Faire un héritage, un parcours semé d’obstacles

Les bénéficiaires doivent affronter un marathon administratif, alors que la succession ravive souvent conflits et rancœurs au sein de la famille. Notre guide pour gérer ces difficultés au mieux.

«Une succession est un processus complexe qui prend beaucoup de temps. Un facteur qui complique les démarches, c’est que les héritiers ignorent parfois tout de la situation financière de leurs parents», témoigne Murielle Pelchat, directrice d’Asnova, association vaudoise à but non lucratif qui soutient les personnes en deuil. Dans les cas les plus favorables, les successions durent deux ans en moyenne. Mais elles peuvent s’étirer au-delà de dix ans lorsqu’il y a désaccord entre les héritiers.

également interessant
 
 
 
 
 
 

Le plus difficile, selon l’ensemble de nos interlocuteurs, c’est le torrent d’émotions qui déferle à ce moment-là. Les rancœurs accumulées au fil des ans dans la famille remontent à la surface, des différends jamais réglés que l’on ne peut alors plus éviter. Cette tourmente épuise les protagonistes, tout en les empêchant souvent de se comporter de manière rationnelle.

Du moment que le défunt a rendu son dernier souffle, son cercle familial n’aura plus aucun accès aux informations financières à son sujet, que ce soit auprès des banques ou de l’administration fiscale. Un certificat d’héritier est nécessaire pour obtenir tout renseignement. Alors qu’elles sont abattues par le deuil, les personnes concernées doivent en outre faire face à des délais très courts. Les héritiers ont en général trois mois pour accepter ou répudier la succession. Un choix qui repose en théorie sur la présence de dettes dans le patrimoine transmis. Mais dans les faits, c’est plus compliqué. «Il y a une très grande implication relationnelle qui peut conduire les héritières et héritiers à endosser des dettes pour éviter la faillite de leur proche, qui, selon l’usage, sera annoncée publiquement», poursuit Murielle Pelchat.

Pour la grande majorité des Suissesses et des Suisses, les sommes en jeu portent sur quelques dizaines de milliers de francs. Néanmoins, Murielle Pelchat prévient: «Toute succession constitue un événement qui peut raviver des conflits latents. Certaines familles vont se déchirer pour des montants dérisoires.» Comment aplanir les difficultés inhérentes à cette épreuve? Ce dossier a pour objectif de vous aider à réussir ce marathon dans les meilleures conditions possible.

Infographie: l'héritage
© DR
L’héritage en chiffres

60% des héritages pour les plus de 60 ans
Les héritages et les donations sont parfois perçus comme un mécanisme d’équilibrage économique entre les générations. Or il n’en est rien. En raison de l’espérance de vie actuelle, le transfert de richesse a lieu lorsque les ayants droit ont déjà atteint un âge mûr. Une étude basée sur les données fiscales du canton de Berne montre que seulement 5% des héritages et près de 20% des donations sont versés à des bénéficiaires de moins de 40 ans. Près de 60% des héritages sont transmis à des personnes de plus de 60 ans.

Un tiers des Suisses n’en parlent pas
Selon l’étude sur la prévoyance d’Axa 2023, plus d’un tiers des Suisses (37%) n’ont jamais parlé d’héritage dans le cadre familial. A l’opposé, quelque 39% ont déjà abordé le thème des enjeux patrimoniaux de manière active. Les conversations au sujet de la succession deviennent plus fréquentes à partir de l’âge de 60 ans.

L’initiative attendue de la part des parents
Parmi les personnes qui n’ont jamais abordé les questions de succession avec leurs héritiers, 27% estiment que c’est aux parents d’aborder ce thème. Et seulement 1% des sondés considèrent que c’est aux enfants d’aborder cette question.

Seulement 10% d’héritiers dans la force de l’âge
Dans la population suisse, seule une personne sur dix parmi les moins de 60 ans a déjà hérité après le décès d’un proche (source Axa). Parallèlement, seuls quelque 15% des sondés ont bénéficié d’un avancement d’hoirie, c’est-à-dire d’une donation, pour l’achat d’un logement ou en prévision d’un gros investissement.

