Avec le private equity, on peut devenir extrêmement fortuné, à la seule condition d’être déjà très riche. C’était du moins le cas par le passé. Pour investir dans des entreprises ou des projets d’infrastructure hors bourses, il fallait dépenser des millions. Pour de nombreuses caisses de pension, assurances, universités américaines, family offices et autres grandes fortunes, les marchés privés ont été de véritables mines d’or au cours des dernières décennies, avec des rendements dont les actionnaires ne pouvaient que rêver. Aujourd’hui, même les investisseurs au portefeuille plus modeste ont accès à cette classe d’actifs prometteuse.

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Les investisseurs privés sont appelés à devenir le nouveau moteur de croissance des sociétés de capital-investissement. Au début de l’année, Blackstone, le plus grand acteur et pionnier du marché, a collecté 1,3 milliard de dollars pour un nouveau fonds destiné aux clients privés aisés, mais pas super-riches. Les sociétés de private equity font désormais la queue auprès des banques pour vendre leurs fonds à de grands groupes d’investisseurs privés via leurs réseaux de distribution. «C’est une évolution remarquable», déclare Julien Zornig, qui a créé il y a douze ans à Hambourg le fonds de fonds de private equity Astorius, afin de rendre ce segment accessible aux investisseurs qui ne dépassent pas le million.

Introductions en bourse en forte baisse

Aucune autre classe d’actifs n’est aussi présente que les actions, mais de plus en plus de création de valeur se fait en dehors du monde coté en bourse. L’importance des marchés privés a augmenté de manière significative par rapport aux places de négoce publiques. «Private is the new public», résume le patron d’Astorius. Le nombre d’introductions en bourse a diminué, auxquelles se sont ajoutées les radiations. Aux Etats-Unis, environ 4500 entreprises sont encore cotées en bourse aujourd’hui, contre 8000 au milieu des années 1990.

En Allemagne aussi, le nombre d’entreprises cotées a diminué de moitié au cours des deux dernières décennies. «En tant qu’actionnaire, on n’a plus accès qu’à des groupes de plusieurs milliards agissant à l’échelle mondiale, explique Julien Zornig. Si l’on veut investir de manière entrepreneuriale, on ne peut pas éviter le private equity.»

A cela s’ajoute le fait que les entreprises restent aujourd’hui privées plus longtemps qu’il y a vingt ans. Une grande partie de la plus-value se produit dans les années qui précèdent l’introduction en bourse. Lors de l’entrée en bourse, les valorisations sont parfois déjà gigantesques, ce qui rend le potentiel de cours encore plus maigre. Et tandis que les marchés publics se rétrécissent, le private equity est devenu l’une des classes d’actifs à la croissance la plus rapide. Entre 2015 et 2023, le capital géré en private equity dans le monde est passé de 2,6 à plus de 13 billions de dollars. Le segment est devenu plus mature et plus transparent, son image s’est améliorée.

Grandes différences de performance

Les variations de performance sont énormes pour les fonds de private equity. Les rendements des différents véhicules varient entre 2 et plus de 20%. Pour le capital-risque, des rendements négatifs sont également à l’ordre du jour. Point important: habituellement, dans le secteur du private equity, on publie le rendement du capital investi. Mais ce chiffre n’est guère significatif si le capital non investi est très élevé. C’est le cas actuellement. Les fonds de private equity du monde entier détiennent plus de 1,5 billion de dollars qui ne sont pas investis et traînent de manière improductive. Le choix du meilleur fonds est donc tout à fait crucial. «La première chose à faire pour les investisseurs est de vérifier si le fonds a été l’un des plus performants pendant de nombreuses années», recommande l’experte en investissement Nannette Hechler-Fayd’herbe.

Début août, le «flash crash» sur les marchés boursiers a réveillé de nombreux investisseurs et leur a rappelé l’importance de la diversification des portefeuilles. Les actifs privés s’y prêtent très bien, car il s’agit d’une autre classe d’actifs que les actions ou les obligations cotées en bourse. L’ajout de private equity au portefeuille peut donc réduire le risque et augmenter le rendement. Maurice Pedergnana, directeur de l’association sectorielle Seca, estime qu’un rendement excédentaire de 3 à 5% par an par rapport au marché des actions est réalisable à long terme.

Pictet faire figure de pionnière en Suisse

Comme les grandes entreprises de private equity (CVC, KKR ou EQT) ne vendent pas elles-mêmes leurs fonds aux investisseurs privés, elles cherchent des banques en tant que partenaires de distribution. Selon Nannette Hechler-Fayd’herbe, responsable de la stratégie d’investissement, de la durabilité et de la recherche chez Lombard Odier, ces dernières jouent donc un rôle important dans la démocratisation du private equity: «Elles peuvent regrouper les actifs des investisseurs privés et ainsi abaisser les barrières à l’entrée.» Certaines banques agissent en outre comme cogestionnaires des sociétés de private equity.

En Suisse, la banque privée genevoise Pictet fait figure de pionnière dans le domaine des placements sur le marché privé. Dès les années 1890, le banquier Ernest Pictet a acheté des exploitations agricoles en difficulté en Toscane, les a modernisées et a vendu les entreprises florissantes. Une forme précoce de private equity. Les stratégies ont été affinées au fil des années et Pictet est devenue la première banque européenne à proposer à ses clients des investissements en private equity.

L’engagement précoce des partenaires, qui ont investi leurs capitaux privés dans des start-up alors totalement inconnues il y a trente ans, a également constitué une base. Aujourd’hui, c’est toute une unité d’affaires, dirigée par Elif Aktug, associée de Pictet, qui s’occupe des placements alternatifs avec quelque 200 collaborateurs. Les montants minimaux d’investissement ne sont toutefois pas à la portée des petites bourses. Certains fonds requièrent des montants à six chiffres et la capacité de risque correspondante doit être remplie.

Train en marche

UBS propose également à ses clients plus de 20 offres de marchés privés ouverts dans différentes stratégies partielles et régions. Il est possible d’investir dans des fonds ouverts à partir de 10 000 francs, alors que pour les fonds fermés le montant minimum d’investissement est nettement plus élevé, à savoir 130 000 francs. Pour ces produits spécialement conçus pour les investisseurs privés, la complexité concernant les appels et les distributions de capitaux a été éliminée.

Depuis dix ans, Julius Baer propose à ses clients une série de véhicules d’investissement pour les placements sur le marché privé, notamment des fonds dits «nourriciers», une sorte de fonds de fonds qui regroupe le capital de plusieurs investisseurs, ainsi que des co-investissements et des solutions de placement sur mesure. Il y a quelques années, un programme Vintage a également été lancé, composé de huit à dix fonds de private equity qui investissent dans des entreprises de petite à moyenne taille. Tous ces produits s’adressent à des investisseurs ayant le statut de «Professional Investor», parmi lesquels figurent non seulement des investisseurs institutionnels mais aussi des clients privés fortunés.

Cette année, Vontobel a également pris le train du private equity en marche et offre à ses clients l’accès à différentes stratégies de private markets par le biais de fonds dits «evergreen». Ces fonds regroupent les investissements d’un grand groupe d’investisseurs. L’investissement minimum est de 25 000 dollars et n’est ouvert qu’aux investisseurs qualifiés. Pour leur part, les plateformes d’investissement numériques spécialisées dans le private equity offrent un autre accès. Des entreprises comme iAccess Partners, Stableton, Liquid ou Moonfare regroupent le capital des investisseurs et sélectionnent le portefeuille de base. Les investisseurs peuvent y entrer avec seulement 1000 francs.