Avec la fin de la pause estivale, c’est le retour des questionnements pour l’ensemble de la prévoyance suisse, qui vit des bouleversements importants. Il y a déjà presque un an, le peuple refusait en effet le paquet de réformes Prévoyance 2020, laissant présager les difficultés quant à l’avenir du système des trois piliers. Mais, et il faut s’en réjouir, l’opposition du peuple à ce projet ne signifie pourtant pas que rien ne se passe dans le monde de la prévoyance. Quelles sont alors les nouveautés à ne pas négliger?

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Pasquale Zarra, directeur de PensExpert à Lausanne, nous livre un petit récapitulatif pour bien démarrer la rentrée. «Le refus de Prévoyance 2020 a eu des répercussions sur une prestation très appréciée des patrons de PME: l’assurance complète. Il faut savoir que les avoirs de prévoyance sont garantis en tout temps par les assureurs vie, quelle que soit la conjoncture. Or, Axa Suisse est le premier acteur à avoir abandonné cette solution, en misant sur un modèle semi-autonome, dans lequel le risque et les opportunités sont assumés par l’entreprise. Il est à craindre que d’autres suivent. Les restrictions légales sur les garanties du capital (LPP obligatoire) pour les assureurs vie ainsi que le niveau encore et toujours trop élevé du taux de conversion (6,8%) rendent en effet l’assurance complète beaucoup moins rentable.»

Selon l’expert, la balle est dans le camp des responsables politiques. «A eux d’imposer leur leadership sur ce sujet!» Pour bien comprendre le phénomène, il faut se rappeler que, jusqu’à il y a peu, les institutions de prévoyance avaient l’obligation légale de garantir les avoirs de l’ensemble de leurs employés, quel que soit leur revenu. En cas de départ de la caisse de pension, ces derniers ont ainsi la certitude de toucher au minimum le montant du capital constitué, plus les intérêts. Mais il y a le revers de la médaille: les opportunités de profits sont limitées et les rendements sont répartis collectivement. Une modification de la loi sur le libre passage supprime désormais cette obligation de garantie pour les revenus situés dans la partie surobligatoire de la prévoyance, au-delà de 126 900 francs.

Placer une partie de son 2e pilier dans les fonds hypothécaires est une réelle alternative.

«En échange, l’employeur propose à son personnel concerné jusqu’à dix stratégies de placement, dont une à faible risque. Si le risque incombe directement à l’assuré, ce dernier choisit librement sa stratégie et bénéficie de la totalité des rendements. Et lorsqu’il quitte sa caisse, il touche son avoir augmenté des gains obtenus sur les marchés. Il gère ainsi son 2e pilier dans un esprit d’entreprise, à la manière du private banking, tout en bénéficiant d’une plus grande transparence», poursuit Pasquale Zarra.

Nouveau type de fondation en 2019

Cerise sur le gâteau: pour une entreprise soumise aux standards internationaux (IAS 19), proposer un tel plan (appelé «plan 1e») se répercute positivement sur le bilan. Comme l’employé affilié investit personnellement ses avoirs, l’employeur peut en effet réduire une grande part de ses engagements financiers. Mais quid des salaires moins élevés? De plus en plus d’assurés souhaitent co-décider de la stratégie de placement déjà à partir du salaire maximum LPP, à savoir 84 600 francs. Pour ces derniers, un nouveau type de fondation verra le jour début 2019. Bien que le choix de la stratégie soit pris collectivement par le comité de caisse, les salariés affiliés à cette fondation bénéficieront d’une plus grande variété d’investissements et, surtout, ne seront pas affectés par les restrictions sur les rachats imposés par l’OFAS pour les salaires de plus de 126 900 francs. Cette nouveauté profitera en particulier aux indépendants (avec leurs employés) et aux contrats ayant peu d’assurés, tels que les cabinets de médecins ou d’avocats, par exemple.

Hub romand de la prévoyance

En outre, le marché romand connaît ces derniers mois d’intéressantes initiatives de la part d’importants acteurs locaux. La banque Vontobel, alliée notamment au courtier CGA, propose par exemple un nouveau concept de gestion qui va faire parler de lui à la rentrée auprès des PME. Autre mouvement très récent, celui effectué par les banques Gonet et Mirabaud ainsi que par la société Plurigestion. Celles-ci viennent de lancer une plateforme de prévoyance innovante qui consiste à proposer une sorte de hub romand de la prévoyance.

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Pasquale Zarra, directeur de PensExpert

© D.Felder

La création de deux fondations, la Fondation romande en faveur de la prévoyance individuelle liée (FRPI) et la Fondation Lemania de libre passage (FLLP), qui se rapprochent de la Fondation pour cadres et dirigeants d’entreprises, est à la base du mouvement, comme l’a expliqué au journal Le Temps Alexandre Michellod, président des deux nouvelles fondations et ancien responsable de la prévoyance auprès du groupe Edmond de Rothschild à Genève. «Les assurés aspirent aujourd’hui à intervenir activement dans la gestion de leur épargne de prévoyance, alors qu’une pression générale se fait à la baisse, au sein des caisses de pension, sur le taux d’escompte permettant de calculer les capitaux de prévoyance et les provisions techniques.» Un plan appelé «1e» permet donc ici aussi aux assurés d’influencer leur stratégie de placement, à condition d’avoir un salaire supérieur à 126 900 francs (soit 1,5 fois le salaire maximum LPP).

«La proximité est l’une de nos valeurs cardinales. Elle fait la différence en termes de confiance et de niveau de service», a déclaré Alexandre Michellod avant de parler d’avenir: «D’autres partenaires devraient prochainement rejoindre les deux instituts, attirés par l’idée d’un rassemblement des forces romandes et une réponse aux besoins du marché. Ces dernières années, aucune initiative n’a été prise depuis la Suisse romande pour la mise en place d’un tel hub réunissant véritablement la diversité des prestataires de prévoyance issus de la région lémanique. Le momentum est désormais tout à fait unique dans le contexte conjoncturel actuel des taux bas et de l’incertitude relative au «dossier» du 2e pilier.»

Plus de 1 milliard d’actifs

Forts de leur ancrage et de leur réputation, les initiants ont l’ambition de devenir la plateforme leader en la matière sur le marché romand, avec la volonté de pouvoir à moyen terme occuper une place de choix au niveau national. A l’horizon 2026, l’objectif est de réunir sous le contrôle et la supervision de la plateforme plus de 1 milliard de francs d’actifs, est-il expliqué.

Enfin, le directeur de PensExpert, Pasquale Zarra, nous décrit une dernière nouveauté lancée sur le marché. «Les fonds hypothécaires confirment leur attractivité. Placer une partie de son 2e pilier dans ce type de fonds est une réelle alternative aux liquidités. Les intérêts de la dette sont attribués au capital de prévoyance et sont déductibles du revenu imposable. On le voit, les solutions qui offrent liberté et responsabilité individuelle à l’assuré ont le vent en poupe. Tandis que le ratio actifs/retraités est en chute libre, elles renforcent le système des trois piliers. Qu’attendent donc les politiques pour mieux les promouvoir?»

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