Les 10 conseils pour surmonter l’épreuve d’une succession

Comment réussir le transfert de richesses entre les générations, du côté des héritiers comme de celui de la parentèle? Des expertes répondent à 10 questions essentielles.

Du côté de l’héritier

1. Comment minimiser les frais lors d’une succession?

La réponse est extrêmement simple: anticipez et mettez-vous d’accord sur les questions d’héritage à un moment où tout le monde est toujours en bonne santé. La rédaction d’un testament ou d’un pacte successoral établi en toute transparence est la condition de base pour s’épargner les complications administratives et les frais qui les accompagnent. Au moindre différend, il faut consulter un avocat, dont les tarifs peuvent s’élever entre 350 et 450 francs l’heure, en fonction du canton et de la complexité de l’affaire.

Faites le calcul avant de vous lancer dans une bataille pour vous arroger un capital de quelques milliers de francs. Si le litige va au tribunal, cela peut coûter cher. Avocate spécialiste en droit des successions, Alexandra Farine Fabbro souligne: «Il est toujours possible d’avoir recours à la médiation. Toutefois, la médiation a aussi un coût. Trouver le plus rapidement possible un accord convenant à toutes les parties est la condition de base pour limiter les frais.»

L’exemple: Alexandra Farine Fabbro dresse un cas de succession fictif, aux frais minimaux. Dans une famille constituée de deux parents et de deux enfants, la mère décède. Aucun testament n’a été rédigé et tous les héritiers acceptent la succession. Un certificat d’héritier est délivré et les héritiers se partagent les biens selon la part légale de chacun.

En Suisse, le taux d’imposition dépend essentiellement du degré de parenté. Les héritages du conjoint survivant et des descendants directs sont en général exonérés d’impôt. En revanche, les héritages reçus par des tiers sont imposés.

2. Comment se répartit la masse successorale?

Quelques principes de base s’appliquent dans toute succession. Supposons que le défunt laisse derrière lui un conjoint et deux enfants. En l’absence de dispositions testamentaires, le conjoint survivant a droit à une part de la succession équivalente à la moitié de la succession, tandis que les deux enfants ont chacun droit à un quart de la succession. Si la succession est évaluée à 100 000 francs, le conjoint survivant recevra 50 000 francs, tandis que chaque enfant recevra 25 000 francs.

Le conjoint et les descendants bénéficient d’une réserve héréditaire. Il s’agit de la part minimale de l’héritage fixée par la loi que l’on ne peut leur retirer. Cette part correspond à la moitié de la part légale. Dans l’exemple qui nous occupe, cette réserve héréditaire s’élève à 25 000 francs pour le conjoint survivant et à 12 500 francs pour chaque enfant. La rédaction d’un testament permet de modifier cette répartition. Les réserves héréditaires représentent 50% du patrimoine et le testateur peut disposer librement de la moitié restante. Cette part s’appelle la quotité disponible. Le testateur peut l’utiliser pour faire hériter des personnes à l’extérieur du cercle familial. Ces héritages sont lourdement taxés du moment qu’ils ne vont pas à des héritiers légaux.

Notaire à Aigle, Sarah Gros commente: «Lorsque les relations familiales sont harmonieuses, les enfants choisissent souvent d’améliorer le sort du conjoint survivant de la manière suivante: dans un pacte successoral, ils renoncent à leur réserve héréditaire afin que le parent restant reçoive l’entier du patrimoine.»

L’exemple: Reprenons l’exemple précédent. Sur une masse successorale de 100 000 francs, les deux enfants renoncent donc à leur part réservataire de 12 500 francs chacun afin que le veuf ou la veuve dispose de la totalité de l’héritage, soit 100 000 francs. Sarah Gros prolonge: «Les enfants se partageront le solde de l’héritage au décès du deuxième de leurs parents.»

