Fondé il y a dix ans par le Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies (LFB), racheté en 2019 par Novartis, le site de CellforCure aux Ulis, en région parisienne, sera repris le 1er décembre par Seqens. Ce dernier est notamment connu pour sa future usine de production de paracétamol, à Roussillon (Isère), annoncée à l'été 2021 dans le cadre du projet de relocalisation de production de cette molécule.
Le rachat de Cellforcure, l'un des premiers producteurs en Europe de médicaments de thérapie cellulaire et génique, a été officialisé lundi par Seqens. L'opération «permet de maintenir l'outil industriel, préserver le savoir-faire et sauvegarder un maximum d'emplois», sur quelque 200 postes du site, indique pour sa part Novartis dans un communiqué.
La plateforme Cellforcure, dont les principaux concurrents se trouvent aux Etats-Unis ou en Suisse, a «vocation à proposer une solution locale de qualité aux acteurs français, européens et américains», souligne Seqens dans un communiqué séparé. Concrètement, il s'agira de produire «à grande échelle», pour le compte de laboratoires académiques, de centres de thérapies cellulaires, de biotechs et de sociétés pharmaceutiques, précise le groupe français.
Novartis avait racheté Cellforcure afin d'augmenter en Europe ses capacités de production de thérapie cellulaire CAR-T («chimeric antigen receptor T-cells»), une classe de nouvelles thérapies qui réarment le système immunitaire en ciblant les cellules cancéreuses. En février dernier, le géant rhénan avait indiqué vouloir s'en séparer après y avoir investi 50 millions d'euros (86 millions de francs au cours actuel).
Tenu de chercher un repreneur conformément à la loi Florange qui vise à éviter ou limiter les effets sur l'emploi d'un projet de fermeture de site, Novartis avait annoncé en juillet mener des négociations exclusives avec Seqens.
Entre 300'000 et 400'000 euros
«L'utilisation des cellules CAR-T connaît un fort développement clinique» et environ plus de 15.000 patients ont à ce jour reçu des cellules CAR-T dans le monde, selon l'Académie de médecine. Qui souligne le coût de ces traitements: entre 300 et 400'000 euros pour une perfusion - une seule est nécessaire par malade. Des prix qui reflètent les montants que les grands groupes pharmaceutiques «ont dû débourser par l'achat des brevets des jeunes pousses, voire des jeunes pousses elles-mêmes, et des frais de marketing et de lobbying nécessaires pour l'accès au marché», explique l'Académie.
Dans un rapport publié le 7 novembre, elle préconise ainsi de «soutenir le développement des cellules CAR-T d'origine institutionnelle au sein d'un réseau français, franco-espagnol voire européen». Pas si simple, rétorquent des spécialistes du secteur: ils rappellent que la propriété intellectuelle des produits de thérapie cellulaire ne permet pas leur production par une structure publique (sauf exception).
En outre, s'il est possible de produire à petite échelle dans une infrastructure hospitalière, c'est bien plus difficile lorsqu'il faut passer à de larges volumes. Selon les spécialistes du secteur, la baisse des prix des thérapies cellulaires s'amorcera notamment avec la concurrence et l'augmentation des volumes.
La production de thérapies CAR-T est particulièrement complexe car chaque dose est fabriquée sur mesure pour chaque patient, à partir de prélèvements de ses propres cellules sanguines. Elles sont ensuite modifiées génétiquement en laboratoire et mises en culture in vitro avant d'être réinjectées au patient en milieu hospitalier. Les indications de la thérapie cellulaire CAR-T concernent surtout les cancers du sang agressifs mais elles pourraient s'étendre aux tumeurs solides et à d'autres pathologies.