L'un des derniers phénomènes climatiques extrêmes en date, l'ouragan Béryl a tiré la sonnette d'alarme sur les marchés en dopant les prix du brut à l'approche de son passage par le Texas début juillet.

Selon l'Agence américaine de l'énergie (EIA), le Texas représentait 42% de la production totale de pétrole brut aux Etats-Unis en 2022, tout en possédant le plus grand nombre de raffineries de pétrole brut au niveau national.

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«Près de la moitié de la capacité totale de raffinage de pétrole des Etats-Unis est située le long du Golfe» du Mexique, précise Han Tan, analyste de chez Exinity interrogé par l'AFP. De quoi faire grimper les cours, les investisseurs s'inquiétant de possibles ruptures d'approvisionnement.

«Les marchés craignent que l'ouragan Béryl ne soit que le prélude de ce qui pourrait être une saison +surchargée+ de tempêtes cette année», souligne-t-il.

La formation très précoce de Béryl dans l'année et son intensification rapide pourrait préfigurer de la nature de ces tempêtes pour les années à venir, a alerté l'Organisation météorologique mondiale.

Des feux de forêt au Canada en mai avaient également poussé les prix du brut vers le haut, en menaçant la province de Fort McMurray, connue pour être le centre névralgique de la production de pétrole canadienne avec le plus gros complexe de sables bitumineux du pays.

Le changement climatique constitue désormais «une source majeure de risque sur les marchés pétroliers», affirme Jorge Leon, analyste chez Rystad Energy, qui s'attend par ailleurs à ce qu'il ne fasse «que croître dans les années à venir», à mesure que ses effets «deviendront plus visibles et plus extrêmes».

Difficile à prévoir

Des analystes le comparent même au risque géopolitique en ce qu'ils sont tous deux difficiles à prévoir et qu'ils se répercutent sur les prix en fonction des risques liés à l'offre ou à la demande. En revanche, «le risque climatique est moins gérable à court et moyen terme», estime M. Leon.

Il pourrait pourtant l'être à plus long terme en réduisant les émissions carbone, selon lui.

Si les combustibles fossiles sont les plus grands contributeurs au réchauffement, le dérèglement du climat pèse donc aussi en retour, de plus en plus visiblement, sur les opérations des groupes pétroliers et gaziers.

«Le changement climatique a affecté et affectera encore la production» de pétrole, résume Tamas Varga, analyste chez PVM Energy interrogé par l'AFP, expliquant par exemple que le temps plus chaud entraine des dysfonctionnements des raffineries.

«De nombreuses raffineries européennes ont été conçues dans les années 60 et 70, principalement pour résister à des températures plus froides que chaudes», ajoute Han Tan.

Les combustibles fossiles, à savoir le charbon, le pétrole et le gaz, sont responsables de plus de 75% des émissions mondiales de gaz à effet de serre d'après les Nations Unies.

Pour la première fois, les pays du monde entier avaient approuvé lors de la COP28 à Dubaï un compromis historique ouvrant la voie à l'abandon progressif des énergies fossiles, malgré de nombreuses concessions aux pays riches en pétrole et en gaz. Le texte adopté par consensus n'appelle cependant pas directement à la sortie des énergies fossiles.

«On ne peut pas s'attendre rationnellement à ce que les investisseurs inversent le phénomène alors qu'ils essaient de maximiser leurs profits», lance Ipek Ozkardeskaya, de chez Swissquote.

De fait, les majors pétrolières britanniques Shell et BP ont rétro-pédalé ces derniers mois sur certains objectifs climatiques.

Pour l'analyste, tant que les «coûts financiers des dommages climatiques ne dépassent pas les bénéfices», la solution ne pourra pas venir de l'économie.

«Seuls des changements réglementaires concrets, radicaux et mondiaux ayant des conséquences financières significatives (...) pourraient orienter les capitaux vers les énergies propres et durables», affirme-t-elle.