaque année, 20% s’écoulent à l’étranger, dans les pays de l’Arc alpin, en Corée du Sud, aux Etats-Unis et au Canada principalement. L’entreprise s’engage également sur le plan social depuis 2020 en offrant aux œuvres caritatives suisses, notamment à Caritas, une paire de chaussettes pour chaque paire vendue en ligne, soit environ 10% du total. 


Mammut, mastodonte suisse de l’outdoor

La marque emblématique a envahi les rayons d’équipements de sports d’hiver en Suisse, mais également à l’étranger. Retour sur une success-story helvétique.

Mammut a étendu progressivement sa gamme de produits, comme les sacs de couchage (Ajungilak), les chaussures de montagne (Raichle) ou encore les sacs à dos et harnais pour l’alpinisme et l’escalade. 

Tout commence en 1862, lorsque Kaspar Tanner ouvre une corderie artisanale près de Lenzbourg, dans le canton d’Argovie. La petite entreprise produit et commercialise des cordes, utilisées notamment par les alpinistes, et développe des vêtements pour les expéditions en montagne. La marque Mammut et son logo naissent formellement en 1943. L’emblème choisi symbolise la force, la résistance et la puissance que l’entreprise tient à donner à ses cordes et autres produits.

La corderie artisanale, fondée en 1862 par Kaspar Tanner, est ensuite dirigée par son fils, Oscar Tanner (photo). La société restera en mains familiales jusqu’en 1924.

De par son développement, Mammut devient capable de racheter de petites sociétés, étendant progressivement sa gamme de produits: sacs de couchage (Ajungilak), chaussures de montagne (Raichle) ou encore sacs à dos et harnais pour l’alpinisme et l’escalade. Dans les années 1990, Mammut lance sur le marché le détecteur de victimes d’avalanche Barryvox. Le succès est rapidement au rendez-vous, en Suisse et dans le monde entier.

Aujourd’hui basé à Seon (AG), le groupe Mammut explique être présent dans une quarantaine de pays et emploie environ 800 personnes. En avril 2021, Mammut a été racheté par Telemos Capital, une société européenne d’investissement en private equity d’origine suisse et basée à Londres.

Y a-t-il un risque que la marque perde alors de son ADN suisse? «Certainement pas, estime Nicolas Masserey, directeur de l’Ecole suisse de ski de Crans-Montana, qui a conclu il y a deux ans un partenariat avec cette marque porteuse d’un haut niveau technique. «Depuis le rachat, les équipes avec qui nous collaborons sont restées les mêmes, poursuit-il. Le savoir-faire et le développement des produits sont maintenus en Suisse. Le fait que le propriétaire soit à l’étranger semble ne rien changer, cela se joue à d’autres niveaux.»


«L’usage de la télécabine est en pleine croissance dans les villes»

L’entreprise soleuroise CWA a construit sa première cabine en aluminium en 1956 pour le tourisme de montagne en Suisse. Elle exporte désormais ses produits dans le monde entier, de la Bolivie au Vietnam, en passant par Paris.

Le marché des remontées mécaniques pour le transport urbain ou celui pour la visite de lieux touristiques sont en pleine croissance, 

Créés en 1939 par Anton Frech, les ateliers de CWA transformaient au départ des automobiles américaines en ambulances ou voitures de pompiers, et fabriquaient des cars de tourisme. Une vingtaine d’années plus tard, la PME s’est lancée dans la construction de véhicules de remontées mécaniques en aluminium, qui deviendront sa grande spécialité. Tournée vers l’international, elle a effectué dès 1964 ses premières livraisons à l’étranger de cabines de téléphérique va-et-vient, à Sandia Peak, aux Etats-Unis. Christoph Grob, responsable ventes et marketing chez CWA, explique le positionnement de ce fleuron de l’industrie soleuroise.

