Le programme de rachat de titres publics et privés, le "QE", arme principale de la banque centrale lancée durant les années d'inflation atone, va se terminer plus vite qu'annoncé initialement, alors que les prix flambent en zone euro.

Les achats nets mensuels de dette privée et publique s'élèveront à 40 milliards d'euros en avril, 30 milliards d'euros en mai et 20 milliards d'euros en juin, selon un communiqué.

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Le Conseil des gouverneurs "conclura les achats nets (...) au troisième trimestre" si les perspectives d'inflation à moyen terme "ne s'affaiblissent pas", est-il ajouté.

Auparavant, la BCE voulait les faire redescendre à 20 milliards à partir d'octobre seulement et les laisser perdurer "aussi longtemps que nécessaire".

Comme prévu, l'institut a aussi acté la fin après le mois de mars du programme d'urgence de 1850 milliards d'euros d'achats de dette lancé en 2020 pour contrer la récession provoquée par la pandémie, le "PEPP".

De même, les taux directeurs ont campé à leur plus bas historique, notamment celui négatif de 0,50% taxant une partie des liquidités bancaires non distribuées en crédit à l'économie.

Mais la BCE n'affirme plus, contrairement à ce qu'elle a fait jusqu'ici, qu'un arrêt de ces achats de dette sera automatiquement suivi d'une hausse des taux directeurs, qui serait la première depuis 2011.

"Tout ajustement des taux d'intérêt directeurs de la BCE surviendra quelque temps après la fin des achats nets du Conseil des gouverneurs dans le cadre de l'APP (le programme d'achats d'actifs, ndlr) et sera progressif", est-il indiqué sans plus de précision temporelle.

Compte tenu du risque de stagflation et de l'incertitude élevée, cette décision "donne à la banque centrale un maximum de flexibilité et laisse ouverte l'option d'une hausse des taux avant la fin de l'année", analyse Carsten Brzeski, de la banque ING.

Rester flexible

Devant la presse à partir de 13H30 GMT, la présidente de l'institution Christine Lagarde devra trouver les mots pour expliquer que la BCE veut rester flexible, tout en réaffirmant sa volonté de lutter contre l'inflation, alors que les banques centrales américaine et britanniques se montrent beaucoup plus déterminées.

Les effets de la guerre déclenchée par Vladimir Poutine devaient être au coeur des discussions du Conseil des gouverneurs.

Cette crise majeure bouscule la communication adoptée en février par la banque centrale.

Elle avait alors ouvert la voie à une "normalisation" de sa politique après deux ans de soutiens massifs à l'économie face à la pandémie de Covid-19. Les analystes misaient sur un possible relèvement, en fin d'année, des taux directeurs.

Mais la guerre aux portes de l'Europe et les sanctions prises par les Occidentaux contre la Russie vont rejaillir sur les économies de la zone euro.

Le risque de "stagflation", combinaison redoutée d'inflation et de stagnation économique, a "clairement augmenté", observe Carsten Brzeski, économiste à ING.

La hausse des prix avait déjà connu en février une accélération inquiétante au niveau record de 5,8% en zone euro.

"Prête à toute mesure"

Carburants attendus à 2,20 euros le litre, hausse des prix de l'alimentaire: l'inflation élevée est là et va peser sur l'activité, accentuée par les perturbations prolongées des chaînes d'approvisionnement et le recul de la confiance.

La BCE publiera jeudi de nouvelles projections macroéconomiques intégrant un premier calcul des effets présumés du conflit ukrainien.

A ce stade, la présidente Christine Lagarde s'est juste dite "prête à toute mesure nécessaire" pour assurer la stabilité des prix,des propos qu'elle pourrait préciser devant la presse.

Face à une inflation partie pour dépasser durablement la cible de 2% fixée par la BCE, les banquiers centraux de la zone euro ont déjà fait entendre leur différence ces derniers jours.

Certains ont prêché dernièrement la "prudence", à l'instar de l'Italien Fabio Panetta, membre du directoire de la BCE, alors que du côté de l'orthodoxe Bundesbank, son président Joachim Nagel a plaidé pour "garder un oeil" sur le calendrier de resserrement du crédit. Les décisions du jour indiquent que ce point de vue a été prévalant.