L'indice vedette Nikkei de la Bourse de Tokyo perdait 0,98% vers 04h45, lesté notamment par ses valeurs bancaires. A Hong Kong, les pertes de l'indice Hang Seng étaient pires (-2,51%), tandis que les Bourses de Shanghai et Shenzhen étaient elles en petite hausse.

Matt Simpson, analyste de City Index, relevait toujours une "forte dose de suspicion et de paranoïa" sur les marchés asiatiques dans une note publiée lundi. "Les incertitudes pourraient rester élevées pendant un certain temps" en dépit des diverses mesures de soutien au secteur bancaire, prévenait aussi Stephen Innes de SPI Asset Management.

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Les autorités asiatiques tentaient lundi de rassurer leurs propres marchés. L'autorité monétaire de Hong Kong a ainsi qualifié d'"insignifiant" l'impact de la saga Credit Suisse sur son système bancaire, précisant que les actifs de la banque helvétique à Hong Kong représentaient "moins de 0,5% des actifs totaux du système bancaire" de la ville.

A Tokyo, le porte-parole du gouvernement Hirokazu Matsuno a de nouveau assuré lundi que les établissements financiers nippons disposaient de "liquidités et capitaux abondants" et que le marché financier était "globalement stable".

"Meilleure solution"

Les autorités fédérales et les présidents des banques UBS et Credit Suisse ont annoncé le rachat de cette dernière pour un montant de 3 milliards de dollars dimanche soir au terme d'un week-end de spéculations. Cette opération, scrutée au niveau international, a été décrite comme étant la meilleure solution pour rétablir la confiance par le président de la Confédération Alain Berset. "Il faut tout faire pour éviter une crise financière de grande ampleur", a-t-il indiqué devant la presse.

Pour racheter l'institut dans la tourmente depuis plusieurs jours, l'UBS déboursera une action propre pour 22,48 actions Credit Suisse. La transaction est ainsi valorisée à quelque trois milliards de francs ou 76 centimes par action Credit Suisse.

Le Conseil fédéral, qui a consacré quatre séances ces derniers jours à la banque en déconfiture, a approuvé cette opération. Berne a accordé d'importantes garanties pour permettre l'opération. Certaines mesures avaient déjà été décidées ces derniers jours, mais n'avaient pas été communiquées pour ne pas affoler encore plus les marchés, a expliqué la ministre des finances Karin Keller-Sutter.

Garanties de la Confédération

La Confédération accorde en particulier une garantie de 9 milliards de francs à UBS afin de réduire les risques encourus par cette dernière, notamment en prenant le contrôle de certains actifs pouvant potentiellement subir des pertes.

Par ailleurs, la Banque nationale suisse (BNS) a annoncé qu'elle "soutient la reprise du Credit Suisse par UBS en allouant d'importantes aides sous forme de liquidités". Ce prêt pouvant aller jusqu'à 100 milliards de francs est couvert par une garantie de l'Etat.

Ces garanties se basent sur le droit d'urgence permis par la Constitution, a expliqué la ministre des finances. Elles sont limitées dans le temps et devront être soumises au Parlement dans un délai de six mois.

Il ne s'agit pas d'un sauvetage, mais d'une opération commerciale, a souligné Karine Keller-Sutter. Elle a jugé que le risque pour la Confédération était "gérable", alors qu'une reprise par ses soins de l'établissement en déroute aurait été bien plus dangereux pour le contribuable.

La cheffe du Département fédéral des finances (DFF) a regretté que le CS, une fois un institut exemplaire, n'ait pas pu surmonter seul les difficultés auxquelles il a été confronté et en soit arrivé là. La Suisse a dû prendre ses responsabilités pour rétablir la confiance des marchés, a-t-elle insisté.

Craintes pour l'emploi

Concrètement, le Credit Suisse deviendra une filiale d'UBS. Lors de la conférence de presse, le président d'UBS Colm Kelleher n'a rien voulu dire des conséquences pour l'emploi. Celles-ci font l'objet des plus grandes inquiétudes de l'Association suisse des employés de banque, qui a réclamé une task force pour sauvegarder les postes de travail.

A la fin 2022, Credit Suisse employait 16'700 personnes en Suisse et près de 50'500 dans le monde. En octobre dernier, la banque avait annoncé la suppression de 9000 postes dans le monde, sur un total de 52'000 postes à l'époque. Selon ces données, la banque devait encore compter 43'000 collaborateurs à la fin 2025.

Interrogé sur les responsabilités pour la débâcle, le président de Credit Suisse Axel Lehmann a souligné que les problèmes se sont accumulés pendant des années, avant de faire déborder le vase. "Nous avons été rattrapés par des charges héritées du passé et par des risques qui se sont désormais matérialisés", a-t-il dit.

Opération saluée à l'international

Du Trésor américain à la Banque centrale européenne (BCE) en passant par Londres, l'annonce a été saluée par plusieurs pays et banques centrales. Ceux-ci craignaient un nouvel emballement des marchés, déjà rendus fébriles par la récente faillite de la Silicon Valley Bank aux Etats-Unis.

"Nous applaudissons les annonces d'aujourd'hui des autorités suisses en faveur d'un soutien à la stabilité financière", ont indiqué la ministre américaine de l'Economie Janet Yellen et le président de la Réserve fédérale Jerome Powell dans un bref communiqué.

La présidente de la Banque centrale européenne (BCE) Christine Lagarde a elle aussi salué "l'action rapide" des autorités suisses. Ces décisions vont aussi permettre de "garantir la stabilité financière", a-t-elle déclaré dans un communiqué.

Pour faire bonne mesure les plus puissantes banques centrales du monde, y compris la BCE et la Fed, ont annoncé dans la foulée une action coordonnée pour améliorer l'accès à des liquidités et rasséréner un peu plus les investisseurs.

En Suisse, les partis gouvernementaux ne sont pas tendres avec Credit Suisse. Le centre-droit concède toutefois la nécessité de la décision. Même son de cloche du côté des cantons. L'USS elle se préoccupe de la sauvegarde des emplois. La presse a quant à elle déploré lundi les conséquences de l'opération sur l'image de la Suisse, frappée dans sa fierté, et sur les contribuables, pointant un "attentisme" de la part des autorités.