"La suppression de l'impôt anticipé sur les obligations fait partie d'un grand plan de la majorité de droite ainsi que du lobby des multinationales et de la finance", déclare le coprésident du PS, Cédric Wermuth, dans la version écrite de son discours.

Cette réforme ne va profiter qu'aux multinationales et aux criminels fiscaux, au détriment du financement solidaire des services publics, dénonce le conseiller national argovien. Il rappelle que le manque à gagner pour l'Etat se monte à "plusieurs centaines de millions de francs par an".

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"Pillage"

Ce "nouveau pillage des caisses publiques" ne débouchera sur aucune incitation positive, renchérit Samuel Bendahan, conseiller national vaudois et vice-président du PS. "L'impôt anticipé est aujourd'hui prélevé sur des revenus qui, sans ce mécanisme, échapperont au fisc", ajoute-t-il.

Les estimations des coûts, à quelques centaines de millions par an, sont faites au moment où les obligations ont des rendements très bas, les taux directeurs étant négatifs.

Lorsque le rendement d’une obligation de la Confédération est de -0,12%, les pertes sont estimées à 200 millions. Mais si le rendement passe à 3 ou 4%, les pertes augmenteront massivement, puisque l’impôt anticipé est proportionnel au rendement obligataire, calcule Samuel Bendahan. "C’est une véritable bombe à retardement, qui ne manquera pas d’exploser à la figure de la population suisse, qui finalement payera à nouveau l’addition."

Pression sur les travailleurs

Depuis des années, on assiste à une redistribution des richesses des salariés vers les personnes nanties, financièrement aisées et vers les entreprises, par le biais de baisses ou de suppressions d’impôts accordées à la place financière et aux classes favorisées, abonde Natascha Wey, secrétaire générale adjointe du Syndicat des services publics (SSP).

Les travailleuses et travailleurs qui paient leurs impôts subissent en revanche une pression de plus en plus forte. Les primes d’assurance-maladie et les loyers qui prennent l’ascenseur alourdissent le budget des ménages.

Entre 2016 et 2022, les salaires réels n’ont augmenté que de 0,2% par année et l’évolution des salaires est en retard sur celle de la situation économique, rappelle la syndicaliste. De nombreuses personnes n’arrivent plus à couvrir leurs besoins vitaux avec les rentes des caisses de pensions et les rentes AVS qui sont en baisse.

Au lieu de s’attaquer à ces problèmes, la majorité bourgeoise du Parlement continue d’accroître les disparités, estime Natascha Wey. "On prévoit d’exonérer dorénavant les personnes nanties pouvant investir en obligations du paiement de l’impôt anticipé sur les intérêts de ces obligations."

Cette mesure ouvrirait tout grand les portes à l’évasion fiscale, selon elle. Celles et ceux qui disposent d’un petit pécule sur un compte épargne continueraient au contraire à être soumis à l’impôt anticipé. Au final, le message donné est clair: on laisse tomber ceux qui doivent continuent à gagner honnêtement leur argent et on se préoccupe au contraire du sort des personnes aisées et déjà privilégiées.

Place économique bradée

Le conseiller national fribourgeois Gerhard Andrey (Verts) ajoute que la Suisse était déjà "incroyablement attractive" pour les entreprises. "Avec la stratégie consistant à supprimer progressivement des recettes fiscales importantes et à créer de nouvelles niches fiscales, la place économique suisse est bradée", déclare-t-il.

La réforme adoptée par le Parlement veut exonérer les personnes morales domiciliées en Suisse et les investisseurs étrangers de l'impôt anticipé sur les placements suisses portant intérêts. A moyen terme, le marché des capitaux de tiers se verra renforcé et la création de valeur et l'emploi seront stimulés en Suisse, selon le ministre des finances Ueli Maurer.

La suppression de l'impôt anticipé devrait entraîner à court terme une baisse unique des recettes d'un milliard de francs. Des diminutions récurrentes des recettes d'environ 200 millions de francs par an sont ensuite attendues.