Certains l’appellent «la mutation verte», d’autres «l’économie circulaire». Ce modèle respectueux de l’environnement et de l’humain, encore minoritaire, trace cependant son sillon dans tous les secteurs. On compte aujourd’hui 150 000 places de travail en Suisse liées à la réduction de l’impact polluant des entreprises et des collectivités sur la planète. Ce chiffre devrait doubler rapidement, pour privilégier une orientation «recycle, répare, loue et réduit», au détriment de la traditionnelle logique «extrait, fabrique, utilise et jette». L’enjeu est aussi politique et les élections de cette année seront plus que jamais placées sous le signe du climat.

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Les PME romandes ont compris qu’elles devront tôt ou tard entamer une réflexion sur leur développement durable. Et cela sans tomber dans le «greenwashing», à savoir se parer de vertus écologiques à des fins marketing. Pour les guider, des outils fiables existent, comme le Standard Achats responsables 2018 publié par Suisse Energie, qui donne une vue d’ensemble des potentielles améliorations que l’on peut apporter au quotidien, que l’on soit une collectivité publique ou une entreprise. On y apprend, notamment, que l’eau du robinet est 1000 fois plus écologique que celle en bouteille.

L’utilisation du papier recyclé – trois fois moins gourmande en eau – ou la digitalisation sont également des thèmes abordés. Le tri dans les labels de produits de nettoyage bios met en lumière les supercheries. Autre source utile, Topten.ch classifie selon des critères durables les achats d’appareils électriques, des écrans aux lampes.

Télétravail et «smart metering»

Au chapitre de la mobilité, on le sait, le télétravail et la vidéoconférence ont un impact directement positif sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre, tout comme l’utilisation des véhicules électriques. L’autre proposition, encore balbutiante en Suisse dans les entreprises, est le carsharing. Pourtant, dans l’agriculture, le partage de véhicules spécifiques, sous forme de prêt ou de location, est déjà aujourd’hui monnaie courante.

Le «smart metering» des bâtiments, soit la mesure de manière précise et en temps réel des diverses consommations énergétiques (lire l’article sur ThinkEE), a quant à lui le vent en poupe. A Porrentruy, le monitoring automatisé de l’eau, de la chaleur et de l’électricité de 11 sites communaux a coûté 70 000 francs en 2017, financé à 40% par l’Office fédéral de l’énergie (OFEN). Ce montant sera amorti en six ans grâce aux gains de personnel. Plus de 100 000 kWh d’énergie sont également épargnés par an. Ces développements technologiques visant à réduire sa consommation énergétique créent des emplois dans toute la Suisse romande. Stemys (Porrentruy), Predictive Layer (Rolle), Depsys (Puidoux), Imperix (Sion), Infoteam (Givisiez) ne sont que quelques noms d’une liste qui ne cesse de s’allonger.

Des idées originales

Outre le télétravail et la réduction des voyages d’affaires au profit de la vidéoconférence, certaines PME ne manquent pas d’idées pour réduire leur impact environnemental: commander du mazout vert, offrir des bonus CO2, proposer une cantine avec des produits locaux, utiliser l’application Too Good to Go pour recycler ses invendus alimentaires, abaisser la température des radiateurs de l’entreprise la nuit ou placer les fonds de pension de la société dans une caisse de pension écologique et éthique…

Dans la construction, on travaille à la réaffectation des déchets, avec notamment le récent lancement romand de Madaster Suisse, une plateforme en ligne qui systématise les informations sur les matériaux utilisés dans le bâtiment, soutenue notamment par Losinger Marazzi, Swiss Prime Site, Raiffeisen ou Swiss Re. Enfin, dans l’industrie du luxe, le marché du deuxième main prend de l’ampleur, comme le montre l’exemple de Watchbox implanté en Suisse depuis l’an dernier.

Effet boule de neige

Investir dans le vert, des centaines d’entreprises en Suisse, dont des PME, le font. Elles compensent par exemple leurs émissions de CO2 en finançant des projets de protection du climat proposés par Myclimate. «L’intérêt a augmenté depuis 2015, après les Accords de Paris, relève Kathrin Dellantonio de Myclimate. En ce moment, nous recevons deux à trois demandes d’informations par jour d’entreprises. Une option prise par certaines sociétés est de signaler, sur leur offre-client, la possibilité de compenser l’impact climatique de leurs travaux en soutenant un projet Myclimate. Plusieurs agences de voyages font ça depuis longtemps.»