CWA fait partie du groupe austro-suisse Doppelmayr/Garaventa. Quelles ont été les circonstances de ce rachat en 2001?
Christophe Grob:
Il n’y avait pas de repreneur au sein de la famille Frech. Le groupe Doppelmayr/Garaventa, qui vend au client final l’ensemble de la remontée mécanique (y compris câbles, commandes, pylônes, etc.), était le candidat externe idéal pour ce rachat puisqu’il s’agissait du principal client de CWA. Aujourd’hui, nous avons l’autonomie d’une PME suisse, qui a pu conserver la production des véhicules et une équipe de R&D sur son territoire, tout en ayant la force de frappe d’un grand groupe pour décrocher des contrats dans le monde entier et profiter des connaissances du groupe. Doppelmayr/Garaventa est présent dans 50 pays (pour un chiffre d’affaires de 763 millions d’euros lors de l’exercice 2020/2021 et 3192 collaborateurs, ndlr). Nous sommes ainsi leader mondial sur le marché des télécabines. Nous construisons environ 2500 cabines par année et employons 170 collaborateurs à Olten.

Les résultats de l’entreprise ont-ils été affectés par la pandémie?
Oui, car beaucoup de contrats ont été reportés en 2020, et nous n’avons pas encore retrouvé le niveau de 2019. Nous sommes aussi affectés par les difficultés d’approvisionnement et la hausse des prix des matières premières. Toutefois, nous restons confiants. La vente de cabines (nouvelles ou de remplacement) en montagne est stable. Ce marché des sports d’hiver représente environ deux tiers de nos ventes. Quant au marché des remontées mécaniques pour le transport urbain ou celui pour la visite de lieux touristiques, ils sont en pleine croissance, en particulier en Amérique du Sud et en Asie. Parmi les grands contrats décrochés récemment figurent par exemple La Paz, en Bolivie, ou celui du Val-de-Marne, près de Paris.

Le «Swiss made» est-il un atout pour votre industrie?
L’image de fiabilité et de qualité d’une production en Suisse joue un rôle important. Notre force est surtout de pouvoir produire à la fois des cabines standard en grande série et des véhicules sur mesure, comme des cabines de téléphérique de luxe pour fêter un événement par exemple. Nous misons aussi sur le développement, notamment dans l’équipement électronique des cabines (wi-fi, indication du trajet en temps réel, système d’alarme). Nous exploitons les compétences à l’interne ainsi que des partenariats avec des hautes écoles et des studios de design.


La luge comme passion familiale

Les Diablerets, Schlittenbauer

La menuiserie-charpenterie Morerod Charpente fabrique sur demande des luges traditionnelles en bois.

© Lorenz Richard

La menuiserie-charpenterie Morerod Charpente fabrique sur demande des luges traditionnelles en bois. C’est pour ses apprentis que l’entreprise familiale vaudoise a commencé à fabriquer des luges traditionnelles. «La conception de luges permet aux apprentis charpentiers d’effectuer un travail différent, plus fin, explique Joël Morerod, directeur. Au début, nous gardions ces luges pour nous, puis, face à la demande du public, nous avons commencé à les vendre depuis 2010.»

Basée aux Diablerets (VD) – avec une succursale à Aigle –, l’entreprise de 22 employés bénéficie de la proximité de la piste de luge de la station pour tester ses produits et pour se faire connaître. «La luge est devenue une activité d’hiver à part entière, pour les skieurs comme pour les familles», soutient Joël Morerod. L’entreprise Morerod fabrique en moyenne 30 à 50 luges par année, produites à la demande, «pour des anniversaires ou des mariages par exemple». Elles sont vendues entre 800 et 1500 francs pièce, «selon le degré de personnalisation du cuir et des gravures sur les patins».

Pour le directeur, la production doit rester régionale: «Les luges sont créées avec du frêne suisse de la vallée de Joux. Nous récupérons les petites sections non utilisées pour la construction. Le cuir de l’assise est travaillé par une cordonnière spécialisée dans la gravure de sangles de cloches à Châteaux-d’Œx (VD) et les patins sont conçus par un serrurier de la région. Nous allons également intégrer des semelles de ski qui seront assemblées localement.»


