Pour cette sixième journée d'action, les syndicats avaient annoncé vouloir mettre la France "à l'arrêt". La mobilisation dans les rues a été très forte, le secrétaire général du syndicat réformiste CFDT Laurent Berger la qualifiant "d'historique au regard des 40 ou 50 dernières années".

La CGT a annoncé 3,5 millions de manifestants dans toute la France, contre 2,5 millions le 31 janvier, précédent record dans cette mobilisation contre la réforme des retraites. Le ministère de l'Intérieur de son côté a chiffré à 1,28 million le nombre de manifestants, soit légèrement plus que son décompte du 31 janvier (1,27 million).

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"Pas rester sourd"

Comme lors des précédentes mobilisations, les cortèges ont été globalement calmes en dépit de quelques heurts entre certains manifestants cagoulés et les forces de l'ordre à Paris, Nantes, ou encore à Lyon et Rennes où des canons à eau ont été utilisés. A Paris, 22 personnes ont été interpellées.

Dans la capitale, les chiffrages font le grand écart entre 700'000 selon la CGT et 81'000 pour la préfecture. Le gouvernement "ne peut pas rester sourd" à cette mobilisation, a insisté le leader de la CFDT, tandis que le leader de la CGT, Philippe Martinez, mettait en garde l'exécutif contre "un passage en force (qui) ne ferait que mettre le feu aux poudres".

Les taux de grévistes restaient un peu en deçà des meilleurs scores enregistrés depuis le début du mouvement, chez les cheminots (39% contre 46,3% le 19 janvier) comme chez les enseignants et à EDF (47,65% des salariés en grève selon la direction, contre 50% le 19 janvier).

Cortèges très fournis

Dans la fonction publique d'Etat dans son ensemble, près d'un agent sur quatre était en grève, contre 28% lors de la première journée d'action le 19 janvier, et 19,4% le 31 janvier.

En début de soirée, l'intersyndicale a demandé à être "reçue en urgence" par Emmanuel Macron "pour qu'il retire sa réforme". Elle a annoncé deux nouvelles journées de mobilisation samedi et la semaine prochaine.

Partout en France, les cortèges étaient très fournis mardi, à un niveau comparable à la mobilisation record du 31 janvier. Ils étaient notamment entre 6000 (préfecture) et 30'000 (CGT) à Nice, entre 13'000 et 23'000 à Bayonne, entre 20'500 et 55'000 à Grenoble. A Marseille, la CGT a fait état de 245'000 manifestants et la préfecture 30'000.

Sondage après sondage, les Français restent très majoritairement opposés à la mesure emblématique de la réforme, le report de l'âge légal de départ, même s'ils pensent qu'elle sera mise en oeuvre in fine.

Blocages

Dans l'éducation, des blocages ont eu lieu dans des universités et lycées. Le ministère a fait état de 32,71% d'enseignants grévistes. Le Snuipp-FSU, premier syndicat du primaire, a recensé 60% des enseignants de collèges et lycées grévistes.

Le secrétaire général de la CGT Energie, Sébastien Ménesplier, a prévu une "semaine noire" dans le secteur, avec des baisses de production principalement dans le nucléaire. De nombreux barrages routiers ont été recensés, des coupures sauvages d'électricité ont eu lieu dans le nord, et les expéditions de carburants ont été bloquées mardi matin à la sortie de "toutes les raffineries", de source syndicale.

La semaine sera émaillée d'autres mobilisations, alors que le Sénat a entamé mardi soir l'examen de l'article qui cristallise l'opposition des syndicats et de la gauche: le report de l'âge légal de la retraite à 64 ans. Le gouvernement compte sur l'adoption de la réforme d'ici dimanche au Sénat et envisage "un vote le 16 mars" dans les deux chambres.

"Si la réforme est adoptée, il est peu probable que la mobilisation se maintienne à ce niveau", anticipe une source gouvernementale, qui escompte un désengagement des syndicats réformistes.

Dissolution ou référendum

"La loi est extrêmement importante, mais la démocratie réelle aussi", a prévenu de son côté Laurent Berger, mettant en garde contre un passage en force qui serait "une forme de blocage inacceptable".

Face "à la situation de blocage", Emmanuel Macron doit "trouver une sortie par le haut", "ou bien une dissolution" de l'Assemblée nationale, "ou bien un référendum", a plaidé Jean-Luc Mélenchon (LFI) à Marseille.