Tout en se défendant d'utiliser l'énergie comme une "arme", Vladimir Poutine a menacé de cesser toute livraison d'hydrocarbures en cas de plafonnement des prix, un projet relancé le même jour par Bruxelles. Plafonner les prix des hydrocarbures russes serait "une bêtise", a-t-il lancé lors d'un forum économique à Vladivostok.
"Nous ne livrerons rien du tout si c'est contraire à nos intérêts, en l'occurrence économiques. Ni gaz, ni pétrole, ni charbon (...). Rien", a ajouté le président russe.
Plafonnement des prix
Mais quelques instants plus tard la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen relançait l'idée d'un tel plafonnement, dans le cadre de mesures pour alléger la facture énergétique des Européens.
Pour Bruxelles, cela permettrait aussi de "réduire les revenus" utilisés par le pouvoir russe pour "financer cette guerre atroce contre l'Ukraine". "Au début de la guerre, le gaz russe par gazoduc représentait 40% de tout le gaz importé (par l'UE). Aujourd'hui, il n'en représente que 9%", a souligné Mme von der Leyen.
Kiev a dénoncé une "propagande de la Russie qui bat son plein en menaçant l'Europe d'un hiver glacial". Vladimir Poutine "s'avance vers la deuxième étape d'une guerre hybride, en menaçant la stabilité des foyers européens", a déclaré le porte-parole de la diplomatie ukrainienne Oleg Nikolenko.
"Ne vous y trompez pas, les coupures de gaz par la Russie n'ont rien à voir avec les sanctions. C'est planifié à l'avance", a-t-il ajouté.
"Fièvre des sanctions" dénoncée
Les griefs de M. Poutine ne se sont pas limités aux hydrocarbures, le chef du Kremlin s'en prenant à la "fièvre de sanctions" occidentales, qui ne parviendront pas selon lui à "isoler la Russie". Le "pic" des difficultés liées à ces sanctions est "passé", a-t-il notamment assuré.
M. Poutine a insisté sur le renforcement des liens avec l'Asie, la Chine en particulier, face à "l'agression technologique, financière et économique de l'Occident". Il devrait rencontrer le dirigeant chinois Xi Jinping la semaine prochaine en Ouzbékistan en marge du sommet de l'Organisation de coopération de Shanghai" (OCS), a assuré mercredi l'ambassadeur russe à Pékin.
Selon lui, les deux présidents "ont beaucoup de choses à se dire, tant sur les questions bilatérales que sur les problèmes internationaux". Bâtie comme un contrepoids à l'influence occidentale, l'OCS regroupe la Chine, la Russie, quatre Etats d'Asie centrale (Kazakhstan, Kirghizistan, Ouzbékistan et Tadjikistan) ainsi que l'Inde et le Pakistan.
Abondant dans le sens de M. Poutine, le président turc Recep Tayyip Erdogan, en visite à Belgrade, a accusé les Occidentaux de "provocation" envers Moscou.
"Catastrophe humanitaire
M. Poutine a par ailleurs retourné contre les Occidentaux les accusations selon lesquelles le conflit en Ukraine et ses conséquences agricoles permettaient à Moscou de faire pression sur les pays en développement dépendant du blé ukrainien.
Selon lui, l'immense majorité des céréales ukrainiennes, dont les exportations viennent de reprendre, vont vers les pays européens et non pas vers les pays pauvres, ce qui pose un risque de "catastrophe humanitaire".
Craintes pour Zaporijjia
Les craintes autour de la centrale nucléaire de Zaporijjia, occupée depuis six mois par les forces russes continuent par ailleurs de rester vives. Un accident nucléaire aurait "des conséquences non seulement pour l'Ukraine, mais aussi, clairement, des conséquences au-delà des frontières", a averti Oleg Korikov, responsable de l'agence ukrainienne de sécurité nucléaire.
Plus grande centrale nucléaire d'Europe, Zaporijjia subit des bombardements dont Kiev et Moscou s'accusent mutuellement. Mardi, l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) a souhaité la mise en place d'une "zone de sécurité" autour du site, dont la situation est devenue "intenable".
Le chef de l'opérateur public ukrainien Energoatom, Petro Kotine, a souhaité pour sa part mercredi que cette centrale soit placée sous la protection d'un "contingent de maintien de la paix". Mais le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov a réclamé des "clarifications" à l'AIEA sur son rapport et M. Poutine a démenti des affirmations de l'agence sur la présence d'équipements militaires sur le site.
A Bruxelles, Ursula von der Leyen a aussi proposé que l'UE verse une aide financière de 5 milliards d'euros pour aider l'Ukraine, deuxième tranche d'un paquet maximum de 9 milliards pour 2022.