Les exportations ont bondi de 29% par rapport à l'année précédente. Elles dépassent de 6% le précédent record, établi en 2020 (901,2 millions de francs). Les données du SECO remontent à 1983. Ce secteur représente 0,25% de l'ensemble des exportations de marchandises de l'économie helvétique, précise le Secrétariat d'Etat.
Au total, la Suisse a exporté du matériel de guerre vers 60 pays. Le Qatar a été le principal acheteur, avec des emplettes d'un montant total de 213,4 millions de francs. L'émirat a notamment acheté des systèmes de défense antiaérienne pour 194,3 millions de francs. Il a acquis ces systèmes pour protéger les stades lors de la Coupe du monde de football l'hiver dernier.
Bien qu'en tête du hit-parade, le Qatar fait l'objet d'une politique restrictive pour ces exportations d'armes en raison de la situation qu'y règne en matière de droits de l'Homme, a assuré à Berne devant les médias Simon Plüss, responsable du contrôle de l'armement au Seco.
Véhicules blindés et DCA
Les autres plus grands importateurs ont été le Danemark (136,2 millions), l'Allemagne (131,7 millions), l'Arabie saoudite (111,1 millions) et les Etats-Unis (61,5 millions).
Un quart des ventes (26,5%) ont concerné des véhicules blindés, 24,8% des munitions et composants pour munitions, 18,2% des armes de tous calibres, 16,8% du matériel de conduite de tir, 5,4% des armes de petit calibre et 4,8% des composants pour avions de combat.
Les principales opérations ont concerné la livraison de véhicules blindés à roues vers le Danemark (130,3 millions) et le Botswana (33,3 millions), de pièces de rechange pour des systèmes antiaériens de défense vers l'Arabie saoudite (65,1 millions) et de munitions vers l'Allemagne (52,2 millions).
Forte progression en Asie
L'Asie est le continent qui enregistre la plus forte progression, avec 36,1% des ventes, contre 10,9% l'an dernier. A l'inverse, seule la moitié des livraisons (50,4%) a pris le chemin de l'Europe, contre 65% en 2021. Le continent américain a représenté 7,1% des exportations et l'Afrique 7,1%.
Concernant les biens militaires spécifiques (tels que les systèmes de protection contre les torpilles et les drones, les systèmes de déminage, les équipements de protection NBC ou les équipements de protection balistique), la valeur totale des autorisations délivrées selon la liste du SECO s'est élevée à 69 millions de francs, contre 58 millions en 2021.
Au total, le SECO a reçu 2625 demandes d'exportation. Il en a accepté 2420 et en a rejeté six. Un an plus tôt, il avait admis 2403 demandes sur les 2513 qu'il avait reçues.
Droit de la neutralité
Concernant la guerre en Ukraine, le SECO rappelle que la Suisse applique le droit de la neutralité depuis l'annexion de la Crimée par Moscou en 2014. "Ce droit reste applicable pendant l'agression militaire que mène actuellement la Russie contre l'Ukraine", précise-t-il.
En vertu du principe de l'égalité de traitement inscrit dans le droit de la neutralité, Berne ne peut pas autoriser la transmission de matériel de guerre d'origine suisse à l'Ukraine tant que Kiev est impliqué dans un conflit armé international. En outre, les critères d'autorisation de la loi sur le matériel de guerre, que le Parlement a d'ailleurs durcis en 2021, excluent la livraison de matériel de guerre à des pays impliqués dans un conflit armé international.
Cinq interventions - deux motions et trois initiatives parlementaires - sur la réexportation d'armes suisses vers l'Ukraine sont actuellement en suspens aux Chambres fédérales. Selon Simon Plüss, une des initiatives "pourrait être traitée, dans le meilleur des cas, lors de la session d'automne". Pour les motions, il faudra attendre plus longtemps. Certaines de ces interventions seraient compatibles avec la loi sur la neutralité.
Le GsSA dénonce un "mensonge"
Le niveau record des exportations de matériel de guerre suisse démontre le "discours mensonger" sur une industrie de l'armement qui serait en péril, a réagi le Groupe pour une Suisse sans armée (GSsA). "Il est honteux de voir comment on tente de relier ce débat au soutien à l'Ukraine", estime-t-il.
Dans un communiqué, le GSsA, par la voix de sa secrétaire politique Pauline Schneider, dénonce l'"absurdité" du discours autour des livraisons d'armes à l'Ukraine, selon lequel la Suisse devrait assouplir sa pratique sans quoi son industrie de l'armement serait menacée. Les exportations se poursuivent vers les Etats dans lesquels les droits humains ne sont pas respectés, comme l'Arabie Saoudite et le Qatar, destinataires d'un tiers des exportations suisses, pointe le GSsA.