Sur la base du texte de la présidence, les pays doivent approuver d'ici lundi "l'accord de Kunming-Montreal", feuille de route cruciale pour stopper la destruction de la nature et de ses ressources indispensables à l'humanité d'ici la fin de la décennie.
L'objectif de protéger 30% des terres et des mers de la planète d'ici 2030, annoncé comme le point-phare de ces négociations, figure dans le projet d'accord, présenté dimanche par la Chine, présidente de la 15e Conférence de l'ONU pour la biodiversité à Montréal.
Garanties pour les peuples autochtones
Des garanties pour les peuples autochtones, gardiens de 80% de la biodiversité subsistante sur Terre, sont aussi présentes dans le texte, autres enjeux du sommet.
Pour tenter de résoudre la question financière toujours brûlante entre le Nord et le Sud, la Chine propose par ailleurs d'atteindre "au moins 20 milliards de dollars" d'aide internationale annuelle pour la biodiversité d'ici 2025 et "au moins 30 milliards d'ici 2030".
Les pays pauvres veulent 100 mia par an
En échange de leurs efforts, les pays les moins développés réclament aux pays riches 100 milliards de dollars par an. Soit au moins dix fois l'aide internationale actuelle pour la biodiversité.
Maintenant qu'un texte - plutôt bien accueilli globalement - est sur la table, les négociations ont repris: après une réunion des chefs de délégation à huis clos, une nouvelle session plénière est prévue dimanche soir.
"Une chance pour la nature"
"Le projet de document final de la présidence chinoise est courageux", a déclaré la ministre allemande de l'Environnement, Steffi Lemke. "En protégeant la nature, nous nous protégeons nous-mêmes".
Pour Brian O'Donnell, directeur de l'ONG Campaign for nature, ce texte "donne une chance à la nature. S'il est approuvé, les perspectives pour les léopards, les papillons, les tortues de mer, les forêts et les populations s'amélioreront nettement", ajoute-t-il.
"Parcs sur le papier"
D'autres craignent toutefois que la formulation permette la création de "parcs sur le papier". An Lambrechts de Greenpeace International va encore plus loin estimant que "le projet d'accord est faible". Cela ne "permettra pas d'arrêter la perte de biodiversité, et encore moins de l'inverser" et pourrait être un "invitation ouverte à l'éco-blanchiment".
Sue Lieberman, de l'ONG WCS, note que "certains aspects ne sont pas assez ambitieux et se concentrent sur 2050, ce qui est trop loin dans le futur".
Car les scientifiques sont formels, le temps presse. 75% des écosystèmes mondiaux sont altérés par l'activité humaine, plus d'un million d'espèces sont menacées de disparition et la prospérité du monde est en jeu: plus de la moitié du PIB mondial dépend de la nature et de ses services.
"Enormes progrès"
"Ce n'est pas un document parfait, pas un document qui satisfera tout le monde mais c'est un document basé sur les efforts de tous depuis quatre ans, un document qui doit être adopté", avait lancé samedi à ses homologues le ministre chinois de l'Environnement Huang Runqiu.
"Nous avons fait d'énormes progrès", s'est félicité à ses côtés le ministre canadien de l'Environnement Steven Guilbeault, co-chef de fait du sommet qui n'a pu se tenir en Chine à cause du Covid-19.
Plan précédent sans effet
Ce cadre doit succéder au plan décennal signé au Japon en 2010, qui n'a atteint quasiment aucun de ses objectifs. Les mécanismes d'application véritables qui lui ont fait défaut sont désormais mieux prévus.
Mais le diable se cache dans les détails et ceux des objectifs qui sont encore âprement discutés inquiétent les défenseurs de l'environnement.
"Nous ne pouvons pas continuer à demander à la nature de faire des compromis", a mis en garde la ministre néo-zélandaise de la Conservation Poto Williams.
"Les pays les plus vulnérables hébergent des trésors de biodiversité. Nous devons augmenter nos financements pour les accompagner", a tweeté samedi le président français Emmanuel Macron, dans un appel à élargir le groupe des donateurs.
Pour un fonds mondial
Outre les subventions, les pays du Sud poussent aussi fortement à la création d'un fonds mondial dédié à la biodiversité - une question de principe - à l'image de celui obtenu en novembre pour les aider à affronter les dégâts climatiques.
Mais le Nord, notamment la France, résiste et préfère développer le Fonds mondial pour l'environnement déjà existant, ainsi qu'augmenter les flux privés et philanthropiques vers le Sud.
Sur ce point, la Chine propose un compromis: établir dès 2023 une branche dédiée à la biodiversité au sein de l'actuel Fonds mondial pour l'environnement (FEM), dont le fonctionnement actuel est jugé très déficient par les pays les moins développés.