"On est fatigués de prendre des balles, d'être kidnappés: on demande à M. Ariel Henry, comme il a prouvé qu'il était incapable, de laisser le pouvoir", assène Robens Dorvil, participant à la marche citoyenne à Port-au-Prince, qui réclame la démission du Premier ministre. "Beaucoup de gens au sein de la communauté haïtienne sont victimes de l'irresponsabilité de l'État", déplore le manifestant.

Le long du parcours à travers la capitale, gardé par un important dispositif policier, une foule bigarrée a scandé pendant plus de trois heures des slogans hostiles au gouvernement en place et aux forces de l'ordre, accusés de passivité face aux bandes armées.

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Avion incendié

Aux Cayes, la troisième ville d'Haïti, un groupe de manifestants contre l'insécurité a envahi mardi midi la piste de l'aéroport, dont la fréquentation a fortement augmenté depuis juin, quand les gangs ont pris le contrôle de l'unique route reliant la moitié sud d'Haïti, où se trouvent les Cayes, à la capitale Port-au-Prince.

Un petit avion de missionnaires américains qui y était stationné a été pris d'assaut, déplacé à l'extérieur de l'aéroport puis incendié. "Notre équipe sur le terrain est en sécurité. Nous nous préparons à les ramener aux États-Unis en toute sécurité", a indiqué l'organisation Agape Flights, basée en Floride, dans un communiqué publié sur son site internet où il est précisé que ses vols de la semaine étaient annulés.

Selon des médias locaux, une personne a été tuée et plusieurs personnes ont été blessées par balles lors de l'intervention policière face au groupe qui avait pris possession de l'appareil.

En fin d'après-midi, le Premier ministre haïtien a déploré ces actes de vandalisme sans évoquer la personne décédée. "Je condamne, énergiquement, les violences de manifestants ayant abouti à l'incendie d'un avion, à l'aéroport des Cayes", a indiqué Ariel Henry sur Twitter. "J'ai instruit les pouvoirs publics de mettre l'action publique en mouvement contre les auteurs de ces actes subversifs afin qu'ils soient sévèrement sanctionnés", a ajouté le chef du gouvernement, fortement contesté à travers le pays.

"Cinq à dix enlèvements par jour"

Haïti est, depuis des mois, sous la coupe réglée de gangs dont l'emprise s'est largement étendue au-delà des quartiers défavorisés de Port-au-Prince.

"Selon les alertes que nous recevons, nous disons qu'entre cinq et dix personnes sont enlevées chaque jour, avec des pics allant parfois jusqu'à 20 par jour", signale Marie-Rosy Auguste Ducéna, militante du Réseau national de défense des droits humains. "Le département de l'Ouest (où se situe la capitale) est devenu un labyrinthe du crime", déplore l'avocate.

Réclamant des rançons de plusieurs milliers, voire plusieurs centaines de milliers de dollars américains aux proches de leurs victimes, même les plus pauvres, les bandes armées ont imposé un climat de terreur dans la principale ville d'Haïti où les rues sont désertées dès la tombée de la nuit.

Les citoyens s'estiment livrés à eux-mêmes car des enlèvements sont commis par des personnes portant des uniformes de la police nationale d'Haïti.