Respecter les critères des achats responsables devient une exigence pour un nombre grandissant d’appels d’offres.

Olivier Brüggimann, fondateur d’EcoLive

Pour aller plus loin encore, des programmes d’accompagnement avec le WWF et des formations en développement durable fleurissent, tant pour les métiers manuels que pour le management.Citons Sanu, Eqlosion ou EcoLive, qui tendent à repenser les professions et les processus de manière écologique et efficiente. Quant à la question du surcoût lié à une démarche respectueuse de l’environnement, elle est de moins en moins d’actualité: «Cette préoccupation est infondée, relève Olivier Brüggimann, fondateur d’EcoLive. Très souvent, une mesure écologique permet de faire des économies sur le long terme, car on achète des produits qui durent et qui produisent moins de déchets. On n’imagine pas le gaspillage économique découlant de certains processus qui n’ont jamais été changés, comme laisser une machine allumée car on a toujours fait ainsi ou imprimer à triple exemplaire. Par ailleurs, respecter les critères des achats responsables devient une exigence pour de nombreux appels d’offres.»

Des PME créatives

On l’a vu, la thématique verte de réduction des émissions de CO2 ou de protection de la biodiversité rencontre de plus en plus de succès auprès des sociétés de toute taille. Le WWF a récolté 40 millions de francs de dons en 2018, dont une grande partie venant d’entreprises. La structure propose des journées d’actions pour les PME comme pour les privés, telles que la création d’étangs ou l’arrachage de plantes invasives.

Elle travaille aussi à sensibiliser les grandes sociétés à leur impact sur l’environnement. «Notre but est de transformer les marchés, explique Pierrette Rey, porte-parole du WWF pour la Suisse romande. Nous ciblons les grands acteurs d’un secteur, misant sur l’effet boule de neige. Par exemple, avec Coop et Migros, nous leur fixons des objectifs en matière de réduction du CO2 et avons réussi à leur faire retirer de leur assortiment certains poissons et fruits de mer qui font l’objet de surpêche.»

Plusieurs PME et TPE, issues de tous domaines, ont accepté de partager avec PME Magazine leur expérience dans leurs démarches vers la transition climatique. Leur souhait est de montrer que performance et écologie ne sont pas antagonistes et que la croissance existe, mais à un autre rythme. Toutes ont souligné que des contraintes imposées par leur idéal durable les ont forcées à être plus créatives, plus efficientes et plus ouvertes, trois adjectifs définitivement liés à l’esprit d’entreprise.


Soleol:  «6 millions pour notre écoparc»

Soleol a construit en 2016 la plus grande centrale photovoltaïque de Suisse à Onnens (VD). La PME d’Estavayer de 100 collaborateurs met en pratique la durabilité au-delà des projets menés chez les clients. Il y a quatre ans, elle quittait ses bureaux-containers, s’impliquant encore plus dans la transition climatique. Soleol investit 6 millions de francs dans son nouveau bâtiment, donnant l’exemple d’applications énergétiques durables, le tout entouré d’un parc de biodiversité avec ruches et arbres fruitiers.

«Nous avons créé un écoparc qui produit 15 fois plus d’énergie que nous en consommons, générant de l’électricité verte pour 127 ménages dans la région ce mois-ci, par exemple, explique le CEO, Jean-Louis Guillet, qui a fondé Soleol en 2008. Il y a dix ans, il y avait un petit sentiment d’écologie, mais les prix du solaire étaient très dissuasifs et les autorisations complexes. J’ai voulu rendre les installations accessibles, tout en sensibilisant à large échelle.»

Nous produisons 15 fois plus d’énergie que nous en consommons, ce qui permet ce mois de fournir en électricité 127 ménages.»

