"Nous vivons actuellement la première crise énergétique mondiale, avec l'Europe comme épicentre", a dit Benoît Revaz lors d'une conférence de presse à Berne. Les prix sont fortement impactés par la guerre en Ukraine et la Suisse n'est pas épargnée.
Le responsable a détaillé les différents chantiers sur lesquels la Confédération travaille afin d'assurer l'approvisionnement l'hiver prochain. Outre le parachute de secours pour les entreprises énergétiques, qui doit encore être adopté par le Parlement, Benoît Revaz a cité une campagne de sensibilisation de la population aux économies d'énergie. Une plateforme sera disponible à la fin août.
Interrogé sur la hausse possible du prix du courant pour les ménages, Urs Meister, directeur de la Commission fédérale de l’électricité (ElCom), a expliqué qu'il était difficile de donner des chiffres pour cette année. "Une hausse de 20% en moyenne est néanmoins attendue pour 2023", a-t-il lâché.
Ne pas tomber dans l'alarmisme
Si les experts présents mercredi ont reconnu que le "risque de pénurie d'électricité est réel et important", Michael Frank, directeur de l'Association des entreprises électriques suisses (AES), a tenu à relativiser. "Il serait faux de tomber maintenant dans l'alarmisme", a-t-il dit. Le secteur de l'énergie prend toutefois la situation au sérieux.
Face au risque de pénurie, quatre mesures dites de contingentement et de rationnement sont prévues. La première consiste en un appel de la Confédération aux entreprises et à la population à réduire volontairement leur consommation. Dans un deuxième temps, de premières limitations ou interdictions de certains usages pourraient être prononcées pour les appareils et installations non indispensables.
Si la pénurie venait à perdurer, un contingentement de l'électricité pour les gros clients serait mis en place. Enfin, la quatrième mesure, plus drastique, prévoit des délestages sur l'entier du territoire national. Ainsi, les exploitants du réseau de distribution couperaient – pour quelques heures – l’alimentation des consommateurs dans leur région, en alternant les secteurs touchés.
Situation similaire pour le gaz
Bastian Schwark, chef du domaine Énergie à l'Office fédéral pour l'approvisionnement économique du pays, a présenté le dispositif prévu en cas de pénurie de gaz.
Là aussi, la première étape consiste en un appel à la réduction volontaire de la consommation. Ensuite, on passerait à la commutation des installations biocombustibles du gaz au mazout dans les entreprises équipées de ce type d'installations. La troisième phase prévoit des restrictions, par exemple l'obligation de limiter la température de chauffage dans les bâtiments publics.
Enfin, la quatrième étape consiste en des contingentements. Ceux-ci s’appliqueraient dans un premier temps à toutes les installations qui ne sont pas considérées comme protégées. Parmi les clients protégés, on trouve les ménages, les installations de chauffage à distance fournissant les ménages et les services sociaux essentiels. Les hôpitaux, l’alimentation en énergie et en eau et les organisations d’urgence comptent également parmi les services essentiels.
Barrages dans la norme
Le taux de remplissage des barrages hydro-électriques est actuellement dans la norme en Suisse et les centrales nucléaires - à l'exception de Beznau (AG) pour des raisons de température de l'Aar - tournent à plein régime.
C'est ce qu'a indiqué Urs Meister, tout en précisant que la centrale argovienne a dû réduire sa puissance à la fin de la semaine dernière en raison des hautes températures de l'Aar. L'installation pourrait même être complètement arrêtée si les 25 degrés sont atteints pendant trois jours consécutifs, selon le directeur de l'EIcom
Un tel arrêt aurait cependant pour conséquence l'importation d'électricité de l'étranger produite au gaz, a-t-il ajouté. Or les prix s'envolent, avec des hausses comprises entre 50% et 75% par rapport à début juin. Sur le marché international, la situation est très incertaine, a souligné M. Meister.