«Au XXIe siècle, rien n'est plus absurde et inacceptable que la persistance de la faim et de la pauvreté», a affirmé Luiz Inacio Lula da Silva en lançant à Rio son «Alliance globale contre la faim et la pauvreté», une priorité de la présidence brésilienne du G20.
Le défi est de taille: 733 millions de personnes ont souffert de la faim en 2023, soit 9% de la population mondiale, selon un rapport publié mercredi par l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et d'autres agences onusiennes, et présenté à Rio pour l'occasion.
«Nous avons besoin de solutions durables et nous devons y réfléchir et agir ensemble», a exhorté Lula. Les larmes aux yeux à la fin de son discours, l'ancien ouvrier né dans une famille pauvre du Nord-Est brésilien a lancé: «Je suis ému car je sais que la faim n'est pas une chose naturelle», mais «liée aux décisions politiques».
«Financement, clé pour résoudre la crise»
L'Alliance lancée par le président brésilien et qui rassemble des Etats et des institutions internationales, vise à trouver des moyens financiers communs pour lutter contre la faim ou à répliquer les initiatives qui fonctionnent localement.
Face au fléau de la malnutrition qui persiste en raison notamment des conflits, des difficultés économiques et des intempéries extrêmes, le dirigeant de gauche a une crédibilité: ses programmes sociaux avaient permis de sortir des millions de Brésiliens de la pauvreté durant ses deux premiers mandats (2003-2010).
«Nous pouvons résoudre cette crise. Et le financement est la clé», a déclaré le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres dans un message vidéo lors de la présentation du rapport de la FAO, estimant que «la faim n'a pas sa place au XXIe siècle».
Présent à Rio mercredi, le président de la Banque mondiale Ajay Banga a affirmé que son institution serait le principal partenaire de l'Alliance en matière de connaissances sur la pauvreté et la faim, et fixé l'objectif d'aider 500 millions de personnes d'ici 2030. L'objectif d'un monde sans faim en 2030 a été adopté par les Nations unies en 2015.
Taxation des milliardaires
Jeudi et vendredi, le rendez-vous des grands argentiers du G20 marquera l'une des dernières grandes étapes avant le sommet des chefs d'Etat et de gouvernement des principales économies mondiales les 18 et 19 novembre, également à Rio. Après une première réunion à Sao Paulo en février, les ministres des Finances du G20 doivent tenter d'avancer sur l'idée d'une taxation des «super-riches», autre objectif fixé par Brasilia.
Soutenue par la France, l'Espagne, l'Afrique du Sud, la Colombie et l'Union africaine, l'initiative entend taxer les plus hauts patrimoines en utilisant comme base les travaux du spécialiste français des inégalités Gabriel Zucman, auteur d'un rapport en juin à la demande du Brésil. Mais les avancées restent très hypothétiques. «Il n'y a aucun consensus en l'état actuel des choses», a averti le ministère allemand des Finances.
Les Etats-Unis s'opposent à des négociations internationales sur le sujet. D'éventuelles taxes de ce genre «varieront très certainement assez largement» d'un pays à l'autre, selon un haut fonctionnaire du secrétariat au Trésor. La France veut croire pour sa part qu'«une première étape peut être atteinte de façon rapide», en matière d'échange d'informations entre Etats.
Trois textes
Alors que le G20 est entravé par les divisions entre pays occidentaux et Russie depuis le début de la guerre en Ukraine, la question d'un communiqué commun demeure épineuse. A Sao Paulo en février, les grands argentiers avaient buté sur une «impasse», de l'aveu du ministre brésilien de l'Economie Fernando Haddad.
La solution imaginée par le Brésil est d'aboutir cette fois à trois textes, a expliqué mardi soir Tatiana Rosito, une haute responsable du ministère.
Il y aurait d'une part un document spécifique sur la «coopération internationale en matière fiscale», incluant la question de la taxation des «super-riches», d'autre part un communiqué final plus large et enfin une «déclaration» publiée séparément par la présidence brésilienne qui elle seule évoquerait les crises géopolitiques. Fondé en 1999, le G20 rassemble la plupart des principales économies mondiales, ainsi que l'Union européenne et l'Union africaine.