Depuis le 1er janvier, où elle s'échangeait à 7,43 livres contre un dollar, la monnaie turque a perdu plus de 49% de sa valeur face au billet vert, dont 30% sur le seul mois de novembre.

Alors que le taux d'inflation a dépassé en novembre les 21% sur un an, le président Recep Tayyip Erdogan a refusé jusqu'à présent de relever les taux d'intérêt et d'infléchir sa politique monétaire.

La Banque centrale turque doit annoncer jeudi son taux directeur.

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Le mois dernier, l'établissement l'avait de nouveau abaissé d'un point (de 16 à 15%) pour la troisième fois en moins de deux mois, à la demande du chef de l'Etat qui argue, à rebours des théories économiques classiques, que les taux élevés favorisent la hausse des prix.

Le président Erdogan, dont la popularité est au plus bas après 19 ans au pouvoir, semble faire le pari de la croissance économique à tout prix en vue de l'élection présidentielle prévue en 2023. Celle-ci a atteint 7,4% sur un an au troisième trimestre.

Mais pour les Turcs, l'effondrement de la monnaie et l'envolée des prix sont devenus insoutenables, le pays étant très dépendant des importations, notamment pour les matières premières et l'énergie.

Cette politique monétaire très critiquée et le manque d'indépendance de la Banque centrale - dont M. Erdogan a limogé trois gouverneurs depuis 2019 - enfoncent la monnaie, mais le président a prévenu fin novembre qu'il continuerait de "résister aux pressions", dénonçant un "complot" visant l'économie turque.

"Mentalité de boutiquier"

"Nous voyons bien le jeu de certains avec le taux de change, les devises, les taux d'intérêt, l'augmentation des prix", lançait-il.

Pour un responsable occidental de haut rang, Recep Tayyip Erdogan est convaincu du bien-fondé de sa politique monétaire et n'entend pas y renoncer.

"Erdogan est en roue libre (...). Il n'y a plus personne autour de lui pour contrer sa conviction fondamentale, qu'elle soit liée à ses principes religieux ou à sa mentalité de boutiquier - ou à une combinaison des deux: il pense sincèrement que cela va fonctionner", a noté ce responsable sous couvert de l'anonymat.

Outre la valse des gouverneurs de la Banque centrale, le président turc a remplacé à trois reprises son ministre des Finances depuis 2018, dont le dernier le 2 décembre, en pleine débâcle.

Plus de 5000 personnes ont manifesté dimanche à Istanbul contre l'inflation et la baisse du pouvoir d'achat, premier grand rassemblement en raison des turbulences traversées par l'économie turque depuis des semaines.