Après dix ans, la PME affiche 121 millions de francs de chiffre d’affaires cumulé. Elle ouvre ses portes aux politiques, aux entreprises, aux ingénieurs et à plus de 30 classes d’écoliers par an; cela avec la complicité des collaborateurs qui effectuent un tournus pour présenter leur société. «Le climat est un thème très présent actuellement. Cependant, les barrières politiques sont encore vives face aux énergies durables, souvent pour des questions esthétiques, regrette-t-il. C’est paradoxal, mais notre succès vient justement de ces contraintes, qui nous ont poussés à être créatifs.» C’est pour cela notamment que Soleol a développé une éolienne hélicoïdale, pour prouver que l’éolien pouvait être beau.


Faivre énergie:  «80% de notre chiffre d’affaires vient des énergies renouvelables»

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Sébastien Faivre, CEO et petit-fils du fondateur de la PME de Delémont.
© Stéphanie Liphardt

Spécialiste de toutes les formes d’énergies, fossiles ou renouvelables, la société jurassienne Faivre Energie a vu son modèle d’affaires rapidement changer ces cinq dernières années. «Aujourd’hui, 80% de notre chiffre d’affaires se fait avec les énergies renouvelables: pompe à chaleur, solaire et photovoltaïque, observe le CEO, Sébastien Faivre, petit-fils du fondateur de la PME. Mais le parc énergétique en place est encore majoritairement à mazout ou à gaz.»

Dès lors, la transition climatique est-elle un business juteux pour les techniciens en énergie? «On ne peut pas dire ça, mais c’est une transition logique qu’il fallait faire. Financièrement, on ne gagne pas plus en vendant du photovoltaïque qu’en vendant des chaudières à mazout, précise-t-il. De plus, la transition est loin d’être achevée en Suisse. Elle prendra encore une dizaine d’années, jusqu’à ce que tout le parc énergétique avec des installations fossiles soit changé. D’ici là, nous devons investir dans la formation, pour avoir suffisamment de spécialistes du renouvelable, tout en gardant des compétences pour le parc en place.»


Sonatec:  Traitement écologique de l’eau sans chimie

La PME fribourgeoise Sonatec installe un système pour le traitement écologique de l’eau, sans adoucisseur chimique. «Ce système réduit le calcaire en talc, l’eau garde ses propriétés et ne devient pas acide, ce qui évite la rouille du réseau, explique Christophe Imbaud, revendeur Sonatec pour le Jura, Neuchâtel et Bienne. J’étais piscinier et j’ai vu les dégâts des produits classiques sur les conduites d’eau et sur les piscines. J’ai cherché une solution durable et un traitement de l’eau écologique.»

Le fondateur de Sonatec, Gilbert Sonnay, a pourtant dû patienter avant de voir son produit se faire une place dans un secteur très traditionnel. Il compte actuellement douze employés et cinq franchises cantonales. «En 2010, mes parts de marché avoisinaient les 15%, se souvient-il. Aujourd’hui, je dépasse les 30%. Je suis passé de 400 000 francs de chiffre d’affaires à 1,4 million. Par ailleurs, depuis 2018, on voit un changement radical dans les demandes. Avant, elles venaient à 90% de privés. A présent, quatre commandes sur dix viennent de collectivités, d’hôtels, d’institutions, de promoteurs. Il y a une recherche de solutions durables et écologiques. Les esprits sont prêts.»


Label Bleu / Uglyfruits:  «Moins de 7 km de livraison pour 10 000 foyers romands»

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Seul sur le marché il y a dix ans, Michael Dusong doit faire face aujourd’hui à des concurrents qui pratiquent du «greenwashing».
© Label Bleu

Créé il y a dix ans, Label Bleu vend en ligne des paniers de produits locaux, livrés dans 10 000 foyers en Suisse romande. Il travaille avec 150 producteurs, principalement des agriculteurs, mais également des bouchers et des boulangers. Des articles écologiques pour la maison et des cosmétiques complètent la gamme. «En regroupant les livraisons, nous comptabilisons moins de 7 kilomètres par panier, alors que nous sommes présents dans toute la Romandie, explique le fondateur, Michaël Dusong. Nous étudions aussi des pistes avec La Poste, pour nous développer en Suisse alémanique.»

