Vous ne vous en doutez peut-être pas, mais vous êtes sans doute plus «écolo» que vous ne le pensez. Comment? Par le truchement de vos cotisations à votre 2e pilier, qui deviennent de plus en plus «durables». En matière immobilière, en tout cas. La preuve par les chantiers et les projets en mode 2050 qui fleurissent à travers la Suisse, la Suisse romande en particulier.

Les fonds de pension suisses misent sur la durabilité immobilière

A l’exemple du méga-projet de rénovation du quartier de Praz-Routoz, à Chexbres, auquel sont associés la commune et le distributeur Coop, ou encore d’un important site d’habitat de La Tour-de-Peilz et de surfaces commerciales, à Epalinges (VD). Le premier, devisé à plusieurs dizaines de millions de francs, est piloté par la Fondation Fundim/Equitim, basée à Lausanne, qui regroupe cinq caisses de pension: la Fédération vaudoise des entrepreneurs (FVE), le Centre Patronal, Romande Energie, la Caisse inter-entreprises de prévoyance professionnelle (la CIEPP, qui représente plus de 10 000 PME) et Previva, le fonds de prévoyance des professionnels du travail social. Cinq acteurs majeurs fédérés autour d’un objectif commun: investir dans des projets d’infrastructures innovantes, durables et en circuit court.

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Ces fonds ne se contentent plus d’installer des panneaux solaires sur les toits de leurs immeubles et quelques bornes de recharge pour les véhicules électriques dans les parkings, mais parlent de renaturation, d’énergies renouvelables, d’indépendance énergétique et de mobilité douce et ce, malgré un coût de construction pouvant dépasser celui du bâti traditionnel de 15 à 30%, voire de 40%. «Ils commencent à saisir les enjeux de la transition et se rendent compte que les délais pour transformer leur parc sont longs. Plus vite ils démarrent, mieux ils s’en sortiront», estime Marc Muller, ingénieur et fondateur d’Impact Living, à Yverdon, dépositaire des projets en question.

Des constructions en ligne avec la transition énergétique

Au-delà de l’écoresponsabilité qu’il est de bon ton d’invoquer, on peut légitimement se demander ce qui incite ces fonds connus pour optimiser les rendements de leurs placements à opter pour cette politique. La réponse est sans équivoque: «Nous voulons assurer la pérennité économique et énergétique de notre parc immobilier, affirme Gilles Basse, directeur financier d’Equitim. Notre fondation se veut exemplaire. Sa mission est d’offrir à des prix abordables des lieux de vie de qualité et proches de l’autosuffisance énergétique qui feront la différence dans les années à venir. Pour ces raisons, nous estimons qu’il est adéquat d’être proactif en participant dès à présent à la transition énergétique. Quant aux coûts de construction, leur cherté demeure relative. Entre le poids des normes, les tensions géopolitiques susceptibles de faire exploser les prix des matériaux et le manque de main-d’œuvre et de disponibilité des entreprises, qui peut affirmer que ces travaux ne coûteront pas plus chers dans cinq ou dix ans lorsque le régulateur imposera de les faire?»

Une vision que partage Next Immobilier, fonds d’investissement lausannois appartenant à la constellation du groupe Après-demain, qui détient également la société pharmaceutique Debiopharm, propriétaire de 900 appartements répartis dans une trentaine d’immeubles. «Le concept de durabilité est ancré dans les racines de la société depuis 2007, année de nos premières constructions. Celles-ci étaient déjà dotées de pompes à chaleur, de panneaux photovoltaïques et de bacs de rétention d’eau pour alimenter les WC. Depuis, nous avons toujours suivi cette philosophie visionnaire», explique Benjamin Favre, son CEO, lui aussi convaincu que les plus-values que génèrent les nouvelles technologies procurent des bénéfices directs et latents appréciables. «Ils permettent à la fois d’impacter durablement l’environnement, de fidéliser les locataires et de garantir la valeur du patrimoine à long terme», résume-t-il.

Rentabilité et durabilité: un pari gagnant pour l'avenir

Histoire de passer des paroles aux actes, Next Immobilier s’apprête à analyser la rénovation de deux de ses sites: un bâtiment de 27 appartements à La Tour-de-Peilz, lequel sera transformé uniquement avec des matériaux naturels biosourcés provenant de l’agriculture (chanvre, paille et bois), et en électrifiant le millier de places de parc dont il est propriétaire. Travaux déjà effectués sur les parkings de trois immeubles à Epalinges. Pour le gestionnaire, qui ne perd évidemment pas de vue la notion de rentabilité, cette stratégie s’avèrera à coup sûr rémunératrice. Notamment par la création de RCP (regroupement dans le cadre de la consommation propre), qui régit la vente directe d’électricité solaire aux consommateurs situés à proximité de l’installation photovoltaïque.

Un procédé intégré dans la loi fédérale sur l’énergie (LEne), qui rend la construction de ces installations très attractive. «Moins de charges ne bénéficie pas seulement aux locataires. Le propriétaire en profite aussi lorsque les loyers augmentent», souligne Benjamin Favre. A Chexbres, où le groupe est locataire, Coop se laisse d’autant plus entraîner par le mouvement que l’entreprise dit viser zéro émission nette d’ici à 2050 au plus tard. «Un projet de modernisation du bâtiment abritant notre magasin, principalement énergétique, est en effet en préparation. Une coordination des travaux avec la PPE, initiatrice de cet assainissement, est en cours de discussion afin de minimiser les impacts», précise le distributeur. Si la commune est en copropriété avec Equitim pour la partie habitat, elle est particulièrement concernée via le collège et sa salle de gymnastique, ainsi que les locaux abritant les services de police et de voirie.

«Comme il faudra de toute façon le faire un jour, ce serait ridicule de ne pas prendre le train en marche, qui nous permettra de surcroît de profiter d’économie d’échelle grâce à nos différents partenariats, estime Bertrand Kolb, le municipal à la tête du service des constructions. En parallèle, nous réfléchissons à un réaménagement global du quartier, y compris pour la circulation. Le projet en est à ses prémices et son coût n’a pas encore été chiffré. Il s’agira ensuite de convaincre le conseil communal. Jusqu’ici, tous les projets que nous avons présentés ont été bien accueillis.» Une décision est attendue courant 2025...