Bénéficier d’équipes productives et en bonne santé constitue, pour chaque entreprise, le prérequis indispensable pour un développement sain et durable. En Suisse, les statistiques révèlent pourtant que, en moyenne, chaque employé est absent plus d’une semaine par année pour cause de maladie ou d’accident. «On estime qu’environ neuf personnes sur dix ont mal quelque part chaque année. Et un quart d’entre elles sont empêchées de travailler correctement en raison de ces douleurs», ajoute Olivier Girard, ingénieur en mécanique et ergonome.
Les pathologies récurrentes
Pour faire face à cette problématique, le Groupe Mutuel a mis en place CorporateCare, un programme ciblé de prévention et de promotion de la santé au travail. Son objectif: une baisse sensible et durable des cas de maladie et d’accident dans les entreprises suisses. Toutes les sociétés, du grand groupe à la petite entreprise, peuvent en bénéficier. Parmi les affections recensées par l’assureur basé à Martigny, les troubles musculosquelettiques (TMS) et les problèmes psychologiques (dépression, stress, etc.) sont les plus récurrents. «Elles représentent environ 60% du volume des prestations remboursées», souligne Nicolas Caloz, responsable du programme CorporateCare au Groupe Mutuel.
Si les maladies psychologiques sont en augmentation depuis dix ans, les TMS restent encore la cause principale des absences de longue durée. «Environ 40 à 45% de l’absentéisme en entreprise serait lié à des douleurs de l’appareil locomoteur», confirme Olivier Girard. En 2020, la Ligue suisse contre le rhumatisme a publié une grande étude sur les douleurs dorsales dans la population helvétique. Selon l’organisation, ces douleurs «atteignent des proportions épidémiques». Ainsi, «alors qu’il y a neuf ans 39% des personnes interrogées déclaraient souffrir de maux de dos plusieurs fois par semaine ou par mois, ce chiffre est passé à 50% en 2020.» L’augmentation est encore plus marquée chez les 16-29 ans. L’étude souligne également qu’«une personne interrogée sur quatre souffre de maux de dos dans l’exercice de son activité professionnelle». Et ceci n’est pas sans conséquences sur la productivité, les douleurs dorsales minant celle-ci «à raison de 4939 francs par personne et par an», estime la Ligue suisse contre le rhumatisme.
Le présentéisme, un fléau
Un autre résultat de cette enquête est particulièrement préoccupant: la majorité des personnes interrogées ne reconnaît pas les signaux d’alerte et ne réagit pas quand il serait temps de consulter un médecin. Selon plusieurs études, en Suisse, les personnes actives travaillent en moyenne quatre jours par an en étant malades et alors même qu’elles devraient prendre un congé maladie. «Ce phénomène pourrait s’expliquer par le fait que, sous la pression de leur entourage ou par peur de perdre leur emploi, certaines personnes se rendent au travail malgré le fait qu’elles se sentent malades», indiquent les auteurs du rapport. Ce «présentéisme», difficile à quantifier avec précision, est jugé «extrêmement dangereux» par l’ergonome Olivier Girard, car il peut conduire, en plus d’une perte d’efficience professionnelle, à des absences de plus longue durée encore.
Afin de lutter contre ces problématiques, le Groupe Mutuel a développé un accompagnement en trois volets adaptés aux spécificités de chaque entreprise. La première étape consiste à favoriser la mise en place d’une meilleure gestion des incapacités de travail. L’assureur met à disposition une large palette d’outils pour piloter de manière efficace et rapide les annonces d’incapacité de travail. Cette démarche garantit un suivi individuel des cas annoncés, grâce à l’expertise de médecins-conseils, case managers, inspecteurs des sinistres, spécialistes de la lutte contre la fraude, médiateurs et même sages-femmes (pour permettre de conjuguer de manière harmonieuse grossesse et travail).
