De nouvelles sources d’énergie sont indispensables

Des améliorations en termes d’efficacité énergétique ont permis ces dernières années une baisse de la consommation d’énergie. Mais la route vers la neutralité climatique est encore longue.

L’approvisionnement énergétique constitue l’un des principaux défis à relever au cours des prochaines décennies. Cet enjeu touche aussi bien au respect de l’environnement qu’à notre confort et à notre qualité de vie. Ces aspects peuvent paraître parfois inconciliables, mais ils sont intimement liés. Ainsi, bien des secteurs économiques ont tout intérêt à moins consommer d’énergie. C’est d’ailleurs l’une des raisons qui expliquent les baisses de consommation observées ces dernières années en Suisse.

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Les mesures politiques, le progrès technologique et les conséquences résultant du passage d’une source d’énergie à une autre, comme le remplacement du mazout par le gaz naturel ou la chaleur à distance, ont aussi favorisé cette diminution.

De leur côté, les énergies renouvelables enregistrent une croissance continue, en particulier le solaire. En 2021, leur part est passée à environ 28% de la consommation totale d’énergie finale. En ce qui concerne le nucléaire, seules quatre des cinq centrales du pays sont encore en service. Tout cela va dans le sens de la Stratégie énergétique 2050 du Conseil fédéral, qui vise à atteindre la neutralité climatique.

La Suisse a besoin d'énergie nationale

La Suisse a besoin d'énergie nationale.

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Cependant, l’énergie reste consommée en grande partie sous forme de combustibles pétroliers et de carburants (43%). Dès lors, afin d’accélérer la transition et d’envisager un avenir plus vert, il est également impératif de continuer à développer de nouvelles énergies. Pour l’heure, la principale source d’énergie renouvelable produite en Suisse est la force hydraulique (60%), suivie du bois (20%), puis de la valorisation des déchets, de la chaleur ambiante, de l’énergie solaire, des biocarburants, du biogaz et de l’éolien. Ces nouvelles énergies renouvelables gagnent en importance dans les secteurs de l’électricité, du chauffage et des carburants – en ce qui concerne la production d’électricité, les énergies renouvelables atteignent 80%.

D’importants progrès sont en cours dans le photovoltaïque, la géothermie et l’éolien, mais également dans la fusion nucléaire, l’hydrogène propre, les batteries, les carburants de synthèse et dans le secteur du stockage. Les exemples mentionnés dans ce dossier donnent un aperçu des innovations ayant le plus grand potentiel dans notre pays, ainsi que des domaines porteurs et des possibilités de déploiement.

En Suisse et dans le monde

«Smart Energy District»
La HES-SO développe un «Smart Energy District». Il s’agit d’un quartier intelligent pilote équipé d’une plateforme numérique permettant de contrôler des installations électriques. L’objectif est d’étudier et de proposer des solutions viables et fiables aux différents acteurs de l’énergie électrique. Budgété à 1,5 million de francs, le projet a débuté en janvier et devrait s’étendre jusqu’en 2027.

Le thorium, une alternative à l’uranium
Le thorium pourrait être une solution pour répondre à la demande énergétique croissante et atteindre les objectifs climatiques mondiaux. Faiblement radioactifs, ses déchets ont une durée de vie plus courte que ceux de l’uranium. De plus, ce métal est plus répandu et cette filière ne produit pas de plutonium militaire. Toutefois, selon une récente analyse de l’Agence internationale de l’énergie atomique, cette alternative reste encore peu exploitée. A la pointe dans ce domaine, la Chine prévoit de construire un réacteur à haute capacité d’ici à 2030.

Recyclage des batteries, la Suisse est prête
Qu’il s’agisse de conditions-cadres, de processus ou d’entreprises spécialisées, la Suisse est bien pourvue en matière de recyclage des batteries de voitures électriques. Selon une étude récente du TCS, jusqu’à 97% des matériaux actifs, dont le lithium, le nickel et le cobalt, peuvent déjà être réutilisés. Près de 500 000 véhicules hybrides et rechargeables circulent sur les routes suisses. D’ici dix ans, le parc devrait dépasser les deux millions.

Stockage et transport: des enjeux cruciaux

Avec la fermeture programmée des centrales nucléaires en Suisse, il faudra trouver de nouveaux moyens pour produire, mais aussi stocker et transporter l’énergie.

