"Il faut s'efforcer de rappeler les principes humanitaires", notamment la neutralité, affirme dans un entretien à Keystone-ATS le directeur des opérations de l'organisation, Hichem Khadhraoui, de retour d'une mission d'une semaine en Ukraine. Ceux-ci "n'ont pas été suffisamment mis en avant" ces dernières années par les acteurs internationaux, déplore-t-il.
Dans certaines régions, des acteurs habillés en militaires utilisent des camionnettes d'organisations humanitaires pour distribuer de l'aide aux civils. A l'inverse, des ONG internationales ont du mal à acheminer de l'assistance au-delà de checkpoints ou à se faire comprendre. L'Appel de Genève joue le rôle de facilitateur dans certains cas. "On fait de plus en plus ce lien", insiste M. Khadhraoui.
Plus largement, les tensions sont importantes. Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) est victime depuis des mois de diffamation en Ukraine parce qu'il dialogue aussi avec les Russes. "Les deux parties pensent qu'elles ont raison et emmènent leurs populations", affirme le directeur des opérations de l'Appel de Genève. Plus la guerre se poursuit, plus cette situation se détériorera.
L'ONG genevoise, depuis cinq ans en Ukraine mais moins connue, est moins exposée et les sanctions suisses contre la Russie aident parfois dans ce pays. M. Khadhraoui a pu rencontrer le gouverneur de la région d'Odessa qui "ne voit presque personne". Dans les prochaines semaines, l'Appel de Genève va démarrer des formations en droit international humanitaire (DIH) auprès de la défense territoriale, surtout auprès des nouveaux membres pour éviter des abus par méconnaissance.
Discussion plus difficile avec les pro-russes
Mais l'ONG veut se rapprocher le plus possible des acteurs de la ligne de front. Un commandant d'unité de Mykolaïv s'est montré demandeur et des encadrements de la garde nationale auront lieu peut-être déjà dans une semaine. "Nous sommes presque les seuls à être sur place", dit M. Khadhraoui qui appelle les autres organisations à être proches des affrontements.
L'ONG veut être présente rapidement à Kharkiv, où l'une de ses responsables se rendra fin juin, et à Dnipro. De six personnes, le dispositif devrait augmenter à une vingtaine.
L'objectif pour les prochains mois est également de pouvoir faire le même travail côté pro-russe. "C'est plus difficile", admet M. Khadhraoui. Pour le moment, l'Appel de Genève oeuvre au travers d'organisations locales pilotées par des femmes qui relaient les messages humanitaires. Une collaboration va aussi être menée avec les syndicats, très écoutés dans cette région, et les autorités religieuses qui sont souvent les seules à pouvoir faire le lien entre les deux parties.
Parmi les questions les plus urgentes figure notamment celle des mines et des engins non explosés. "C'est très problématique, alors beaucoup de gens veulent revenir chez eux", insiste M. Khadhraoui.
Dispositif important
Des affichages mais aussi des messages dans les transports publics seront diffusés. Des brochures sont aussi distribuées dans des villages pour convaincre les personnes âgées de l'importance d'évacuer les territoires proches des affrontements. Les effets pourront être évalués d'ici deux mois, selon le directeur des opérations.
L'ONG oeuvre aussi pour donner des indications sur la question des mines sous-marines dans le port d'Odessa, toujours bloqué pour les exportations ukrainiennes. Celles-ci atteignent environ 50'000, selon elle. Alors même que des mines de la Seconde Guerre mondiale sont toujours observées dans les océans.
Pour le personnel de l'Appel de Genève sur place, le dispositif de sécurité est aussi plus important que dans n'importe quel autre conflit. "Une sécurité passive", selon le directeur des opérations. Quelques bombardements ont été à déplorer dans les régions dans lesquelles il s'est rendu.