"Les bases légales seront créées pour permettre le fonctionnement des centrales nucléaires Isar 2, Neckarwestheim 2 et Emsland au-delà du 31 décembre 2022 et jusqu'au 15 avril 2023", précise une lettre du chancelier au gouvernement que l'AFP a pu consulter.

Le gouvernement n'avait auparavant annoncé que le maintien de deux des trois centrales au-delà de fin 2022, date initialement prévue d'une sortie du nucléaire. La centrale d'Emsland, dans le nord du pays, était au coeur d'un bras de fer au sein de la coalition au pouvoir formée des sociaux-démocrates, des Verts et des Libéraux.

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Le chancelier a finalement tranché lundi, dans un contexte d'urgence, où la première économie européenne s'efforce de réduire sa dépendance aux importations énergétiques russes, notamment son gaz. Le ministre de la Justice Marco Buschmann, du FDP, a salué sur Twitter la décision du chancelier Scholz.

"Le bon sens prévaut... Cela renforce notre pays car cela garantit une plus grande stabilité du réseau et une baisse des prix de l'électricité", se réjouit-il, alors que le nucléaire produit actuellement 6% de la production nette d'électricité en Allemagne.

Camouflet pour les Verts

Mais cette décision est un nouveau coup dur pour le ministre allemand de l'Economie, l'écologiste Robert Habeck, dont les frictions avec son collègue des Finances, le libéral Christian Lindner, sont de plus en plus patentes. La décision du chancelier est "un camouflet pour Habeck", a commenté le Bild lundi.

La ministre de l'Environnement, Steffi Lemke, des Verts, a quant à elle salué la "clarification" faite par M. Scholz, qui selon elle ne signifie en rien un abandon de la sortie à terme du nucléaire. "L'Allemagne éliminera enfin l'énergie nucléaire le 15 avril 2023", il n'y aura pas de "prolongation de la durée de vie" des centrales", s'est dite confiante Lemke sur Twitter.

L'ONG Greenpeace a quant à elle qualifié la décision de Scholz d'"irresponsable". "La prolongation de la durée de vie des centrales nucléaires nous expose tous à un risque injustifiable", a déclaré le directeur exécutif de Greenpeace Allemagne, Martin Kaiser.

Plans chamboulés par la guerre

Initialement, l'Allemagne, dont une grande partie de la population est hostile à l'atome, comptait fermer ses trois derniers réacteurs nucléaires en activité fin 2022.

Mais le gouvernement d'Olaf Scholz était revenu sur cette décision après l'invasion russe de l'Ukraine et avait décidé en septembre de prolonger deux des trois centrales encore en activité jusqu'au printemps 2023, blâmant la France pour son piètre réseau, dans un contexte de pénurie d'énergie orchestrée par la Russie après l'invasion de l'Ukraine.

Une vingtaine de réacteurs sur les 56 que compte le parc français sont en effet indisponibles en raison d'opérations de maintenance ou de problèmes de corrosion. EDF a promis leur redémarrage graduel d'ici à février 2023.

Aller plus loin

Les Libéraux allemands voudraient aller plus loin que le printemps 2023 et garder en activité plus longtemps les trois centrales, tandis que les Verts sont historiquement profondément anti-nucléaires.

Face à la menace d'une pénurie d'énergie cet hiver, le gouvernement allemand a déjà décidé d'un recours accru au charbon, une énergie particulièrement polluante, avec le prolongement de l'activité de plusieurs centrales au charbon jusqu'au printemps 2024, même s'il s'est fixé comme objectif d'abandonner cette énergie en 2030.

La militante suédoise Greta Thunberg avait estimé préférable de continuer à utiliser les centrales nucléaires actuellement en activité en Allemagne plutôt que de se tourner vers le charbon, dans un récent entretien à la télévision allemande.

Le calendrier de sortie du nucléaire avait été décidé par Angela Merkel après la catastrophe de Fukushima, au Japon, en 2011.