Cette contrainte concerne les sociétés dont le chiffre d'affaires annuel atteint au moins 40 millions de francs et qui emploient 500 personnes, ainsi que les établissements financiers disposant d'un minimum de 20 millions au bilan. Ces sociétés devront donc produire un rapport «non financier» - plus communément appelé rapport de durabilité - en plus de leur traditionnelle copie annuelle dévolue notamment au compte de résultat et à l'état du bilan au terme de l'exercice.
L'initiative pour des multinationales responsables a été refusée dans les urnes en novembre 2020, échouant à obtenir la double majorité du peuple et des cantons, malgré un soutien de la population (50,7% de oui). Le contre-projet indirect élaboré par le Parlement est entré en vigueur le 1er janvier 2022 assorti d'une période transitoire d'une année. «Les nouvelles obligations s'appliquent à partir de l'exercice 2023», explique à AWP Ingrid Ryser, cheffe de l'information à l'Office fédéral de la justice (OFJ).
Environ 400 entreprises sont concernées par la publication de ce rapport de durabilité, selon les calculs de l'OFJ.
Les prescriptions contenues dans le contre-projet s'inspirent de la réglementation européenne en vigueur. «De nombreuses entreprises ont déjà mis en place ces dispositions», note Erich Herzog, membre de la direction d'Economiesuisse. La mise en oeuvre de ces règles est très coûteuse. «Il faut du personnel et se faire conseiller à l'externe.»
Un durcissement déjà annoncé
Le Conseil fédéral souhaite élargir le seuil d'application aux sociétés dès 250 collaborateurs. Les rapports non financiers devront également être certifiés par un organe de révision externe. Cette mini-réforme doit faire l'objet d'un projet dont l'adoption est attendue en milieu d'année.
Les rapports non financiers gagneront également en volume dans un avenir proche. A partir de l'année prochaine, les grandes entreprises devront se référer à la norme «Task force on climate-related financial disclosure» (TCFD) pour détailler leurs activités liées à la durabilité. Cela permettra à toutes les sociétés assujetties de rendre compte de manière uniforme de leur gestion des risques climatiques.
En serrant ainsi la vis, la Suisse suit la tendance mondiale. La Commission européenne a récemment introduit une nouvelle directive sur les rapports de durabilité, la «Corporate sustainability reporting directive» ou CSRD.
Dans un premier temps, seuls les grands groupes devront se conformer à cette nouvelle réglementation de l'Union européenne (UE), qui sera étendue aux entreprises plus modestes dans les années à venir. «L'UE va nettement plus loin qu'auparavant», souligne M. Herzog d'Economiesuisse, qui se montre critique face à des dispositions entraînant un surcroît de travail.
La double matérialité constitue l'un des aspects les plus novateurs du rapport de durabilité. Les sociétés sont tenues d'expliquer comment elles influent sur le changement climatique, mais aussi comment le changement climatique se répercute sur l'entreprise.