3. Si j’hérite de dettes, comment répudier une succession?

Après un décès, les héritiers ont trois mois pour accepter ou répudier la succession auprès de la justice de paix, qui leur a envoyé un courrier les informant de la situation. Dans ce délai, les héritiers peuvent également demander un bénéfice d’inventaire, qui est une analyse de la masse successorale pour déterminer si les dettes dépassent l’actif. Facturée à l’avance, cette analyse coûte quelques milliers de francs. «Une succession est acceptée tacitement. Les héritiers n’ont pas besoin de répondre à la justice de paix. En revanche, pour la répudier, il faut envoyer un courrier, en recommandé, afin de garder une preuve», recommande Natacha Cotting, titulaire du brevet d’avocat et employée auprès de la société VZ, qui propose des conseils financiers indépendants.

Du moment qu’une personne répudie la succession, elle ne reçoit pas de certificat d’héritier et n’a donc aucun droit sur aucun bien et ne peut faire aucune démarche au nom du défunt. Une succession répudiée par l’ensemble de la communauté héréditaire est gérée par l’Office des faillites, qui va liquider la masse successorale. S’il reste un bénéfice après la liquidation, il sera versé aux héritiers.

Avec une répudiation, les héritiers n’ont pas à résilier le bail de la personne décédée, ni à payer le loyer jusqu’à la fin du bail, ni à vider l’appartement. Tout est pris en charge par l’Office des faillites. «Il faut être attentif au fait que les héritiers n’ont pas non plus le droit d’entrer dans l’appartement du défunt, ni de s’approprier quoi que ce soit qui lui appartenait, tant qu’ils n’ont pas reçu le certificat d’héritier», détaille Natacha Cotting.

Désigné par le défunt dans un testament, un exécuteur testamentaire dispose quant à lui d’un large pouvoir d’administration et de disposition. Il s’agit souvent du notaire de la personne concernée. Chargé de faire respecter les dernières volontés du défunt, il a le droit d’intervenir dans les questions administratives après le décès si l’un des héritiers répudie la succession ou avant qu’ils n’obtiennent le certificat d’héritier.

4. Puis-je contester la répartition de la succession?

Quelques principes de base. Au moment de la succession, si aucune disposition pour cause de mort n’est retrouvée (testament, pacte successoral), l’héritage se répartit en fonction des parts prévues par la loi.

Le chiffre: La rédaction d’un testament laisse une marge de manœuvre à son auteur pour 50% de son patrimoine (quotité disponible), dans la limite des réserves héréditaires prévues par la loi. Les héritiers directs ne peuvent pas être exclus de la succession, sauf s’ils y renoncent eux-mêmes dans le cadre d’un pacte successoral.

Une contestation est «recevable» si, par exemple, un membre de la fratrie a reçu de gros montants d’argent de ses parents de leur vivant, et non ses frères et sœurs. Les droits découlant d’assurances vie en faveur de l’un ou l’autre héritier direct ou d’un tiers peuvent également entrer en ligne de compte. «Dans de tels cas, il est notamment possible d’intenter une action en réduction ou une action en partage», explique Alexandra Farine Fabbro. Les éventuels rapports et réunions seront alors examinés.

Pour se lancer dans une telle démarche, il faut bien sûr des preuves qui attestent des transferts de biens. Cependant, ces inégalités entre frères et sœurs restent très souvent dans le non-dit, ce qui peut susciter de vives jalousies dans une fratrie. Le favoritisme des parents peut avoir des conséquences douloureuses au moment de régler la succession. Selon Alexandra Farine Fabbro, «lorsque l’on essaie de cacher ces cadeaux, les choses s’enveniment énormément».

5. Comment régulariser des avoirs non déclarés?

Chez la génération née autour de la Seconde Guerre mondiale, les avoirs non déclarés sont encore très fréquents. Il était de coutume de cacher un bas de laine sous le matelas ou un peu d’argent sur un compte bancaire dont on cachait l’existence aux impôts. Une campagne de régularisation a eu lieu entre 2010 et 2018, dans le sillage de la fin du secret bancaire helvétique. Celle-ci a permis au fisc de récupérer des milliards de francs d’impôts impayés. Or des fonds cachés continuent à apparaître dans un grand nombre de successions.

