Alors que l'observatoire européen Copernicus estimait début novembre «avec une quasi-certitude» que les températures moyennes sur la planète dépasseraient cette année le record annuel établi en 2016, l'AIE a établi que les tonnes de charbon consommées dans le monde cette année dépasseraient le record précédent datant de 2022.
La combustion du charbon pour produire de l'énergie ou dans l'industrie émet dans l'atmosphère une large part du CO2 responsable du réchauffement de la planète.
C'est en Asie que l'appétit de charbon est le plus important: selon l'AIE, cette année, la consommation en Chine aura fait un bond de 220 millions de tonnes (+4,9%) par rapport à 2022, celle de l'Inde aura progressé de 98 millions de tonnes (+8%), et celle de l'Indonésie de 23 millions de tonnes supplémentaires (+11%).
Inconnue russe
En revanche, la consommation s'est fortement ralentie en Europe (baisse de 107 millions de tonnes, -23%), et aux Etats-Unis (baisse de 95 millions de tonnes, -21%), en raison essentiellement de la mutation des centrales électriques qui abandonnent progressivement le charbon pour sauver le climat, et de la faiblesse de l'activité industrielle.
L'AIE avoue sa difficulté à émettre des prévisions pour la Russie, quatrième consommateur mondial de charbon, en raison de la guerre en Ukraine. Les prévisions pour l'Ukraine sont aussi «incertaines», indique l'Agence.
«A partir de 2024», la consommation mondiale devrait engager une tendance à la décrue, estime toutefois l'AIE dans ses prévisions publiées au surlendemain de la clôture de la 28e réunion internationale de l'ONU sur le climat à Dubaï, qui a demandé un abandon progressif des énergies fossiles dont le charbon fait partie, pour lutter contre le réchauffement.
«Pic» du charbon en 2023
L'AIE compte notamment sur une augmentation très importante des énergies renouvelables (éoliennes, solaire) sur la planète pour «pousser la consommation mondiale de charbon sur une trajectoire descendante». La consommation de «charbon devrait atteindre son pic en 2023» estime l'Agence.
Au delà de l'utilisation du charbon pour alimenter des centrales électriques, la consommation ne devrait pas faiblir dans ses utilisations industrielles comme les cimenteries.
Paradoxe, dans le cas de l'Indonésie, c'est l'extraction et le raffinage du nickel, en plein boom pour alimenter les marchés des batteries automobiles de la transition énergétique, qui favorise la consommation de charbon dans les procédés miniers.
La Chine reste néanmoins de loin le plus gros joueur sur l'échiquier du charbon, avec plus de la moitié de la consommation mondiale (54%) à elle toute seule.
«Plus de 60%» du charbon utilisé en Chine sert à produire de l'électricité, et le pays continue à construire des centrales à charbon (52 GW de nouveaux projets ont été approuvés en 2023).
Mais l'AIE s'attend à un tournant en 2023 si le pays ne subit pas trop de vagues de froid (ou de chaud) qui influencent l'utilisation des centrales.
Moteur indien
Selon l'agence la consommation chinoise de charbon pour la production d'électricité devrait baisser de 175 millions de tonnes sur la période 2024-26, à 2,8 milliards de tonnes.
Du coup, c'est l'Inde qui va devenir «moteur» pour la pression à la hausse sur la demande mondiale de charbon jusqu'en 2026, souligne l'Agence.
Dans l'Union Européenne, la multiplication des énergies renouvelables favorise le recul du charbon. En Allemagne, les centrales à lignite et celles au charbon devraient fortement réduire d'ici 2025, au fur et à mesure du déploiement des centrales solaires ou éoliennes qui n'émettent quasiment pas de CO2.