La Commission européenne a décidé mi-novembre de renouveler cette autorisation, après un vote où les Etats membres n'étaient pas parvenus à dégager une majorité et à la suite du rapport d'un régulateur européen estimant que le niveau de risque ne justifiait pas une interdiction.
Pesticide Action Network (PAN) Europe et cinq autres ONG (Générations futures, PAN Allemagne, PAN Pays-Bas, Global2000, Client Earth) ont adressé à l'exécutif européen une demande formelle de «réexamen» de cette décision, première étape de leur bataille juridique.
Vingt-deux semaines pour répondre
La Commission dispose de 22 semaines, jusqu'à fin juin, pour y répondre.«Si elle ne retire pas son autorisation», les ONG se préparent à saisir la Cour de justice de l'Union européenne.
Pour justifier leur demande de révision, elles pointent que «le processus d'approbation a ignoré des études montrant un risque élevé de cancer, un taux de mortalité alarmant parmi les insectes, et des impacts majeurs sur le cerveau résultant de l'utilisation du glyphosate».
Procédure pour un recours en annulation
Secrets Toxiques, coalition de 80 associations engagées contre les pesticides jugés dangereux pour l'environnement, a simultanément annoncé avoir également engagé une procédure similaire en vue d'un recours en annulation.
Le glyphosate, substance active de plusieurs herbicides très courants, avait été classé en 2015 comme «cancérogène probable» par le Centre international de recherche sur le cancer de l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Une conclusion confirmée en 2021 en France par l'Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale).
A l'inverse, en juillet 2023, l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a indiqué n'avoir pas identifié de «domaine de préoccupation critique» chez les humains, les animaux et l'environnement susceptible d'empêcher l'autorisation de l'herbicide, tout en reconnaissant un manque de données.
Etudes fournies par les fabricants
S'appuyant sur les jurisprudences, les ONG reprochent à la fois aux régulateurs européens des lacunes dans l'examen du potentiel caractère cancérigène du glyphosate, en ignorant des études sur sa toxicité, et à la Commission de n'avoir pas respecté le principe de précaution et de «prudence» qu'imposent les traités.
«Les autorités ont systématiquement rejeté les données de la littérature scientifique indépendante, basant leur évaluation uniquement sur les études fournies par les fabricants (de l'herbicide)», a expliqué Pauline Cervan, toxicologue à Générations Futures.
Des études ont été écartées car elles concernaient des formulations (glyphosate associé à d'autres composants) et «certaines études-clés manquent pour différents domaines de l'évaluation (de l'EFSA), ce qui aurait dû conduire la Commission à ne pas accepter le dossier car incomplet», insiste-t-elle.