Pour régulariser ces fonds, la procédure est très simple. Les héritiers peuvent procéder à une dénonciation spontanée. Cette procédure prévoit un rappel d’impôt simplifié limité aux trois années précédant le décès du défunt (plus intérêts moratoires) et il n’y aura pas d’amende. «Je conseille vivement cette démarche. Si c’est le fisc qui découvre des avoirs non déclarés, il va facturer dix ans d’arriérés d’impôts et des intérêts moratoires», indique Alexandra Farine Fabbro.

Je prépare ma succession

6. Comment faire hériter un partenaire non marié?

Sans testament, le concubin ou la concubine n’hérite de rien. La personne n’a aucun droit à conserver son logement si celui-ci appartient au défunt, la propriété revenant aux héritiers légaux. «Dans un couple non marié, une façon de garantir un toit au partenaire survivant est de se déclarer mutuellement bénéficiaire d’un usufruit», révèle Natacha Cotting.

L’usufruit est un droit réel qui permet à une personne de jouir d’un bien immobilier appartenant à autrui. Cela signifie que le partenaire survivant aura le droit de continuer à vivre dans le logement, même si celui-ci appartient à l’autre partenaire. Cependant, il faut noter que la valeur de l’usufruit ne doit pas dépasser la quotité disponible de la succession, c’est-à-dire la part qui n’est pas réquisitionnée par les réserves héréditaires.

L’héritage des concubins sera taxé à quelque 50% (jusqu’à 55% à Genève), puisqu’ils sont considérés comme des tiers et non des héritiers directs, exemptés d’impôt selon les cantons.

Le conseil: «Une façon de résoudre ce problème est de placer les avoirs dans la caisse LPP ou sur une assurance vie sans valeur de rachat. Le bénéficiaire pourra ainsi disposer d’un capital ou d’une rente aux conditions fiscales plus avantageuses qui s’appliquent à la fortune et au revenu», signifie Natacha Cotting.

Elle ajoute: «Schwytz et Obwald ne perçoivent aucun impôt sur les successions, quel que soit le degré de parenté. Si la situation personnelle l’autorise, il peut être intéressant d’y établir son domicile pour faire bénéficier les héritiers de cet avantage.»

Pourquoi préférer un pacte successoral

Particularité
Le pacte successoral permet de définir sa succession avec l’accord des personnes concernées, en prenant d’autres dispositions que celles qui sont prescrites et autorisées dans le cadre de la loi. Le pacte successoral est une forme de disposition moins courante que le testament. Il présente quelques particularités qui permettent d’offrir une plus grande liberté d’organisation au sein de votre entourage.

Succession
Signé devant notaire en présence de deux témoins, ce document permet de vous mettre d’accord avec votre entourage de votre vivant sur la façon de régler votre succession ou une partie de celle-ci. Dans ce cadre, les héritiers légaux qui auraient droit à une réserve héréditaire (une part de l’héritage définie par la loi) peuvent y renoncer. Un héritier peut par exemple accepter d’abandonner ses prétentions si vous l’avez beaucoup soutenu de votre vivant.

Cas complexes
Autres possibilités, vous vous engagez à laisser la maison familiale à un de vos enfants, avec l’accord du reste de la fratrie, ou vous voulez faire hériter une tierce personne. Un pacte successoral peut être conclu non seulement entre deux, mais également entre plusieurs parties. Il offre une grande sécurité juridique aux parties concernées. Cependant, en raison de l’effort requis et des coûts encourus, il n’est recommandé que dans les cas complexes.

Modification
A la différence du testament, que vous pouvez révoquer ou modifier en tout temps, le pacte successoral peut être modifié uniquement avec l’accord de toutes les parties qui l’ont signé.

 

7. Comment organiser une succession avec des enfants de différents mariages?

Alors que les familles recomposées sont en passe de devenir la norme, la succession se révèle un casse-tête douloureux, pour des raisons évidentes. La loi prévoit que le conjoint marié, que ce soit en premières ou en deuxièmes noces, touche 50% des avoirs (l’ex-conjoint n’a droit à rien, de même qu’un concubin non marié, même de longue date). Les enfants des différentes unions se partagent les 50% restants de l’héritage. Cette répartition provoque très souvent des conflits entre le nouveau conjoint et les enfants du défunt ou de la défunte.

