"En 2021, plusieurs développements ont montré clairement que cette industrie n'a pas d'avenir", se réjouit Romain Ioualalen, de l'ONG Oil Change International.

L'Agence internationale de l'énergie (AIE) a publié au printemps un rapport choc préconisant l'arrêt immédiat de tout nouvel investissement dans des ressources fossiles. Une révolution de la part d'une institution fondée en plein choc pétrolier, dans les années 1970, pour alors garantir la sécurité énergétique de pays riches.

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Autre moment marquant cette année, la COP26 de l'ONU sur le climat à Glasgow, au cours de laquelle une coalition de pays - sans grand producteur toutefois - s'est engagée à sortir des énergies fossiles.

Ces dernières, qui représentent 80% de l'énergie aujourd'hui consommée, ont été explicitement désignées responsables du changement climatique à la COP, ce qui n'était pas le cas à l'époque de l'Accord de Paris en 2015.

"Il n'est plus tabou de parler de la fin de l'extraction des hydrocarbures lors des réunions internationales sur le climat", souligne Romain Ioualalen.

Plus récemment encore, les défenseurs de l'environnement ont remporté une victoire symbolique: le développement du champ pétrolier Cambo, au large de l'Écosse, a été suspendu après le retrait du géant Shell.

"Dépendance"

"On savait depuis plusieurs années que la fin du pétrole brut et des condensats (sorte de pétrole léger, ndlr) est proche", note Moez Ajmi, du cabinet EY. "Mais est-ce que le monde est prêt à vivre sans pétrole? La dépendance est encore très forte de mon point de vue."

L'AIE elle-même estime d'ailleurs que la demande pétrolière mondiale va poursuivre son rebond pour atteindre l'an prochain des niveaux pré-Covid-19, non loin de 100 millions de barils par jour.

Alors que les cours du pétrole ont nettement rebondi ces derniers mois, les pays producteurs comptent bien continuer à profiter de cette rente.

"Les discours sur un secteur qui serait relégué au passé et qui cesserait tout nouvel investissement dans le pétrole et le gaz sont erronés", a déclaré le secrétaire général de l'Opep, Mohammed Barkindo.

"La transition aura lieu, j'en suis convaincu parce qu'il y a une véritable prise de conscience, mais elle va prendre du temps", juge de son côté Patrick Pouyanné, le CEO du géant pétrolier français TotalEnergies.

Pour lui, les discussions actuelles prennent le problème à l'envers en se concentrant sur la fin de l'offre pétrolière plutôt que sur une révolution des modes de consommation. La demande en énergies fossiles "déclinera parce qu'on offrira aux consommateurs des nouveaux objets comme les véhicules électriques", selon M. Pouyanné.

Au premier semestre, les véhicules électriques représentaient 7% des ventes mondiales de voitures, selon BloombergNEF. C'est encore très minoritaire, mais la dynamique est très forte.

Moez Ajmi insiste aussi sur la nécessité de transformer la demande avec "des réelles concrétisations".

"année de transformation"

"Les arguments des compagnies pétrolières et des grandes nations productrices sont court-termistes et cyniques: ils cherchent tous les moyens possibles pour justifier une trajectoire qui n'est pas durable", regrette pour sa part Romain Ioualalen.

"Nous sommes bien sûr encore loin d'une économie décarbonée, mais ce sont les investissements que nous réalisons aujourd'hui dans le système énergétique qui nous y mèneront", avance-t-il.

Quel que soit l'horizon de la fin du pétrole, les grandes entreprises du secteur s'y préparent bon gré mal gré, sous une pression croissante. Longtemps réticentes, les majors américaines ExxonMobil et Chevron ont elles aussi annoncé cette année des investissements dans la transition énergétique.

"2022 a le potentiel pour être une véritable année de transformation", prédit Tom Ellacott, du cabinet Wood Mackenzie. "Rester au bord du chemin de la décarbonation n'est pas une option."

Au menu de la nouvelle année, selon les experts: toujours plus d'investissements dans l'électricité d'origine éolienne ou solaire, mais aussi dans les technologies de capture du carbone ou l'hydrogène.