Démarrant Label Bleu en solo, aux côtés d’une dizaine de producteurs, il compte aujourd’hui une trentaine de salariés. «Il y a dix ans, nous étions seuls sur ce marché et c’est parti très fort. J’ai tout de suite dû engager du monde et nous avons triplé notre chiffre d’affaires en cinq ans, relève le patron militant pour une consommation juste. Mais depuis trois ans, on doit lutter avec de nombreux acteurs qui font du «greenwashing», bénéficiant de grosses levées de fonds et acceptant de livrer à perte. Le développement des épiceries coopératives nous prend aussi des clients, même si je trouve cette tendance réjouissante.» Pour se réinventer et promouvoir le zéro déchet, l’entrepreneur a lancé en 2018 la start-up Uglyfruits, qui vend des fruits non calibrés.


L’Aubier: Le premier éco-hôtel de Suisse

Premier éco-hôtel de Suisse, L’Aubier à Neuchâtel n’est qu’un bras de l’entreprise durable démarrée à Montézillon il y a quarante ans autour d’une ferme biodynamique. Il y a eu d’abord le restaurant, qui propose de l’écologie appliquée avec des produits bios, un bâtiment à l’isolation en papier recyclé, qui récupère la chaleur des frigos, l’eau de pluie pour les WC… S’y sont greffés un magasin bio, puis des soins 100% naturels. L’Aubier a fait naître également un café, où l’on torréfie le grain organique chaque lundi, puis un écoquartier autonome énergétiquement, 21 logements construits avec du bois de la région et des crépis naturels. Les formations sur la biodynamie, l’économie associative et les projets ne cessent de fleurir autour des cinq dirigeants pionniers, entourés de 50 collaborateurs et de plus de 700 actionnaires.

«On a fait du crowdfunding avant l’heure, s’amuse Christoph Cordes, l’un des directeurs. Les banques ne nous ont pas suivis à l’époque et, en raison de cette contrainte, nous avons développé un réseau qui nous donne une grande liberté, mais également une responsabilité. Il nous a financés, parce que nous avions un idéal.»

Précurseur en Suisse, L’Aubier a prouvé que croissance et durabilité peuvent aller de pair. «La croissance, c’est aller plus loin, vers quelque chose qui grandit, et c’est complètement naturel, observe Christoph Cordes. Toute la construction de l’hôtel selon nos critères écologiques a été un coût supplémentaire, que nous payons encore aujourd’hui, mais cela fait en même temps partie de qui nous sommes.»


Estoppey-Addor:  «1 million pour créer notre STEP souterraine»

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Sandrine et Cyril Estoppey, frère et sœur, dirigent la PME familiale fondée en 1880.
© Stéphanie Liphardt

La galvanoplastie (traitement de surface, notamment pour l’horlogerie) n’est pas connue pour être une industrie très écologique. Mais chez Estoppey-Addor à Bienne, plus ancienne entreprise de la branche en Suisse (née en 1880), on a voulu faire un grand pas vers l’environnement. En 2008, la PME de 37 collaborateurs décide d’investir plus de 1 million de francs dans la création d’une STEP souterraine. «Jusque-là, nous payions 120 000 francs par an pour nous débarrasser des eaux usées et des boues, mentionne Jan Boesch, membre de la direction et responsable du quality management system. Un camion venait presque une fois par semaine sur notre site pour évacuer les polluants. L’impact était très important, d’autant plus que, avec le développement de la ville, l’entreprise s’est retrouvée dans un quartier mixte avec des habitations. Notre démarche faisait sens, pour des raisons économiques et environnementales.»

Estoppey-Addor, de par son activité, consomme également une grande quantité d’eau pour le rinçage. Celle-ci était rejetée dans le réseau qui devait la purifier. «Grâce à notre STEP, l’eau est traitée chez nous et réinjectée en circuit fermé dans le processus interne. C’est quasi 100% de gain d’eau», poursuit Jan Boesch. Par ailleurs, l’air chaud des deux compresseurs est redirigé à l’aide d’un simple clapet dans les locaux communs de l’entreprise, pour les chauffer lorsque c’est nécessaire.

Actuellement, la PME, qui achète 100% d’énergies vertes, réfléchit à valoriser un toit plat avec des panneaux solaires et à connecter les compresseurs directement avec le chauffage. «Les investissements liés à la STEP étaient importants et ne sont pas encore complètement remboursés, relève le dirigeant. Mais c’est une valorisation de notre outil de travail et ils ont un impact sur notre environnement.»


