«L’ordre dans le chaos.» C’est avec ce mantra que la start-up Saporo se présente sur le marché de la cybersécurité. «La plupart des entreprises se concentrent sur les manières de réagir aux attaques informatiques. Notre approche consiste à les éviter en les anticipant, sur la base de l’état de configuration des systèmes.» Olivier Eyries a cofondé Saporo en 2021 avec son frère Guillaume Eyries et Eric Blavier. Lauréate du Prix Tech4Trust 2022, la start-up basée à Lausanne a jusqu’à présent levé 6 millions de francs en capital auprès d’investisseurs suisses et français.
Saporo a développé une technologie destinée aux professionnels de la sécurité informatique qui permet d’anticiper les attaques. «Nous donnons la possibilité aux défenseurs (les sociétés) d’avoir une visibilité sur toute la cybersurface d’attaque interne de leur système informatique (comme Azure, Amazon Web Services, Google Cloud, etc.). A l’aide de l’intelligence artificielle et de la théorie des graphes – qui utilise des modèles mathématiques sophistiqués –, nous pouvons identifier, parmi les dizaines de millions de chemins d’attaque, lesquels sont les plus dangereux, et les supprimer.»
PME et multinationales
La société compte 25 employés, dont un tiers en Suisse, les autres étant basés en France, en Allemagne, en Suède, au Moyen-Orient et aux Etats-Unis. L’entreprise travaille autant avec des PME qu’avec des multinationales, des administrations publiques, des universités ou des hôpitaux, comme des centres hospitaliers en France ou la banque Mirabaud en Suisse.
Selon le consultant International Data Corporation, les ventes de solutions et de services de sécurité informatique généreront cette année 219 milliards de dollars de chiffre d’affaires, soit 12,4% de plus qu’en 2022. «Le marché est en plein essor. Nous avons connu une croissance de 500% en deux ans, c’est extrêmement stimulant! Le marché prend conscience des risques et les entreprises commencent à prendre des mesures proactives.» Le modèle d’affaires de Saporo consiste à proposer des licences annuelles. Chaque formule est calculée en fonction du nombre de salariés dans l’entreprise cliente, son système et l’environnement informatique qu’elle souhaite faire analyser.
Le contexte géopolitique actuel – notamment les tensions entre la Chine et Taïwan, la guerre en Ukraine ou les enjeux au Moyen-Orient – crée une forte demande en matière d’anticipation des cyber-attaques. «Le secteur reste encore largement sous--investi. Outre les menaces d’attaques, l’espionnage économique industriel et le vol de propriété intellectuelle, notamment dans les secteurs de l’horlogerie et de la pharmacologie, sont importants, et pas seulement par des pays dits ennemis.»
Souveraineté des données
Le premier marché de Saporo est l’Europe, avec la Suisse, la France, l’Allemagne. Elle travaille également aux Etats-Unis et au Moyen-Orient, dont les Emirats arabes unis, le Qatar et «l’Arabie saoudite également, un pays en hyper-croissance, peu affecté par les crises financières mais dont le contexte régional est critique au niveau cybersécurité».
L’enjeu pour Saporo consiste à rester à la pointe de sa technologie pour s’imposer face aux concurrentes américaines et israéliennes. «Dans ces pays, les start-up disposent de capitaux et de financements beaucoup plus importants. La bataille est asymétrique, raison pour laquelle les start-up suisses s’expatrient régulièrement. Il est temps de créer un tissu industriel cybereuropéen pour favoriser la souveraineté quant à l’utilisation des données.» L’entreprise souhaite ainsi rester en Suisse, en hébergeant sur place ses données. «La Suisse est reconnue et appréciée pour sa neutralité, son savoir-faire, sa précision. Le pays a aussi l’avantage d’être exempt d’étiquette politique ou militaire.»
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En Suisse, une PME sur trois a déjà été victime d’une cyberattaque. Les cas explosent et les dégâts se chiffrent en millions. Retrouvez des témoignages et des conseils d'experts pour lutter contre ce fléau. A lire sur le même sujet: