Le darwinisme, théorie de la sélection compétitive des espèces, sévit aussi dans l’univers financier. En effet, les conditions-cadres de la gestion de fortune sont traversées depuis quelques années par des mutations structurelles profondes: développements technologiques, évolutions des réglementations, standardisation des processus de conseil et protection de l’investisseur. Autrefois laissée à la libre et décentralisée appréciation des gérants, la gestion devient industrielle et scientifique. Est-ce à dire que la gestion passive, indicielle, purement robotisée va tout envahir? Au contraire, nous constatons que la gestion active, opérée par mandat discrétionnaire, sort distinctement renforcée du palier actuel d’évolution.

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Avant de développer cette thèse, fixons les contours des concepts de «mandat discrétionnaire» et de «gestion active».

La gestion discrétionnaire

La gestion discrétionnaire, ou déléguée, consiste à confier à une équipe experte spécialisée son portefeuille de titres. Ce mandat donne ainsi ordre au gérant de prendre toutes les dispositions permettant de préserver au mieux le capital confié et de rechercher le meilleur rendement pour celui-ci. Le corpus d’instructions du mandat précisera au minimum les objectifs généraux du placement, le budget de risque, les exclusions éventuelles, les préférences géopolitiques, les orientations ESG (environnement, social, gouvernance).

La gestion active

Au travers du mandat discrétionnaire, on peut ordonner une gestion active ou une gestion passive. La première est libre et vise à dégager une performance supérieure à l’indice de référence en sélectionnant les meilleures valeurs potentielles et en excluant les autres. La seconde réplique l’indice choisi et par conséquent fournit précisément la performance de celui-ci, positive ou négative. Ces deux approches sont antinomiques.

L’évolution réglementaire: effets structurants

En matière d’investissement privé, les nouvelles règles (LSFin en Suisse et MiFID en Europe) entendent mieux protéger l’investisseur contre le mauvais conseil ou les produits toxiques. A tel point que le conseil personnalisé et informel est proscrit à la faveur de procédures mécanistes. Dans ce contexte contraignant, gérants et clients se doivent de clarifier leurs rapports et leurs modes de fonctionnement. Le mandat discrétionnaire, canal bien structuré des relations entre investisseur et mandataire, se trouve ainsi de facto plébiscité par l’évolution réglementaire.

Est-ce à dire que la gestion passive, purement robotisée, va tout envahir?

Le briefing initial est, dans ce type de gestion, fondamental. Ainsi, la pression réglementaire opère une césure limpide entre gestion déléguée par mandat, d’une part, et transactions effectuées en toute autonomie et sans conseil préalable par l’investisseur (execution only), d’autre part. Ce faisant, elle condamne la gestion «paritaire» axée sur le binôme: conseil ponctuel du gérant et pilotage des ordres par le client investisseur. Cette forme de cogestion n’était pas durable compte tenu de la confusion des périmètres de responsabilités.

Les brusques changements de conditions-cadres obligent les banques qui pratiquent la gestion de fortune privée à clarifier les rôles. La gestion déléguée par mandat offre une solution simple et transparente. Elle engage la responsabilité de la banque qui doit mettre une chaîne de traitement extrêmement fiable en place. L’investisseur doit de son côté apporter de la valeur dans son champ de responsabilité en définissant le cadre stratégique du mandat.

La gestion active constitue à nos yeux «la moins mauvaise approche». Elle permet une sélectivité et un filtrage, tant sur les paramètres financiers classiques que sur d’autres critères qualitatifs, comme les paramètres ESG. Les progrès algorithmiques et certaines découvertes des fintechs sont déjà intégrés dans les salles blanches et «isonormées» de la gestion active centralisée. Le mandat de gestion active est donc plus sophistiqué et potentiellement plus performant que la gestion robotisée passive ou le conseil ponctuel.

Exergues:

- «La gestion active constitue à nos yeux la ‘moins mauvaise approche’.»

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