Disney l'avait annoncé dès fin 2020: sa plateforme de vidéo à la demande en ligne (SVOD) Disney+ allait mettre les bouchées doubles pour gagner le c½ur des adultes sur les continents où elle serait implantée.

Car même si Disney+ "s'est développée très, très rapidement" depuis son lancement en novembre 2019 aux Etats-Unis, le groupe, qui règne dans les contenus jeunesse, a "capturé tous les consommateurs qu'il pouvait avec cette marque familiale" sur cette cible première, particulièrement en Amérique du Nord, constate Richard Cooper, directeur de la recherche chez Ampere Analysis, cabinet d'études spécialiste des médias.

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Ses abonnés ont pu toutefois constater que Disney s'était bien éloigné de l'univers de Mickey avec la sortie au début de l'année de "Pam et Tommy", une série biopic autour du vol de la "sextape" de la nuit de noces de l'actrice américaine Pamela Anderson et de Tommy Lee, batteur du groupe de rock Mötley Crüe, dont la diffusion avait fait scandale dans les années 1990.

Trajectoire canon

Ce premier pas sulfureux marque l'ambition du groupe, qui vise 230 à 260 millions d'abonnés d'ici 2024, de poursuivre sa trajectoire canon sur le marché du streaming vidéo à la demande.

En à peine plus de deux ans, Disney+ s'est ainsi hissé dans le trio de tête mondial avec près de 130 millions d'abonnés dans environ 60 pays derrière Amazon Prime vidéo (plus de 175 millions dans plus de 200 pays et territoires) et le pionnier Netflix (près de 222 millions d'abonnés dans plus de 190 pays).

Et ce grâce à un gigantesque catalogue de contenus, composés entre autres des univers Star Wars, Pixar ou Marvel mais aussi issus d'autres studios (FX, National Geographic, 20th Century Fox), conséquence du rachat par Disney début 2019 d'une grande partie de la 21st Century Fox.

Dans la bataille du streaming, qui se joue désormais à l'international compte tenu de la saturation du marché nord-américain, Disney marche dans les pas de Netflix: quelque 340 programmes originaux sont en cours de production en dehors des Etats-Unis, en vue d'une diffusion d'ici à deux ans, dont 60 séries en Europe.

"Activisme de marque"

Sur le vieux continent où les diffuseurs du secteur public sont plus nombreux, "le volume de contenu local culturellement pertinent est assez élevé et facilement accessible", ce qui a conduit Disney à "choisir avec soin" ses productions locales, analyse Richard Cooper, interrogé par l'AFP.

Parmi celles-ci, la mini-série "Oussekine" en France, en ligne le 11 mai, qui retrace le parcours brisé de Malik Oussekine, étudiant français d'origine algérienne mort en 1986 sous les coups de policiers ou la série italienne "The ignorant angels", disponible depuis avril, sur une femme qui découvre l'amant de son mari défunt.

La série "Pistol", adaptée par Danny Boyle ("Trainspotting", "Slumdog millionaire") des mémoires du guitariste du groupe punk britannique "Sex Pistols", débarquera fin mai tandis qu'en Allemagne "Sam, a saxon" racontera l'ascension puis la chute du premier policier noir d'Allemagne de l'Est.

"Disney développe un discours de plus en plus engagé en s'emparant des thématiques qui relèvent de l'inclusion et de la diversité" pour s'aligner sur ses concurrents, notamment Netflix déjà très présent sur ces sujets, estime auprès de l'AFP Louis Wiart, professeur en communication à l'université Libre de Bruxelles.

Pour le chercheur, ce positionnement tient de "l'activisme de marque" qui consiste à "mettre en avant une série d'engagements pour renforcer son image mais aussi pour consolider son lien avec le public".

Sur son site, Disney l'affirme: il travaille à "amplifier les voix sous-représentées et les histoires inédites" au nom "d'une représentation exacte dans les médias et le divertissement".

Cette perspective idéologique "sociale et plus libérale", apparue dans les années 1990 au travers d'héroïnes indépendantes comme Pocahontas, Mulan ou Jasmine ("Aladin"), retrouve "un second souffle" avec des contenus adultes, portés par des mouvements contemporains comme MeToo ou Black Lives Matter, conclut Louis Wiart.

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