"Je pense que le mieux, pour guérir les blessures, est juste d'être franc et d'admettre que j'ai eu tort", a déclaré le jeune sud-coréen, pour la première fois depuis le fracas de terra, au média spécialisé Coinage depuis Singapour.

Tout avait pourtant bien commencé. En 2018, ce diplômé de Stanford, passé par Apple et Microsoft, lance sa cryptomonnaie avec une idée en tête: utiliser la technologie du blockchain pour développer un système de paiement plus efficace.

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Pour ce faire, il veut se baser sur une cryptomonnaie dite stable, dont le cours est en principe lié à celui d'une devise traditionnelle, ce qui garantit aux investisseurs une certaine pérennité dans l'univers très volatil des cryptomonnaies.

Et les débuts sont prometteurs. Do Kwon réussit à lever près de 40 milliards de dollars auprès d'investisseurs de renom tels que Polychain Capital ou encore Arrington XRP.

En avril 2022, la valeur du terra atteint son plus haut. Selon CoinMarketCap, il est le quatrième stablecoin le plus important et la dixième cryptomonnaie la plus importante en termes de valeur marchande.

Mais les choses vont commencer à dégringoler. Un mois plus tard, le terra perd plus de la moitié de sa valeur en 24 heures, semant un vent de panique dans un marché des cryptoactifs déjà fébrile.

"Zéro"

Très vite, le stablecoin et son jeton jumeau Luna tombent à zéro, entraînant des pertes de plus de 500 milliards de dollars sur le marché.

La stabilité de certaines cryptomonnaies dites stables n'est pas assurée par des réserves en devises, mais par un algorithme qui réalise des arbitrages en fonction de l'offre et de la demande d'une autre cryptomonnaie.

C'est le cas du terra, qui est adossé au cryptoactif développé par la Luna Foundation Guard. Or, ce jeton s'est aussi écroulé. L'effet domino est immédiat: les investisseurs paniquent et tentent de retirer leur argent.

Les critiques avaient longtemps averti contre ce système qu'ils estimaient structurellement défaillant. De fait, à chaque fois qu'un jeton terra était créé, une partie de la cryptomonnaie Luna devait être détruite afin de maintenir son adossement au dollar.

Et pour entretenir la demande, l'entreprise de Do Kwon, Terraform Labs, proposait des taux d'intérêt juteux. Pyramide de Ponzi, dénoncent les détracteurs.

"Si la demande s'effondre, alors le prix tombera à zéro", souligne auprès de l'AFP Hilary Allen, professeur de régulation financière à l'American University, basée aux États-Unis.

Conséquence, de nombreux petits investisseurs perdent toutes leurs économies.

"C'est une caractéristique de presque tous les cryptoactifs, et donc Terra/Luna devrait servir d'avertissement pour tous les investisseurs (se lançant sur le marché des) cryptoactifs", note Hilary Allen.

Les autorités sud-coréennes ont depuis ouvert plusieurs enquêtes criminelles autour de cette affaire.

Le mois dernier, les procureurs sud-coréens ont perquisitionné le domicile de Daniel Shin, co-fondateur, soupçonné d'activités illégales à l'origine de l'effondrement de terra.

Enquêtes en cours

Les autorités ont également interdit aux principaux employés, anciens et actuels, de Terraform Labs de quitter le pays et ont demandé à Do Kwon de les informer de son retour.

Mais dans son interview avec Coinage, l'entrepreneur a affirmé ne pas avoir été contacté par les procureurs et qu'il n'avait pas décidé s'il retournerait en Corée du Sud pour coopérer.

"C'est un peu difficile de prendre cette décision, car nous n'avons jamais été en contact avec les enquêteurs", a-t-il dit, ajoutant : "Ils ne nous ont jamais accusés de quoi que ce soit".

Quelques semaines après l'effondrement de Terra, il lance Terra 2.0 qui rencontre néanmoins la même destinée que son prédécesseur: sa valeur tombe très vite de 11 dollars à 2 dollars.

Malgré son mea culpa, Do Kwon dit toujours croire à sa cryptomonnaie.

"Je vais toujours faire des choses autour de Terra et pour la communauté de Terra", continue de dire M. Kwon. "C'est ma maison et c'est là que je sens qu'il y a le plus bel avenir".

Mais avec de multiples enquêtes en cours, les analystes estiment que les projets d'avenir de Do Kwon ont peu de chances d'aboutir.

Son nom "est désormais porteur d'un +goodwill+ négatif", analyse Kelvin Low, professeur de droit à l'Université nationale de Singapour. "Son implication dans un projet lui nuit plutôt que de l'aider".