Ce sommet, qui réunit autour de M. Poutine une vingtaine de dirigeants étrangers venus de Chine, d'Inde, d'Afrique du Sud ou encore de Turquie, vise à démontrer l'échec de la stratégie occidentale d'isolement du président russe pour son offensive en Ukraine.
La rencontre est aussi censée faire avancer l'ambition de concurrencer «l'hégémonie» occidentale, au moment où Moscou gagne militairement du terrain en Ukraine et a forgé des alliances étroites avec les plus grands adversaires ou concurrents des Etats-Unis: la Chine, l'Iran et la Corée du Nord.
«Nous croyons que les conflits ont vocation à être résolus uniquement pacifiquement. Nous soutenons totalement les efforts pour restaurer rapidement la paix et la stabilité», a déclaré le dirigeant indien face au président russe. M. Modi a expliqué être «en contact permanent» avec Vladimir Poutine, lequel a salué «le partenariat stratégique» entre la Russie et l'Inde, un pays critiqué par les Occidentaux pour acheter de grandes quantités de pétrole russe depuis 2022.
A cet égard, le président sud-africain Cyril Ramaphosa lui a donné un motif de satisfaction, en qualifiant devant son homologue la Russie «d'allié» et d'«ami précieux». M. Poutine lui a répondu vouloir encore «renforcer les relations avec les pays du continent africain», où Moscou avance ses pions, notamment via l'envoi de mercenaires et de «conseillers».
Contre l'hégémonie du dollar
L'Ukraine sera également au menu jeudi avec une rencontre annoncée par le Kremlin entre Vladimir Poutine et Antonio Guterres, le secrétaire général de l'ONU. L'ONU n'a toutefois pas confirmé cette rencontre, la première en Russie entre les deux hommes depuis avril 2022, dans la foulée du début de l'attaque russe contre l'Ukraine.
Après le Premier ministre indien et dans cette même ligne de volonté de concurrencer «l'hégémonie» occidentale, Vladimir Poutine doit rencontrer le président chinois Xi Jinping à l'occasion de ce sommet. Vladimir Poutine a entamé mardi son marathon diplomatique par un entretien avec la présidente brésilienne de la Nouvelle banque de développement, Dilma Rousseff.
Là encore, une même volonté de faire avancer sa vision d'un monde multipolaire, sur le plan économique cette fois. Le président russe a répété son souhait d'une augmentation des «règlements en monnaies nationales» entre les pays Brics, ce qui «réduira les risques géopolitiques», selon lui. En butte aux sanctions économiques occidentales et avec ses principales banques exclues de la plateforme de paiement international Swift, la Russie plaide pour la mise en place d'un système alternatif pour faire pièce à l'hégémonie du dollar.
Le chef de l'Etat russe s'entretiendra mercredi avec le président turc Recep Tayyip Erdogan - dont le pays, membre de l'Otan, a demandé à rejoindre les Brics - et avec le président iranien Massoud Pezeshkian. Le président brésilien Luiz Inácio Lula da Silva a pour sa part annulé dimanche son déplacement en raison d'une blessure et interviendra en visioconférence, selon la présidence brésilienne.
«Alternative»
Visé par un mandat d'arrêt émis par la Cour pénale internationale en mars 2023 en raison de la déportation d'enfants ukrainiens, dont Kiev accuse Moscou (qui rejette ces accusations), Vladimir Poutine est limité dans ses déplacements à l'étranger.
Pour ce grand raout diplomatique qu'il décrit comme «l'événement diplomatique le plus important jamais organisé en Russie», le Kremlin juge «crucial» de démontrer qu'«il y a une alternative aux pressions occidentales (...) et que le monde multipolaire est une réalité», relève l'analyste politique russe Konstantin Kalatchev.
Moscou présente son assaut contre l'Ukraine non pas comme une guerre de conquête, malgré ses nouvelles annexions revendiquées de régions ukrainiennes après celle de la Crimée en 2014, mais comme un conflit provoqué par l'hégémonisme américain. Pour les Occidentaux et le président ukrainien Volodymyr Zelensky, la Russie est au contraire dans une logique de domination de ses voisins, et cherche à imposer une loi du plus fort à l'échelle internationale.
Comptant quatre membres (Brésil, Russie, Inde, Chine) à sa création en 2009, le bloc des Brics a intégré l'Afrique du Sud en 2010, tirant ainsi son nom des initiales de ces Etats en anglais. Il a été rejoint cette année par quatre pays (Ethiopie, Iran, Egypte et Emirats arabes unis). Seule ombre au tableau, l'absence à Kazan du prince héritier Mohammed ben Salmane, dirigeant de facto de l'Arabie saoudite, ce qui alimente les spéculations sur d'éventuelles dissensions entre les deux poids lourds énergétiques mondiaux.