L’une des grandes problématiques des énergies renouvelables est qu’elles sont difficiles à conserver. Il est donc nécessaire de développer des outils de gestion des réseaux, des moyens innovants de stockage ou des matériaux secondaires servant de vecteurs. Pour éviter les complications, ainsi que les coûts économiques, écologiques et énergétiques liés à sa conservation, on privilégie l’électricité lorsqu’elle est produite. Dans un premier temps, il convient d’exploiter au maximum le potentiel hydraulique, ce qui est le cas en Suisse (voir infographie p.26). Selon Oliver Kröcher, professeur adjoint à l’EPFL et responsable du laboratoire pour les vecteurs et processus énergétiques durables à l’Institut Paul Scherrer, on pourrait encore augmenter d’environ 10% cette source d’énergie.

Un autre problème de l’énergie renouvelable est qu’elle est fluctuante, d’où la nécessité de concevoir des systèmes de stockage à court et à long terme. Pour le premier cas de figure, les batteries et le photovoltaïque sont appropriés. A plus longue échéance, différentes pistes peuvent être exploitées. Par exemple, pressuriser de l’air à l’intérieur de cavernes dans les montagnes, stocker en été de la chaleur pour la restituer en hiver et recourir à des vecteurs énergétiques, c’est-à-dire des véhicules ou des méthodes qui permettent de transporter de l’énergie d’un endroit à un autre. Tout l’enjeu consiste à limiter au maximum les pertes qu’impliquent ces processus. «Il n’y a pas d’efficience à 100%, c’est pourquoi tout ce qui peut être électrifié directement devrait l’être», résume le professeur.

Karl Khalil, cofondateur de Divea, Sion (VS): «Nos membranes ont l’épaisseur d’un atome» 

«Notre technologie est en développement à l’EPFL depuis 2016. Aujourd’hui, nous sommes à un stade avancé et espérons pouvoir passer à la phase de commercialisation d’ici trois à cinq ans. Nos membranes en graphène ont l’épaisseur d’un atome et permettent de capturer le CO2 des émissions industrielles. Celui-ci peut ensuite être stocké ou utilisé pour produire du carburant. Notre solution est nouvelle et très poussée: il s’agit de faire des trous dans la membrane de la taille d’une molécule de CO2, afin que seulement celles-ci puissent la traverser et être ensuite récupérées. Il est très motivant de développer un produit qui pourrait avoir une valeur ajoutée pour l’ensemble de l’humanité et lutter ainsi contre le changement climatique. Le potentiel est énorme: au niveau mondial, on parle de centaines de mégatonnes de CO2

Alexandre Laybros, cofondateur de WattAnyWhere, Sion (VS): «Nous venons de lever plus de 2 millions de francs»

«Nous avons conçu un générateur d’électricité qui utilise l’éthanol renouvelable issu de déchets comme porteur d’hydrogène. Le challenge consiste à extraire les atomes d’hydrogène de l’éthanol pour les passer dans une pile à combustible, qui produit l’électricité. De bout en bout, le procédé est électrochimique. Il n’a pas de moteur, ni d’émission polluante. L’idée est de fournir une unité mobile d’apport énergétique complémentaire au photovoltaïque ou à l’éolien, par exemple dans les centres commerciaux et les supermarchés. Actuellement, nous sommes six employés à travailler au sein de notre start-up entre la Suisse et la France. Nous bénéficions de différents soutiens, notamment du canton du Valais, et avons levé ce printemps plus de 2 millions de francs. Nous espérons pouvoir débuter la commercialisation de notre solution à l’horizon 2025-2026.»

Alexandre Laybros

Alexandre Laybros, cofondateur de WattAnyWhere, Sion (VS).

 
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Clara Moldovan, cofondatrice de Swistor, Lausanne (VD): «Une densité de puissance dix fois supérieure à celle des batteries»

«Swistor fournit des dispositifs de stockage d’énergie durables, basés sur des supercondensateurs hybrides. Ils permettent d’obtenir des tensions plus élevées, une densité de puissance dix fois supérieure à celle des batteries et une durée de vie 50 fois plus longue. Nous visons les marchés de l’électronique grand public, des outils électriques et des moniteurs IoT (internet des objets), où nous pouvons apporter des avantages à des applications nécessitant par exemple des pics de puissance élevés ou une charge rapide. En ajoutant notre dispositif à un collecteur d’énergie tel qu’une cellule solaire, nous pouvons alimenter un système portable jusqu’à dix ans sans jamais avoir besoin de changer de batterie. A un stade ultérieur, nous visons des applications de plus grande puissance telles que la stabilisation des réseaux ou des systèmes de mobilité plus efficaces.»

Clara Moldovan

Clara Moldovan, cofondatrice de Swistor, Lausanne (VD).

 
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