L'institution anticipe désormais une croissance mondiale de 2,8% en 2023, en léger recul par rapport à son estimation précédente en janvier (-0,1 point de pourcentage), selon les données publiées mardi à l'occasion de ses réunions de printemps.
"Nous sommes face à une économie qui continue de récupérer des différents chocs de ces dernières années, en particulier bien entendu la pandémie mais également l'invasion russe de l'Ukraine. Et nous observons une reprise graduelle", a expliqué le chef-économiste du FMI, Pierre-Olivier Gourinchas, lors d'une conférence de presse.
La situation aurait toutefois pu être plus sombre sans les effets de la réouverture en Chine et l'accélération de la croissance indienne qui "contribueront pour moitié à la croissance mondiale en 2023", avait souligné jeudi la directrice générale du Fonds, Kristalina Georgieva, lors d'un entretien avec l'AFP.
Pour la plupart des pays, un retour à la normale n'est pas encore en vue. En cause notamment, l'inflation devrait rester importante en 2023, autour de 7% au niveau mondial. Surtout l'inflation sous-jacente - hors prix des aliments et de l'énergie, par nature plus fluctuants - reste mal orientée.
A cela viennent s'ajouter les soubresauts récents du secteur financier, en particulier aux Etats-Unis, après la faillite de trois banques régionales, et le rachat précipité de Credit Suisse par son concurrent UBS, sur fond de hausse des taux par les banques centrales, précisément pour lutter contre l'inflation.
"Les risques ont, de nouveau, pesé lourdement à la baisse sur la croissance et en grande partie du fait des turbulences financières des dernières semaines", a souligné M. Gourinchas.
Malgré tout, le FMI révise à la hausse ses prévisions de croissance pour les Etats-Unis en 2023, à 1,6% (+0,2 point), ainsi que pour 2024, à 1,1% (+0,1 point).
Cette prévision reste inchangée pour la France concernant 2023, à 0,7%, mais est en léger recul pour 2024, à 1,3% (-0,3 point).
La zone euro pourrait faire mieux qu'initialement anticipé (+0,1 point) en 2023, à 0,8%, sous l'effet d'une croissance qui s'annonce plus élevée en Espagne et en Italie.
Les prévisions s'améliorent aussi au Royaume-Uni, qui devrait cependant terminer l'année en récession, comme attendu depuis octobre dernier, mais à -0,3% alors que le FMI prévoyait encore -0,6% en janvier.
Signes de faiblesse en Chine
L'Allemagne flirte toujours avec la récession: envisagée en légère croissance sur l'année en cours en janvier dernier (+0,1%), la première économie européenne est désormais attendue en léger repli (-0,1%).
Pourtant, l'industrie allemande devrait notamment profiter de la reprise économique de son principal client, la Chine, depuis la réouverture de son économie, après l'abandon de sa politique stricte zéro-Covid en début d'année.
Le gouvernement allemand et les instituts estiment d'ailleurs que le pays devrait éviter la récession, avec une croissance attendue à 0,2% pour le gouvernement, 0,3% pour les principaux instituts allemands.
La croissance chinoise va de nouveau jouer un rôle de moteur pour la croissance mondiale pour 2023, à 5,2%, mais ralentir dès 2024, à 4,5%, une de ses croissances les plus faibles des 30 dernières années, en dehors de 2020 avec la pandémie, et 2022 avec la politique zéro-Covid.
Là encore, les signes de faiblesse sont présents et incitent le FMI à faire preuve de prudence dans ses prévisions.
"Il y a des inquiétudes concernant le marché local de l'immobilier par exemple. Mais il y a aussi des risques plus globaux, en particulier que la guerre vienne de nouveau pousser à la hausse le prix des matières premières", a ainsi expliqué Pierre-Olivier Gourinchas.
La Russie, notamment, profite de ce marché des matières premières, et, alors qu'il y a six mois, une récession sévère y était annoncée, l'économie devrait selon le FMI progresser de 0,7% cette année et 1,3% en 2024, malgré les sanctions prises par les puissances économiques occidentales.
Cela s'explique par "la tendance observée sur le second semestre l'année dernière. Mais un durcissement des conditions commerciales pourrait entraîner un déclin significatif des revenus fiscaux et du compte courant" et causer un ralentissement de l'économie, a expliqué à l'AFP un porte-parole du Fonds.
Pour 2024, le FMI ne modifie pas sa prévision de croissance mondiale, à 3,0%.
Mais sans triomphalisme, comme l'a rappelé Kristalina Georgieva: "nous nous attendons à une croissance autour de 3% durant les cinq prochaines années, notre plus faible perspective à moyen terme depuis 1990".