Le conseil: «Dès qu’il y a des enfants nés de différentes unions, il est important d’anticiper les questions successorales. Ne rien faire est souvent la pire des solutions», pointe Sarah Gros.

Par exemple, si la nouvelle épouse et les enfants du second mariage vivent dans un logement appartenant au défunt et que rien n’a été prévu. «Le nouveau conjoint, ses enfants, ses beaux-enfants vont se retrouver propriétaires communs des murs», commente Sarah Gros. Les enfants de la première union peuvent alors réclamer leur part, ce qui risque de nécessiter la vente de l’immeuble.

Une solution pourrait être de prévoir le versement de leur part successorale réservataire en espèces. Demandant l’accord de toutes les parties concernées, le pacte successoral est l’outil le plus efficace face à ce genre de situation (lire encadré). La difficulté étant bien sûr de mettre tout le monde d’accord avant le décès du défunt. Ce dernier peut aussi rédiger un testament qui ne demande pas l’approbation des héritiers. Ceux-ci risquent alors de régler plus tard leurs différends devant les tribunaux.

8. Comment faire des donations de mon vivant?

Vous pouvez faire bénéficier vos enfants d’une partie de votre patrimoine de votre vivant, par l’intermédiaire d’une donation. En règle générale, vos enfants n’hériteront pas avant d’avoir atteint l’âge de la retraite ou d’en approcher. Une donation peut permettre à vos enfants d’acquérir un logement ou d’améliorer le quotidien d’une jeune famille, au moment où un coup de pouce financier leur sera le plus utile.

Pour faire une donation de son vivant, il est recommandé de consulter un notaire ou un avocat qui s’assurera que la donation est conforme à la loi suisse. Dans la plupart des cantons, vous devez déclarer toute donation reçue spontanément à l’administration fiscale cantonale, dans un délai bien précis. Les impôts de donation diffèrent selon les cantons.

«Si un enfant bénéficie d’une donation mais pas un autre, ce dernier peut se trouver potentiellement lésé. A certaines conditions, il a droit à un rééquilibrage au moment du règlement de la succession. Si la donation n’a pas été prise en compte dans le testament et que l’un des enfants n’a pas reçu sa part réservataire, ce dernier peut intenter une action en réduction devant les tribunaux», dit Sarah Gros. Une lapalissade: tout se passe beaucoup mieux quand les donations sont effectuées dans la transparence, face au cercle familial comme à l’administration fiscale.

Natacha Cotting mentionne un aspect méconnu. Lorsque, ayant atteint le grand âge, une personne ne peut financer les frais de l’hébergement en EMS ou les coûts des traitements, elle a droit à des prestations complémentaires de l’Etat. L’administration demande alors un inventaire du patrimoine dans lequel doivent figurer les donations effectuées. Dans ce cadre, l’Etat peut refuser d’octroyer les prestations complémentaires à la personne concernée si les donations sont trop importantes. L’Etat est en droit de demander aux enfants, si leur situation financière le permet, de soutenir financièrement le parent se trouvant dans une situation de besoin.

Dernière éventualité, si une personne au bénéfice de prestations complémentaires décède et que sa succession est largement bénéficiaire, les héritiers peuvent être sommés de rembourser les prestations versées. Ces mesures ont pour but d’éviter que les personnes ne transfèrent d’avance leur patrimoine à leurs héritiers pour le soustraire au paiement de leurs frais d’hébergement et de santé. «Avant de faire une donation, il est judicieux de faire des estimations précises de budget et de conserver le patrimoine nécessaire au paiement des frais à venir. Cette mesure a pour but d’éviter des tracas à ses enfants, à qui l’Etat pourrait demander des comptes», conseille Natacha Cotting.

Pourquoi faire un testament

Conflits
Un testament vous permet de décider de ce que vous voulez qu’il arrive à vos biens après votre décès. Vous pouvez désigner vos héritiers et leur attribuer des parts spécifiques de votre patrimoine. Vous pouvez aussi déshériter une personne, dans la limite des réserves héréditaires prévues par la loi. Si vous ne rédigez pas de testament, vos biens seront répartis selon la loi, ce qui peut ne pas correspondre à vos souhaits. Ce document établi avec un notaire peut en outre faciliter la tâche de vos survivants qui comprendront plus facilement vos souhaits et pourront les mettre en vigueur en évitant les ambiguïtés. En cela, un testament peut aider à éviter les conflits familiaux.

