L’économie suisse continue d’exporter fortement (377,8 milliards en 2023) et la balance commerciale affiche un net excédent depuis près de quinze ans. Quelle est la contribution des PME dans ce succès?
Les PME sont présentes dans tous les secteurs et constituent le fondement de notre place économique: du fabricant de machines à l’entreprise informatique, en passant par l’agence de publicité locale, elles représentent la créativité et la force d’innovation de l’économie suisse. Cette diversité et cette capacité à créer contribuent de manière déterminante au succès des exportations et à la prospérité du pays.
Ce dynamisme peut surprendre compte tenu du franc fort, des coûts de production élevés et des problèmes d’approvisionnement de ces dernières années. La situation est-elle en fait moins mauvaise que prévu?
Malgré les défis actuels, l’économie suisse continue de se distinguer par une forte performance à l’exportation. Les PME ont largement su s’adapter aux conditions changeantes et maintenir leur compétitivité. C’est ce qu’a montré notre étude sur les PME de cette année, réalisée en collaboration avec nos partenaires Raiffeisen, le groupe industriel Kistler et le consultant Kearney: près de 70% des entreprises interrogées estiment que leur situation économique future s’annonce bonne, voire très bonne, et seulement 3% la jugent mauvaise.
Les PME qui réussissent à l’étranger sont presque toujours positionnées sur des marchés de niche, interentreprises (B2B). Est-il possible pour les entreprises suisses d’opérer en dehors de ce cadre?
Ces segments pointus permettent aux entreprises de se positionner comme des spécialistes et de développer des relations commerciales plus solides et durables en privilégiant les rapports commerciaux entre entreprises. Mais je suis convaincue que les entreprises industrielles suisses peuvent également réussir en dehors des marchés de niche, où la pression de la concurrence est plus forte. Certaines y parviennent en diversifiant leur portefeuille, en s’orientant davantage vers les marchés étrangers ou en misant sur l’innovation et les nouvelles technologies.
Dans certains secteurs, comme l’industrie alimentaire, les coûts de production élevés incitent les entreprises à délocaliser leur production vers des marchés moins chers. Est-ce un risque pour la stabilité économique et l’emploi?
Pour l’industrie alimentaire en particulier, où les marges sont plutôt faibles par rapport à d’autres secteurs, les coûts de production ainsi que le franc fort constituent un problème. La délocalisation de la production dans des pays à bas salaires peut présenter des risques pour la stabilité économique et l’emploi en Suisse. Toutefois, l’étude PME 2024 montre que près de 80% des PME s’attendent toujours à une hausse ou à une stabilité de leur chiffre d’affaires. En outre, de plus en plus d’entreprises expérimentent l’intelligence artificielle dans l’espoir de renforcer leur efficience. Les gains de productivité réalisés pourraient ainsi permettre à ces entreprises de se maintenir en Suisse.
Les négociations sur un accord de libre-échange entre la Suisse et l’Inde sont terminées. Quels bénéfices en attendez-vous pour l’économie suisse?
L’Inde est le pays le plus peuplé du monde et dispose d’une classe moyenne croissante et à fort pouvoir d’achat qui, grâce à l’accord de libre-échange, aura beaucoup plus facilement accès aux produits fabriqués en Suisse. En outre, environ 60% des entreprises suisses implantées en Inde utilisent ce pays comme hub d’exportation pour l’Asie du Sud. On peut s’attendre à ce que l’accord de libre-échange contribue à consolider l’implantation d’entreprises suisses dans le sous-continent, et en fasse un partenaire commercial asiatique alternatif à la Chine.
Le nombre de représentants suisses dans le classement des 500 plus grandes entreprises familiales du monde, le Family Business Index, reste stable, selon la dernière étude EY parue début 2023. Seize entreprises familiales basées en Suisse figurent en effet dans le top 500 mondial. Parmi elles, trois se sont même hissées dans le top 100: Roche à la 16e place, Kühne + Nagel à la 45e place et Richemont à la 79e place. Les suivantes sont Tetra Laval International (114e), Emil Frey Group (122e), Liebherr-International (135e), Schindler Holding (143e), DKSH Holding (145e), Swatch Group (238e), Barry Callebaut (240e), Firmenich International (372e), AMAG Automobil- und Motoren (384e), Omya (423e), Stadler Rail (447e), Bucher Industries (485e) et Endress + Hauser (491e).
Ces 16 entreprises génèrent collectivement un chiffre d’affaires de 235 milliards de dollars et connaissent une croissance de 15% en moyenne. A titre de comparaison, les entreprises asiatiques présentes dans le classement ont vu leur chiffre d’affaires progresser de 21%, et les entreprises nord-américaines de 12%. Sept des entreprises figurant dans le top 10 sont d’ailleurs basées aux Etats-Unis, dont le détaillant Walmart, qui occupe la première place, et la holding Berkshire Hathaway de Warren Buffett, à la deuxième place.
Publié conjointement par EY Suisse et l’Université de Saint-Gall tous les deux ans depuis 2015, l’indice répertorie les entreprises familiales connaissant le chiffre d’affaires le plus élevé à l’échelon mondial et qui sont dirigées par une famille depuis au moins deux générations. Pour être prise en compte, il faut que la famille ou une fondation lancée par la famille détienne plus de 50% des parts et des droits de vote. Les sociétés cotées en bourse sont classées comme entreprises familiales si la famille détient au moins 32% des parts et des droits de vote.
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