«On fera tout pour remettre sur pied Naf Naf dans l'année à venir», a promis le dirigeant de SY, Selçuk Yilmaz, propriétaire de Naf Naf, dans une interview à l'AFP.
«Il ne faut pas que (les prestataires) nous confondent avec Camaïeu et toutes ces autres entreprises qui n'ont pas réussi à se redresser face à la crise du secteur du +retail+», a-t-il averti.
Positionnée sur le milieu de gamme, Naf Naf est une marque française du prêt-à-porter, lancée en 1973 par deux frères. Elle est désormais détenue par le groupe franco-turc SY qui emploie 660 salariés en France, détient 135 magasins et affichait en 2022 un chiffre d'affaires de 141 millions d'euros, «en croissance», avait déclaré fin août un porte-parole à l'AFP.
Mais elle est lourdement endettée, notamment en raison de loyers impayés depuis 2020, et a été placée en redressement judiciaire mercredi par le tribunal de commerce de Bobigny (Seine-Saint-Denis), avec une période d'observation de six mois.
«Les loyers ont globalement été payés» mais l'entreprise est en négociation avec certains bailleurs pour les réévaluer à la baisse, «notamment dans les centres commerciaux» où ils ne sont «plus en adéquation avec le chiffre d'affaires», a expliqué l'avocate du groupe Virginie Dupé, du cabinet Hyest.
«Il y a une responsabilité des bailleurs car les loyers en centre-ville sont exorbitants», a estimé aussi Aurélie Flisar, secrétaire générale adjointe à la CFDT.
Dans cette crise que traverse le prêt-à-porter, la syndicaliste craint pour les salariés, «principalement des femmes à temps partiel» qui se sentent «démunies, avec des perspectives d'emploi compliquées».
Deuxième redressement judiciaire
Les dettes de Naf Naf s'élèvent aujourd'hui à 60 millions d'euros (57,4 millions de francs), selon une source proche du dossier.
L'entreprise avait déjà été placée en redressement judiciaire en mai 2020 et reprise dans la foulée par le groupe franco-turc SY International, qui est toujours son actionnaire et qui emploie 1500 personnes en direct dans le monde, et qui avait déjà acquis l'enseigne Sinéquanone en 2019.
Elle avait commencé à se restructurer et supprimé 35 postes en juin 2023 dans le cadre d'un PSE, a rappelé Angélique Idali, secrétaire du CSE et déléguée syndicale CFDT, majoritaire à 87% chez Naf Naf.
«On sait qu'il va y avoir des fermetures de magasins, à priori une vingtaine, et un nouveau PSE au siège, qui va déménager», craint-elle.
«C'est le deuxième redressement judiciaire en trois ans, il y a donc beaucoup d'inquiétude, de défiance, de peur», selon la syndicaliste qui espère que sera évitée «au maximum une casse sociale».
Outre la crise du Covid-19, l'entreprise a durement été touchée ces dernières années par «les manifestations à répétition des gilets jaunes puis contre la réforme des retraites», «la guerre en Ukraine qui a provoqué un choc inflationniste et la flambée des prix de l'énergie, des matières premières et du transport» ainsi que «la concurrence étrangère dont les moyens de production discutables lui offrent une compétitivité déloyale».
Le secteur du prêt-à-porter en France est secoué depuis plusieurs mois par une violente crise.
Camaïeu, Kookaï, Burton of London, Gap France, André, San Marina, Kaporal, Don't Call Me Jennyfer, Du Pareil au Même et Sergent Major... Ces marques bien connues des consommateurs français ont souffert d'un cocktail détonnant : pandémie, inflation, hausse des coûts de l'énergie, des matières premières, des loyers et des salaires ou encore concurrence de la seconde main et de la fast fashion.
Il a été fatal pour certaines marques, qui ont été liquidées, comme Camaïeu en septembre 2022, dont le licenciement des 2100 salariés a fortement marqué les esprits.
D'autres sont en redressement judiciaire, comme Kookaï ou Burton of London.
Sans en arriver là, d'autres encore réduisent la voilure, taillant dans les effectifs et fermant des magasins, comme Princesse Tam Tam, Comptoir des Cotonniers (groupe Fast Retailing) ou Pimkie.