Témoins
Cet outil juridique vous permet aussi de désigner des exécuteurs testamentaires, qui seront responsables de la mise en œuvre de vos dernières volontés. Ils peuvent être chargés de payer vos dettes, de distribuer vos biens et de s’occuper de vos enfants mineurs. Un testament peut être modifié ou annulé à tout moment. Si vous souhaitez le modifier, vous devez le faire par écrit et le signer devant deux témoins.

Sécurité
Selon un récent sondage de l’association MyHappyEnd, seuls 25% des Suisses prennent des dispositions pour régler leur succession. Par conséquent, les querelles d’héritage s’avèrent fréquentes. Une personne sur deux affirme l’avoir vécu dans son propre entourage. Selon la même source, les personnes qui rédigent un testament trouvent cela «libérateur» pour 81% d’entre elles. Quelque 21% trouvent que la démarche a été «compliquée». Les raisons qui motivent la rédaction d’un testament sont en priorité la volonté de mettre en sécurité le partenaire, les enfants et les proches parents (61%).

Absence
Rappelons qu’en l’absence de testament le ou la partenaire non marié n’a droit à aucune part de l’héritage, d’après le cadre légal en vigueur.

 

9. Peut-on déshériter ses enfants? Que faire face à un héritier dépensier?

Aux Etats-Unis, il est possible de rayer un fils ou une fille de sa succession d’un simple trait de stylo. Ce n’est pas le cas en Suisse, où le droit successoral ne permet de déshériter quelqu’un que pour des motifs graves. On peut alors recourir à l’exhérédation, qui doit être spécifiée dans un testament ou un pacte successoral. Cette mesure peut être contestée par l’héritier devant la justice. S’il obtient gain de cause, il peut retrouver sa réserve légale. «Les cas d’exhérédation restent très rares dans notre pays», constate Alexandra Farine Fabbro. Le testateur qui veut pénaliser un héritier n’a que la possibilité de réduire sa part à la réserve héréditaire prévue par la loi.

La personne qui veut protéger le patrimoine contre les dépenses excessives d’un héritier a la possibilité de créer un trust. Cette structure juridique permet de transférer la propriété des actifs à un tiers de confiance, qui les gère ensuite pour le bénéfice des bénéficiaires. Les trusts sont utilisés pour protéger la fortune familiale contre les créanciers, les impôts et les tendances dépensières des héritiers. En raison de leurs coûts et de leur complexité, ces structures concernent des fortunes qui se comptent en dizaines ou centaines de millions de francs.

Une autre option consiste à inclure des clauses de fiducie dans le testament. Il s’agit de dispositions qui permettent de contrôler la distribution de la succession après le décès. Par exemple, il est possible d’établir une fiducie pour un héritier mineur ou dépensier, qui ne recevra sa part de la succession qu’à un âge spécifié ou sous certaines conditions.

10. Comment faire hériter quelqu’un en dehors du cercle familial?

Les circonstances de la vie font que certaines et certains sont parfois liés à des personnes qui n’appartiennent pas au cercle familial. Or ces protagonistes n’existent pas au regard de la loi. Une personne ayant entretenu une relation extraconjugale ou de confiance avec le défunt ou la défunte a le statut de tiers. Il en va de même pour les enfants non reconnus. Pour hériter, ces individus doivent figurer sur un testament, ce qui les fera inévitablement apparaître au grand jour. Et ils seront alors lourdement taxés avec le statut de tiers. Les enfants nés hors mariage mais reconnus jouissent quant à eux d’un statut d’héritier direct. Ceci leur donne droit à leur réserve héréditaire, même sans l’existence d’un testament en leur faveur.

Comment éviter les pièges de la succession

Jamais les sommes héritées n’ont été aussi élevées. Pourtant, deux tiers des Suisses ne font aucune démarche pour faciliter la transmission de leur patrimoine.

 
Carré blanc
Mary Vakaridis