«Nous voulons réunir sous un même toit les meilleures compétences en direction artistique et les capacités les plus avancées en analyse de données. Objectif: atteindre le leadership mondial de la luxury technology (luxtech) dans le domaine du marketing.» David Sadigh est fondateur et directeur de Digital Luxury Group (DLG). La firme genevoise spécialisée dans le marketing digital du luxe a acquis à l’automne 2024 la start-up chinoise Re-Hub, experte de l’analyse de données basée sur l’IA.
Ce rachat s’inscrit dans la stratégie de «buy-and-build» de la firme genevoise et devrait être suivi par deux autres acquisitions ces prochaines années. Galvanisée par des performances qui lui ont permis de doubler son revenu entre 2019 et 2024, DLG ambitionne de tripler son chiffre d’affaires à l’horizon 2030. Spécialisée en stratégie commerciale digitale, la PME basée dans le quartier des Eaux-Vives accompagne déjà près de 70 clients issus de différents domaines: mode vestimentaire, horlogerie, automobile ou spiritueux. Elle met en place leur stratégie marketing qui leur permet d’atteindre un public cible et d’interagir avec lui. Par exemple via la conception de sites web ou la création de contenus d’activation-animation sur les réseaux sociaux (qui permettent de créer puis d’entretenir le lien de la marque avec sa clientèle à travers des concours, des quiz, des sondages, etc.).
Forte de 120 employés répartis principalement entre Genève et Shanghai, DLG a donc fait l’acquisition de Re-Hub, une start-up chinoise fondée en 2017 et comptant une quinzaine d’employés, dont d’anciens chercheurs en ingénierie informatique. Les deux entreprises partagent désormais leurs locaux dans la métropole chinoise.
Digital Luxury Group dénombre 120 employés répartis entre Genève et Shanghai. Spécialisée en stratégie commerciale, la société accompagne près de 70 clients actifs dans la mode, l’horlogerie, l’automobile ou les spiritueux.
Les données d’Alibaba
Avec l’acquisition de Re-Hub, l’entreprise genevoise compte désormais un puissant outil d’analyse de marché basé sur un grand modèle de langage (LLM), le même type d’IA dont ChatGPT est issu. «Cette technologie permet d’obtenir des informations très précises sur l’évolution des ventes et des prix», explique David Sadigh. Re-Hub recueille et analyse notamment des données tirées de Tmall, la plateforme d’e-commerce du géant chinois Alibaba. Sur cette marketplace très appréciée des consommateurs chinois, les marques disposent de leur propre boutique. Elles gardent le contrôle sur les aspects clés du marketing, comme l’image, le storytelling et les promotions. Les capacités d’analyse de Re-Hub permettent d’évaluer les performances commerciales de tous les produits vendus sur la plateforme, y compris ceux de la concurrence.
En outre, la start-up est aussi en mesure de scruter le marché des ventes parallèles et le commerce de seconde main. Pour DLG, cette capacité d’analyse élargie constitue un net avantage compétitif. «Notre clientèle pourra ainsi suivre de près le marché de la seconde main. Ces informations permettent de mieux orienter la stratégie commerciale. Par exemple en évitant de lancer le nouveau modèle d’un produit déjà abondamment disponible sur le marché de l’occasion sans y ajouter d’éléments différenciateurs», poursuit David Sadigh.
Les données chinoises sont difficiles à analyser sans connaissances approfondies de ce pays.
Arnaud Dufour, professeur de marketing digital à la HEIG-VD
Selon Arnaud Dufour, professeur de marketing digital à la HEIG-VD, les PME actives dans le domaine du conseil doivent constamment proposer de nouveaux outils à leur clientèle pour se différencier de la concurrence des grands groupes. «Les prestations liées au marketing digital sont souvent commandées sous forme de projet ou de mandat ponctuel. Proposer un service de veille et d’analyses statistiques, comme celui de Re-Hub, permet de renforcer les liens avec les clients en leur offrant un service permanent.»
Maîtriser les spécificités du marché chinois constitue par ailleurs un atout de taille pour une entreprise occidentale active dans le marketing. «Les données qui émanent de Chine peuvent être difficiles à analyser sans connaissances approfondies du système chinois. L’écart linguistique et culturel constitue aussi un obstacle. S’attacher les services d’une start-up basée sur place et dont l’algorithme a été entraîné sur un corpus de données chinoises est certainement un choix intéressant pour un acteur suisse», conclut le professeur Arnaud Dufour.