Dans un hangar près de Lisieux, une poignée de salariés a déjà converti quatre Twingo. L'entreprise n'a pas rajeuni que le moteur: "tous les organes sont changés ou rénovés", explique le fondateur de Lormauto, Sébastien Rolo.
Des batteries prennent la place de la boîte de vitesses et du réservoir devenus inutiles. La planche de bord devient noire, tout comme les sièges, remis à neuf. Les volants fatigués sont recouverts de cuir.
De la Twingo originale, il ne reste que la carrosserie et le châssis. S'ils fonctionnent encore, les lève-vitres, les phares ou la climatisation restent aussi.
100 km d'autonomie
Lormauto veut éviter de passer par la case casse, et développer une filière locale dans ce "rétrofit". "On ne peut pas expliquer aux gens qu'il faut faire du compost, et qu'on dépense de l'énergie pour jeter les voitures et les recycler", lance Sébastien Rolo.
Cet ancien informaticien (et agriculteur) de 53 ans s'est lancé à fond dans ce projet en 2020. Son idée est de proposer une électrique à moins de 200 euros par mois sur cinq ans, en location seulement, sans apport, et entretien compris.
Dans toute l'Europe, les besoins sont immenses et immédiats: la mise en place des Zones à faible émissions (ZFE) et l'interdiction des voitures thermiques neuves en 2035 doit pousser les automobilistes à s'équiper de modèles électriques.
Mais le modèle neuf le moins cher, la Dacia Spring, coûte au moins 20'000 euros, hors subventions, et elle est fabriquée en Chine.
Les offres de location à un tarif avantageux se multiplient, et le marché de l'occasion électrique se développe lentement. Mais une partie importante des Français reste exclue du marché électrique.
"On veut fabriquer des autos pour les travailleurs pauvres", qui roulent dans des vieilles voitures, soumis à un "cercle infernal de pannes" et des prix du carburant qui explosent, explique M. Rolo. Il veut leur proposer un véhicule attractif, sûr, et qui affiche sa vertu électrique.
Sa petite batterie lui donne une autonomie de 100 kilomètres qui doit permettre d'aller au travail, en ville comme à la campagne. Soit un aller-retour Lisieux-Caen avant de recharger à la maison, par exemple.
La petite Renault s'est imposée quand Lormauto cherchait une petite voiture largement diffusée et saine. Plus de 400'000 Twingo de première génération roulaient encore en France en 2022, selon le cabinet AAAdata.
"La Twingo est d'une remarquable simplicité quand on l'étripe. Et il n'y a pas eu de rappels, pas de défaut", ni de traces de corrosion sur la carrosserie, souligne M. Rollo.
La société privilégié des Twingo produites depuis l'an 2000, équipées d'une assistance au freinage et de quatre airbags.
Fin 2023 ?
La Twingo de Lormauto devrait arriver en septembre au bout d'une longue phase d'homologation.
L'entreprise espère produire ses premiers modèles pour la fin de l'année. Très ambitieuse, elle vise jusqu'à un millier d'exemplaires en 2024, et s'intéresse à d'autres modèles Renault, plus gros.
Mais elle est loin d'avoir réuni le financement requis pour cette montée en cadence. L'entreprise cherche encore des investisseurs, mais aussi des banques ou entreprises prêtes à acheter les voitures pour les mettre en location.
Lormauto a bénéficié pour l'instant des prêts et subventions de la région Normandie à hauteur de 370.000 euros, et d'un accompagnement à hauteur de 300'000 euros de la Banque publique d'investissement (BPI).
200 clients ont déjà réservé une voiture moyennant 200 euros, a indiqué Lormauto. Avec des subventions, son offre pourrait entrer dans le cadre de la voiture à 100 euros, promise par Emmanuel Macron pour 2024.
Le constructeur Renault, de son côté, vend plutôt bien sa Twingo électrique neuve à 25'000 euros. Et s'il ne s'est pas engagé avec la start-up, il soutient l'entreprise R-Fit, qui doit commercialiser en septembre un kit de conversion de la Twingo à l'électrique, à environ 10'000 euros.