Votre PME a été rachetée par un groupe, ou alors vous êtes l’acquéreur d’une société sauvée de la faillite; deux exemples fréquents. Il y en a bien d’autres. En Suisse, le marché des fusions-acquisitions était en hausse de 24,8% en 2018, selon l’étude Clarity on M&A de KPMG. Que vous soyez le chasseur ou la cible, il va falloir communiquer ce nouvel état de fait, à l’interne et à l’externe. Vincent Dousse et Raymond Loretan, respectivement directeur et expert du CAS Fusions, acquisitions, transmissions d’entreprises organisé par la HEIG-VD et le Centre patronal, pointent les principaux écueils de la communication dans ces situations.
1. Le premier réflexe
«Il faut faire un plan de communication. C’est très important, et pourtant on le néglige bien souvent. Dès le début, déterminez ce que vous allez communiquer, à qui, quand et comment. Cela sachant qu’il faut veiller à garantir la confidentialité de l’opération», observe en préambule Vincent Dousse. Encore faut-il savoir qui mettre dans la confidence. Ce point est lui aussi à clarifier rapidement. Il y a le premier cercle, l’acheteur et le vendeur, mais il peut être utile d’impliquer un gros client ou un collaborateur essentiel, pour savoir s’ils poursuivront leur engagement après la fusion.
2. Respect d’un timing précis
Dès la signature de l’accord, la gestion du temps est prioritaire. Rassemblez d’abord les collaborateurs pour leur annoncer la nouvelle et envoyez une information dans la foulée aux actionnaires et aux clients principaux. Selon la taille ou le secteur d’activité de l’entreprise, on avertira les autorités et on enverra un communiqué de presse.
Il existe des variantes. «Dans un cas de sauvetage d’entreprise, il faudra souvent communiquer avant que l’opération ne soit garantie, observe Raymond Loretan. La question de la confidentialité doit être préservée, mais en même temps, il faut aussi veiller à assurer la bonne marche de l’entreprise et maintenir sa substance. C’est pourquoi il faut informer, en interne et en externe, que la société va peut-être être reprise, cela en accord avec l’acheté.» Les autorités politiques sont parfois également mises dans la confidence, en amont, car elles peuvent jouer les facilitateurs pour un potentiel repreneur, ceci surtout afin de sauvegarder les emplois.
Rappelons que pour une société cotée en bourse, la réglementation exige de divulguer une information pouvant influencer le cours de l’action à tous les actionnaires simultanément, au risque de s’exposer à des sanctions.
Déterminez ce que vous allez communiquer, à qui, quand et comment.
3. Facteur humain essentiel
Ce processus, aussi réglementé soit-il, n’en reste pas moins un défi humain. En conséquence, la communication aux collaborateurs est un pilier de la réussite. «Il faut rassurer les employés en leur précisant qui sera leur chef et quel sera leur travail après l’opération. S’il doit y avoir des licenciements, mieux vaut être clair dès le début, afin d’éviter les rumeurs. Enfin, expliquer le pourquoi de la fusion et donner des informations sur les potentiels développements», énumère Vincent Dousse.
4. Répondre aux questions
Vous devez être capable de répondre à des questions très pragmatiques sur l’emploi, la caisse de retraite, les horaires… Détailler le modèle que vous souhaitez instaurer dans la nouvelle structure et le répéter. Dire une fois les choses ne suffit pas. Cela reste encore plus vrai lors d’une fusion dans un contexte hostile. En général, c’est à ce moment que l’acheteur prend le lead dans la communication.
5. Quel chiffre communiquer?
Le montant de la transaction est en général tenu secret, selon un accord écrit. On pourra toutefois mentionner le développement potentiel du chiffre d’affaires et l’augmentation ou la perte d’emplois attendue.
6. Anticiper la fuite
La confidentialité est une exigence pour toute acquisition. Mais parfois, la fuite arrive. «Elle doit être anticipée, dès le début du processus, en se mettant d’accord avec la cible sur un message commun en cas de fuite que l’on peut sortir en deux minutes», relève Raymond Loretan. Très souvent, les entreprises signalent sobrement «qu’elles sont en contact avec plusieurs vendeurs potentiels». A noter que la fuite est une technique peu honorable pour influencer un processus de fusion-acquisition.