L'humain au centre
Les situations complexes font l’objet d’un suivi spécifique et d’une coordination avec les institutions impliquées (AI, assurance chômage, caisse de pension, etc.). «Notre ambition est d’accompagner les collaborateurs absents, mais aussi d’être proches de l’entreprise pour l’aider à gérer au mieux l’absentéisme», souligne Nicolas Caloz. Une formation sur la «présence performante» est d’ailleurs dispensée aux cadres à cette fin. Les spécialistes chargés de la gestion de la santé au travail au Groupe Mutuel réalisent également des analyses détaillées (reporting et bilans complets de situation) permettant de cibler les causes de l’absentéisme. Une étape indispensable pour choisir les mesures pertinentes et ciblées pour y remédier.
Afin de mieux diagnostiquer le fléau que représente le stress au travail, en détecter les causes et pouvoir les éliminer pour mieux guérir, les spécialistes du Groupe Mutuel utilisent un outil performant: le Job Stress Analysis. Ce dernier est basé sur le Job Stress Index développé par Promotion Santé Suisse, l’Université de Berne et la HES des sciences appliquées de Zurich. Il s’agit d’un indice de stress des citoyens actifs du pays, selon le rapport contraintes/ressources qui rythme leur quotidien professionnel. En 2018, près d’un quart des travailleurs suisses ont subi un stress significatif au quotidien. Outre les absences à répétition ou de longue durée, le manque de productivité induit par le stress représente une perte annuelle de près de 6,5 milliards de francs.
Des solutions ergonomiques sur mesure
Le Groupe Mutuel collabore également avec l’ergonome Olivier Girard pour dépister et prévenir les TMS. Mauvaise position prolongée, micro-gestes répétitifs et manque de mouvement mettent en effet le corps à rude épreuve et sont responsables de sérieux problèmes de santé. L’ergonome a élaboré un sondage ciblé permettant de dresser un état des lieux des douleurs corporelles chez les collaborateurs. Il sert également de base pour résoudre les problèmes identifiés et suivre l’évolution des mesures mises en place. «Mon objectif est d’aider les employés à développer des habitudes saines, et d’accompagner les entreprises dans l’amélioration des conditions de travail et la définition de leur politique de santé interne», explique l’ergonome.
La PME genevoise Agenhor, spécialisée dans le développement de solutions mécaniques horlogères, a récemment entrepris une telle démarche. «Nous venions d’emménager dans un nouvel espace de travail, et il nous a semblé pertinent de faire un point sur l’ergonomie, d’autant que nous avons des horlogers qui travaillent toute la journée sur leur établi», avance Nicolas Wiederrecht, son directeur. Il est prévu que l’ergonome Olivier Girard passe une journée dans l’entreprise afin d’indiquer quelles sont les meilleures postures et pratiques à adopter pour prévenir les maux. «Nous verrons dans quelle mesure il faudra adapter les outils de productions (chaises, bureaux, etc.). Mais beaucoup de mauvaises habitudes posturales peuvent déjà être corrigées à moindre coût, avec du bon sens et une information adéquate», glisse Nicolas Wiederrecht.
Bureau de marche
Les spécialistes recommandent également de pratiquer une activité physique régulière. Dans le cadre du CorporateCare, le Groupe Mutuel met donc à disposition un bureau de marche aux entreprises désireuses de faire «bouger» leurs employés. Il s’agit d’une place de travail haute, devant laquelle on place un tapis de marche. Le collaborateur peut ainsi quitter sa chaise durant un temps et mettre tout son corps en mouvement sans empiéter sur son emploi du temps.
A l’avenir, le Groupe Mutuel souhaite développer encore ses outils de prévention de la santé au travail. «Notre ambition est de fournir des clés aux cadres pour reconnaître les situations susceptibles de se transformer en incapacité de travail, et ainsi d’être dans l’anticipation des problèmes plutôt que de les traiter une fois qu’ils sont survenus», détaille Nicolas Caloz. L’assureur travaille sur la mise en place d’une formation pour mieux gérer les situations conflictuelles, avec un service de médiation ou de coaching pour les personnes concernées.