Gobet-Rutschi: Des encres et des supports publicitaires recyclables

Il y a deux ans, le réalisateur publicitaire Gobet-Rutschi changeait intégralement son parc d’impression pour passer à des solutions latex sans solvant et des encres écologiques. Auparavant, la PME de Vernier de 19 collaborateurs avait déjà orienté une partie de sa production vers des supports recyclables. Elle est d’ailleurs à l’origine du premier tram de Suisse recouvert d’autocollants sans PVC et recyclables, en 2015, pour une campagne de Swiss à Genève. «Le bilan carbone dans le secteur aérien est mauvais et c’est pour Swiss un impératif d’avoir des affichages avec une empreinte écologique quasi nulle», explique le CEO Eric Christinger. Aujourd’hui, Gobet-Rutschi recouvre de publicité «propre» également les trams zurichois.

«Nous n’avons pas véritablement observé d’augmentation de la clientèle mais surtout consolidé celle-ci, notamment avec des sociétés pour qui l’environnemental est essentiel. Le surcoût de ce type de produit existe, mais il est dilué en raison de la longévité supérieure des impressions. De toute manière, nos clients n’ont plus que le choix de l’écologie.»


Ecovisuel:  Communiquer de manière responsable

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Chez Ecovisuel, tout est pensé pour réduire l’impact environnemental.
© DR

La société genevoise Ecovisuel, fondée en 2010, pousse la démarche jusqu’à calculer le bilan carbone de ses collaborateurs. Outre l’utilisation des encres vertes, des papiers à base de déchets de l’industrie ou d’algues, l’agence de communication responsable, qui crée des campagnes web ou papier, refuse également les clients dont le corps de métier ne serait pas en accord avec la notion de durabilité, tels les énergies fossiles, la chimie ou le tabac.

«Le fonctionnement de notre agence est compensé au niveau carbone, explique le cofondateur Bruno Mottini. Notre impact CO2 pour 2018 est de 20,5 tonnes, pour l’équivalent de cinq pleins-temps. Pour compenser ces émissions, nous investissons dans des projets Myclimate. Nous subventionnons des bus électriques en Suisse, la plantation d’arbres dans le Jura ou encore des fours publics à base d’excréments en Inde.» La TPE dépense près de 4000 francs par an auprès de Myclimate, association de protection du climat créée par l’EPFZ.

Chez Ecovisuel, tout est pensé pour réduire l’impact environnemental: serveur à l’énergie solaire, télétravail, mutualisation des dépenses… «Nos clients sont à 80% des PME qui sont de plus en plus sensibles à notre démarche, même celles pour qui l’environnement n’est pas le core business.»


E-Energy Lab:  Valorisation des résidus de l’agroalimentaire

Start-up implantée à Avenches, à quelques minutes du géant Nespresso, E-Energy Lab valorise les résidus de l’industrie agroalimentaire ou de l’agriculture traditionnelle. «Notre démarche est de mettre en place une chaîne de production suivant les principes de l’économie circulaire, de manière à ce qu’il n’y ait plus de résidus, explique Steve Monnet, directeur opérationnel d’E-Energy Lab. Chaque étape doit être valorisée avec l’idée de générer des produits tels que des fertilisants ou des molécules spécifiques pour l’industrie.» Issu de la pétrochimie, le Broyard applique des procédés de la chimie lourde ou de la pharma pour développer un modèle disruptif entre la greentech et l’agronomie.

«C’est un modèle complètement novateur, encore partiellement confidentiel», souligne l’administrateur, qui parle d’une première levée de fonds de 4 millions de francs par des investisseurs privés suisses misant sur l’économie circulaire. La première unité de production devrait être opérationnelle cette année.


Vélocité: «Transporter des lettres dans un camion ne fait pas sens»

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Depuis vingt ans, les coursiers de Vélocité sillonnent les rues de plusieurs villes romandes.
© DR

Née à Lausanne il y a vingt ans, Vélocité, la société qui livre colis et documents à vélo, compte 40 coursiers à Lausanne, Yverdon et Neuchâtel, pour l’équivalent de 17 pleins-temps. A cela s’ajoutent deux franchises à Sion et sur la Riviera et des mollets bien musclés. «Vélocité a commencé avec quelques cyclistes munis d’un ordinateur et d’un vélo. Aujourd’hui, nous arrivons à faire vivre une vingtaine d’employés et dégageons pour la Sàrl 1,5 million de chiffre d’affaires, note le codirecteur, Raoul Payot, qui pédale comme les autres. Nous sommes en croissance, pas énorme, mais toujours là.»

