Les meilleures idées naissent parfois un samedi soir, autour d’une bouteille de bon vin, en l’occurrence un blanc du Vully. Richard Hurni est à la recherche d’une place pour construire sa maison flottante. Il en parle avec Hans Hofstetter, propriétaire du chantier naval à Sugiez (FR). Comme la loi interdit d’être domicilié sur l’eau, le projet devait s’arrêter là. Jusqu’au jour où ils découvrent une barge en ruine. Transformer un bateau en un lieu d’accueil où l’on peut dormir n’est pas prohibé. Les deux amis tenaient leur idée.
Dès le lendemain, Hans Hofstetter dessine les plans. Neuf cabines imaginées par l’Atelier Oï, le Captain’s Lounge et un pont de 35 mètres de long, tout est pensé pour faire du boutique-hôtel Attila un lieu hors du temps. Un espace de retraite budgeté à 4 millions de francs. Onze actionnaires participent au premier financement; aujourd’hui, ils sont 59 et une nouvelle levée de fonds de 2,5 millions est en cours. Le canton de Fribourg participe à hauteur de 300 000 francs, sensible à l’innovation d’un projet qui met également en valeur les restaurateurs et les producteurs des Trois-Lacs puisque tous les repas sont pris à terre, sauf le déjeuner.
Bientôt des panneaux solaires et batteries au sel
Par ailleurs, le moteur hybride allie diesel et électricité verte et se veut plus écologique. «Actuellement, notre bateau consomme 24 litres à l’heure, alors qu’un bateau standard de cette taille consomme le double et fait beaucoup plus de bruit. Nous voulons aller plus loin et pouvoir le rendre autonome, comme un vélo électrique», note Hans Hofstetter. Panneaux solaires et batteries au sel vont être installés par le Groupe E. Ce dernier va également tester un système de propulsion avec de l’hydrogène produit dans le lac voisin de Schiffenen.
Si le bateau navigue élégamment sur les Trois-Lacs, faisant halte auprès des terrasses et des caves d’un vignoble omniprésent sur les coteaux, le développement de la société est galopant. «On ne savait pas si cela allait marcher. On a mis une publicité le 2 mai 2021 dans la NZZ pour des croisières de cinq nuits sur les Trois-Lacs. Quatre jours plus tard, on avait vendu 70% des croisières et dix jours après, on affichait complet pour toute la saison de juin à octobre. Notre marketing s’est résumé à une pub dans la NZZ!» s’exclame Richard Hurni, président du conseil d’administration et responsable du marketing. La clientèle aisée est au rendez-vous, prête à débourser 2500 francs par personne pour une croisière de six jours.
Attila devait initialement voguer au début de l’été 2021, mais, en raison d’un retard dans la livraison de matériel, puis de l’interdiction de navigation due aux inondations de juillet dernier, les croisières ont finalement démarré en août. La saison est tout de même une réussite et l’équipe décide de poursuivre en hiver, au fil des marchés de Noël. Les mesures sanitaires ralentissent de nouveau l’élan. L’enthousiasme reste. «On a eu la confirmation que notre concept plaisait et qu’on était sur le bon chemin, se réjouit le directeur marketing. On a également eu de l’intérêt pour notre modèle et des contacts ont été noués avec un groupe d’investisseurs pour les lacs des Quatre-Cantons et de Constance.»
Croisières à thème
Cette année a bien commencé, avec le Festival des Lumières à Morat, la mise à disposition du bateau-hôtel pour des séminaires et la reprise de la saison touristique fin avril. Désormais, l’équipe dirigeante doit davantage se rendre visible. «Le tourisme a un peu changé en 2022; les gens ont de nouveau envie de partir à l’étranger, observe Richard Hurni. Nous devons donc davantage faire de publicité et proposer de nouveaux formats. Les croisières «weekender» de deux nuits sont complètes jusqu’à fin septembre, mais le format plus long est plein à 50%.» Les croisières à thème – musique, golf, yoga – vont bon train. Un arrangement est passé avec les greens de Payerne, de Neuchâtel, de Wallenried (FR) au large de Morat et des Bois dans le Jura. Tous sont proches du débarcadère, sauf le golf des Bois, mais le parcours est spectaculaire et peu connu des amateurs, paraît-il.