Le social-démocrate a tenu jusque samedi soir des négociations marathon avec ses partenaires écologistes et libéraux pour finaliser ce plan attendu depuis plusieurs semaines.
Répétant son mantra selon lequel les Allemands ne seront "jamais seuls" face à la crise énergétique, Olaf Scholz a dévoilé dimanche une batterie de mesures, dont un chèque énergie unique de 300 euros pour des millions de retraités et de 200 euros pour les étudiants.
L'inflation est repartie à la hausse en Allemagne en août, à 7,9% sur un an. Elle pourrait atteindre 10% d'ici la fin de l'année, une première depuis les années 1950.
En octobre, une taxe sur le gaz destinée à éviter la faillite des groupes énergétiques allemands doit entrer en vigueur. Elle va entraîner une nouvelle hausse de la facture pour les consommateurs.
Cibler la "spéculation"
Comme dans d'autres pays européens, la hausse des prix nourrit l'inquiétude de la population et les appels à manifester, essentiellement à l'initiative de l'extrême droite ou de l'extrême gauche, inquiètent le gouvernement.
Depuis le début de l'invasion russe de l'Ukraine, fin février, le gouvernement d'Olaf Scholz a déjà débloqué deux trains d'aides totalisant quelque 30 milliards d'euros. Soit un bazooka de près de 100 milliards d'euros avec les annonces de dimanche.
Ce nouveau plan a été reporté à plusieurs reprises, illustrant les frictions entre les trois partis de la coalition au pouvoir depuis neuf mois.
Symbole du difficile compromis trouvé : l'engagement d'Olaf Scholz de s'attaquer à la "spéculation" sur le marché de l'énergie et aux bénéfices exceptionnels réalisés par des groupes qui "profitent" de prix du gaz record, selon les mots du chancelier.
Cette question divise le gouvernement depuis le début de l'été. Ecologistes et sociaux-démocrates souhaitent une taxation des milliards engrangés. Le camp libéral, représenté par le ministre des Finances Christian Lindner, y est lui farouchement opposé.
Berlin veut peser pour l'adoption rapide des mesures d'urgence récemment proposées par la Commission européenne et visant notamment à plafonner les prix pour certains producteurs d'électricité afin de restreindre les profits exceptionnels des énergéticiens.
"Les entreprises énergétiques qui produisent par exemple de l'électricité à base de renouvelables, de charbon ou de nucléaire, le font à des coûts de production toujours aussi faibles, mais gagnent énormément d'argent grâce aux mécanismes actuels du marché européen de l'électricité", a expliqué dimanche le ministre de l'Economie Robert Habeck pour justifier la nécessité d'agir.
Mais si un accord rapide n'est pas possible entre les Vingt-Sept, Olaf Scholz assure être prêt à imposer cette contribution obligatoire au niveau national. Une mesure "ne relevant pas du droit fiscal", a précisé M. Lindner, veillant à ne pas utiliser le mot de "taxe".
Cette contribution pourrait rapporter "plusieurs dizaines de milliards d'euros", selon le ministre des Finances.
Le chancelier s'est dit "confiant" dans les chances de voir aboutir les discussions prévues la semaine prochaine au niveau européen.
Le grand argentier du gouvernement a assuré que les milliards d'aides annoncés dimanche ne sortaient pas des clous budgétaires pour 2022 et 2023.
Un calcul mis en doute par le responsable d'un des principaux instituts économiques du pays, le DIW : selon Marcel Fratzscher, le gouvernement "ne pourra pas" tenir sa promesse de revenir l'an prochain à la règle constitutionnelle du frein à l'endettement qui plafonne les nouvelles dettes.
Dépendance réduite au gaz russe
Autre mesure du plan d'aide : le lancement d'un nouvel abonnement aux transports en commun à prix cassé, "entre 49 et 69 euros" par mois, pour remplacer le populaire ticket à neuf euros, réduction exceptionnelle que les Allemands ont pu utiliser tout l'été dans les transports publics.
Pour le monde des affaires, ce paquet d'aides ciblant les ménages modestes est "décevant" au moment où "un nombre croissant d'entreprises sont menacées dans leur existence face à l'explosion des prix du gaz et de l'électricité", a commenté la fédération du lobby industriel BDI.
La première économie européenne s'attend à entrer en récession à la fin de l'année.
Le spectre d'un black-out électrique, en raison du tarissement du gaz russe, semble lui s'éloigner.
"Nous pourrons faire face à cet hiver", a assuré Olaf Scholz, en dépit de l'arrêt prolongé, annoncé vendredi par l'énergéticien Gazprom, du gazoduc Nord Stream qui relie la Russie au nord de l'Allemagne