Verbier, référence du freeride

Lattes ou planche aux pieds, ils s’élancent du haut du Bec-des-Rosses, mythique montagne de Verbier. Chaque année, les finalistes du Freeride World Tour (FWT) se disputent la victoire dans la station valaisanne. «L’Xtreme de Verbier a été un événement à part entière de 1996 à 2008, explique son fondateur et directeur, Nicolas Hale Woods. C’est donc naturellement devenu la finale du FWT, pour l’exploit sportif, mais aussi parce que nous bénéficions du soutien de la station (environ 1 million de francs par année) et que l’ambiance reste inégalée!»

Référence en matière de freeride, le FWT contribue à faire connaître la Suisse et ses stations à travers le monde. L’agence basée à Lausanne emploie 12 personnes à plein temps. Elle s’occupe d’organiser l’événement, de sa logistique à sa diffusion vidéo. «Environ 90% de nos revenus viennent de nos partenaires: 60% sont des stations de ski, puisque être une étape de la compétition leur permet d’avoir des retombées économiques directes avec les spectateurs. C’est aussi un moyen marketing pour se positionner comme une destination premium en matière de freeride.» Les autres partenaires sont des marques privées qui sponsorisent divers sports, comme Audi ou Red Bull.

Le FWT comptabilise 6000 athlètes licenciés participant aux compétitions (de junior à professionnel). Avec son budget de 5 millions de francs, il agit donc comme une fédération sportive, mais refuse pour l’instant d’endosser ce rôle. «Le modèle privé est plus flexible et détaché de la politique, mais nous y pensons, glisse Nicolas Hale Woods. Aujourd’hui, notre objectif ultime est d’inscrire le freeride aux Jeux olympiques. C’est une vitrine unique qui apporte de la visibilité, de l’attractivité, et permet aux athlètes de se professionnaliser.


L’appli qui manquait aux écoles de ski

Réserver un cours, consulter le profil d’un élève, gérer la planification du personnel, telle est la promesse de Boukii. L’application fribourgeoise est actuellement en phase de test dans plusieurs stations, comme Les Paccots (FR) et Villars-sur-Ollon (VD). Les premiers retours sont encourageants. «Les écoles de ski ont rapidement adopté le concept», se réjouit Arsène Garcia, fondateur. Lui-même moniteur de ski, il avait constaté ce besoin dans son travail.

Créée fin 2020 et accompagnée depuis novembre 2021 par Fri Up, Boukii vise à devenir l’outil de gestion des cours pour les écoles de ski. L’application proposera également une interface réservée aux familles pour la réservation de leçons et une pour les moniteurs, qui pourront consulter les profils de leurs élèves afin d’adapter leurs séances. Côté prix, les écoles paieront en fonction du nombre d’opérations traitées. Son lancement est prévu pour le printemps 2022.

Des formations en ligne pour sensibiliser aux dangers de la montagne

«En vingt-neuf ans de carrière, j’ai perdu 30 amis dans des avalanches. L’éducation aux dangers de la montagne doit devenir une priorité.» C’est avec cette forte conviction que le Chaux-de-Fonnier Dominique Perret, élu meilleur skieur freeride du siècle en 2000 lors des Board Awards, a rejoint WEMountain. La start-up lausannoise propose des formations aux avalanches en ligne, suivies d’une validation des compétences sur le terrain.

«Les skieurs peuvent ainsi se préparer de chez eux à éviter les dangers et à réagir en cas de problème. En effet, 90% des avalanches sont causées par la victime elle-même ou un membre de son groupe.» Vendues 69 ou 99 francs, les formations en ligne sont dispensées par des moniteurs de ski ou des guides de montagne. Depuis son lancement en novembre 2021, WEMountain enregistre déjà plus de 1000 adhérents. De la marque de skis Head à la station de Verbier et le Freeride World Tour, WEMountain a conclu plusieurs partenariats.