La structure n’a pas noté d’évolution récente des demandes par souci environnemental. L’entreprise mise sur le vélo par conviction écologique, mais surtout par recherche d’efficience. «Dans 90% des cas, les clients nous contactent car nous sommes plus efficaces qu’un transporteur en voiture dans des villes congestionnées. Véhiculer lettres et petits colis dans un camion ne fait pas sens, lance-t-il. La rapidité de notre service est l’argument, plus que la question du CO2.» Vélocité est très demandée pour les envois urgents d’analyses et de médicaments.


Quand rendement et durabilité vont de pair

Fonds de pension, placements, «impact investing», les investissements durables prennent de l’ampleur.

Les chiffres sont là. Le volume investi dans les fonds durables par les caisses de pension a doublé l’an dernier. Investir les fonds de pension de ses employés dans une caisse écologique n’est pas un réflexe pour les PME, mais cela pourrait le devenir. Nest, septième caisse de pension en Suisse en termes de taille, avec 2,7 milliards de francs sous gestion en 2018 et un nombre d’affiliés en augmentation, a toujours eu une vocation écologique et éthique. Depuis 2006, son rendement annuel moyen est de 3,9%, ce qui est sensiblement supérieur à l’indice CS des caisses de pension, qui est à 2,8%.

Précurseur également, la CPEG est devenue en 2018 le premier fonds de pension suisse à rejoindre le plus grand groupe européen d’investisseurs institutionnels, l’IIGCC, engagé dans la lutte contre le changement climatique. Une reconnaissance qui n’est qu’une étape. «Nous sommes en train d’étudier la question des obligations vertes, mentionne Christophe Decor, directeur général de la CPEG. D’autre part, la caisse poursuit l’amélioration de la performance énergétique de son parc immobilier.» La CPEG a notamment reçu le Watt d’or 2018 pour un projet de chaufferies efficientes en partenariat avec les Services industriels de Genève.

Swiss Sustainable Finance suit également avec enthousiasme la courbe du développement durable. Là aussi, les capitaux ont bondi en Suisse, pour s’établir à 390,6 millions de francs en 2017, contre 33 millions dix ans plus tôt. Une croissance qui n’a pas échappé à Inrate, qui note les sociétés cotées en bourse selon les critères ESG (environnement, social et gouvernance). Elle conseille également des investisseurs privés ou publics dans leurs placements durables. «La question du rendement financier de ce type d’actifs n’est presque plus un thème dans notre clientèle, constate Eric de La Chauvinière, responsable Inrate à Genève. Près de 90% des études ont montré que la performance des investissements durables était similaire et parfois meilleure que celle des placements traditionnels.»

Il signale par ailleurs l’intérêt croissant pour les green bonds (ou obligations vertes), en raison des changements législatifs en cours sur la transition climatique. Les entreprises de plus de 500 millions de chiffre d’affaires doivent accompagner leur rapport financier du rapport ESG. Par glissement, acheter des green bonds permet d’optimiser son bilan «climatique». Une pratique controversée.

Enfin, l’«impact investing» (investissement à impact social) séduit également. Spécialiste du domaine, Quadia finance près de 40 entreprises engagées dans une démarche de durabilité forte. Depuis sa fondation en 2010, la société genevoise a investi 180 millions de francs. «Les 17 objectifs de développement durable de l’Agenda 2030 sont devenus clairement une grille de lecture pour les investisseurs», mentionne Astadjam Bamanga, responsable communication chez Quadia. Les banques privées s’intéressent de plus en plus à ce modèle d’«impact investing», qui fait de l’investisseur un acteur engagé.»

Quadia travaille avec des entreprises déjà sur le marché et promeut une économie régénératrice. «Nous n’investissons pas dans des start-up, mais dans des PME profitables entrant dans une économie circulaire», précise-t-elle. Sur 1000 demandes de sociétés souhaitant rejoindre leur portfolio, Quadia en évalue 200 et une dizaine sont financées.