Souvent choisies pour des raisons éthiques ou de santé, les alternatives véganes aux produits laitiers séduisent toujours plus de consommateurs suisses. Entre 2017 et 2021, les ventes de substituts au lait de vache à base d’amande, de soja ou de noix de cajou ont connu une augmentation fulgurante d’environ 80% en Suisse, selon une étude de l’Office fédéral de l’agriculture. Parallèlement, l’association Swissveg a enregistré une hausse de 14% par an du nombre de personnes végétariennes (+5,4% en 2022) et véganes (+0,7% en 2022) depuis 2017.

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En Suisse, des entrepreneurs ont décidé d’investir ce marché en croissance, à l’instar de New Roots. «Bien que 30% de nos clients se déclarent véganes ou végétaliens, les 70% restants concernent des profils variés, détaille Alice Fauconnet, cofondatrice. Nous supposons qu’il s’agit de personnes intolérantes au lactose ou flexitariennes, qui désirent consommer moins de produits laitiers pour des raisons écologiques, de santé ou liées au bien-être animal.»

Le cofondateur de l’entreprise, Freddy Hunziker, confectionne ses premiers fromages au lait végétal en 2014, pour leur consommation personnelle. «Nous trouvions les produits véganes industriels décevants et le goût du fromage ainsi que la culture et les traditions qui s’y rattachent nous manquaient. A la base, l’idée n’était pas de créer une entreprise!»

Le duo fonde New Roots en 2016 avec une petite production artisanale, qu’il vend sur le marché local de Thoune (BE). Depuis, la crémerie végane s’est installée dans une usine de 4000 m2 à Oberdiessbach (BE) et emploie 33 personnes. «Le partenariat conclu avec la Coop en 2018 représente 90% de notre chiffre d’affaires. Nous sommes aussi présents dans des magasins bios suisses, sur divers marchés européens et à la Migros depuis 2020.»

Savoir-faire traditionnel

Alice et Freddy ont appris leur métier auprès de fromagers traditionnels. «L’enjeu consiste à valoriser ce savoir-faire, tout en innovant afin d’obtenir des produits artisanaux, dont le goût se rapproche le plus possible de celui des fondues, raclettes et camemberts classiques», explique Alice Fauconnet. Les fromagers de New Roots appliquent ainsi les mêmes méthodes de fermentation et d’affinage que celles utilisées en fromagerie traditionnelle.

Jusqu’en 2022, les produits New Roots étaient fabriqués à partir de noix de cajou équitables, importées du Burkina Faso et du Vietnam. L’entreprise intègre désormais des graines de lupin suisses et des pois chiches italiens dans certains de ses produits. «Il s’agit de réduire au maximum notre impact environnemental en travaillant à terme uniquement des matières premières suisses.»

Depuis 2019, la crémerie reverse 1% de ses ventes totales à des sanctuaires pour animaux et à des programmes de transition pour les agriculteurs, notamment au travers de l’initiative TransFARMation. «Le but consiste à soutenir les agriculteurs qui le désirent à opérer un changement vers de nouveaux modes d’exploitation, plus écologiques et respectueux des animaux. Certains producteurs viennent aussi visiter nos locaux. Le dialogue est ouvert et l’intérêt véritablement mutuel.»

Le gruyère un patrimoine à préserver

Bataille juridique
Depuis 2013, l’Interprofession du Gruyère (IPG) s’est battue afin de labelliser la marque «gruyère» aux Etats-Unis. «Au-delà du marché américain, notre but consistait à empêcher les entreprises européennes d’exporter leur fromage sous le nom de gruyère, qui désigne un produit associé à une région spécifique, détentrice d’un savoir-faire particulier», précise le directeur de l’IPG, Philippe Bardet. Début 2023, une cour d’appel a toutefois décidé qu’il s’agissait d’un nom commun que tout producteur peut utiliser. «Cette décision servira peut-être de précédent pour d’autres noms comme le cognac ou le parmesan», regrette le directeur.

Exportations en recul
En 2023, le nombre d’exportations de gruyère a légèrement baissé par rapport aux années précédentes. Ce recul n’est toutefois pas lié à d’éventuelles répercussions négatives à la suite de l’arrêt de la cour d’appel américaine. «L’augmentation des prix engendrée par la hausse des coûts de production en septembre 2022 a notamment constitué un frein. Néanmoins, la tendance reste positive.» Les Etats-Unis sont en outre la première destination des exportations du gruyère, avec 3500 tonnes en 2023.

Communication et accords bilatéraux
Afin de continuer à valoriser le gruyère auprès des consommateurs, l’IPG entend développer ses axes de communication. «Les premiers écrits parlant du ‘fruit des alpages’ datent du XIIe siècle. Il s’agit d’expliquer le lien indissoluble entre ce fromage et le savoir-faire d’alpage. La récente inscription de la saison d’alpage au patrimoine culturel immatériel de l’Unesco constitue en ce sens une vraie reconnaissance.» Le renforcement d’accords bilatéraux devrait aussi permettre d’améliorer la protection des appellations suisses à l’avenir.

Le chemin de croix du fromage suisse

Production locale en baisse, exportations en berne et produits importés bon marché qui séduisent toujours plus les consommateurs: les fromagers suisses sont dans la tourmente. Découvrez notre dossier: