Groupe Mutuel : Le travail, et plus encore depuis la pandémie, revêt une importance différente de celle qui était la sienne il y a dix ou vingt ans. Les personnes sont aujourd’hui plus sensibles à l’équilibre entre travail et temps libre. Peut-on parler d’un « avant » et d’un « maintenant » ?
Lise Grangier-Théoduloz : Sans aucun doute. Avant, il était naturel de travailler à 100%. Aujourd’hui, de plus en plus de personnes choisissent des taux d’occupation moins élevés, afin d’accorder plus de temps à des activités extra-professionnelles.
Question de génération ?
Pas nécessairement. Plus jeunes et moins jeunes se mêlent ici. Disons que le travail à lui tout seul ne constitue plus une raison d’être.
On observe parallèlement une augmentation dans les entreprises de ce que l’on appelle le « désengagement ». Qu’entendre par là ?
Il s’agit d’un phénomène en soi, à ne pas confondre avec ce que nous venons d’évoquer au sujet de l’équilibre vie privée - vie professionnelle. Le désengagement, c’est ce qui se passe quand des collaborateurs ne vont pas s’impliquer plus que cela pour faire évoluer les choses ou trouver des solutions. C’est une façon de maintenir le statu quo.
Ce qui à terme prétérite l’entreprise…
Bien entendu. Le désengagement peut venir de deux choses: soit il succède à une phase de sur-engagement, où la personne peut avoir le sentiment d’être allée beaucoup trop loin dans son engagement pour l’entreprise; soit il s’agit d’un désengagement plus volontaire et librement décidé. On appelle cela la « démission silencieuse », le quiet quitting. Le risque étant que très vite la lassitude apparaisse, par manque de stimulation.
Les symptômes du désengagement ?
Quand le collaborateur s’exprime de manière dévalorisante sur son travail, ou quand il a tendance à moins réfléchir et à exécuter mécaniquement ses tâches. Cela se traduit aussi par un détachement vis-à-vis des collègues et des supérieurs et même de tout l’environnement. Le collaborateur participe peu ou pas à la vie de l’équipe, que ce soit dans le travail au quotidien ou les événements et sorties hors travail. Il n’émet que peu ou pas de nouvelles idées. Or l’entreprise a un grand rôle à jouer afin de motiver au mieux ses collaborateurs.
Ce phénomène du désengagement s’inscrit, on l’a dit, dans un contexte plus large, celui de l’équilibre vie privée - vie professionnelle et des nouvelles manières de travailler…
Oui, et il est important de préciser ici que le fait de travailler à temps partiel ne signifie nullement qu’il y aurait un désengagement. On peut tout à fait travailler à temps partiel et être pleinement motivé et engagé dans l’entreprise. Le message, c’est que, pour éviter à la fois le désengagement que l’on observe ici et là et répondre à ces nouveaux souhaits et exigences d’un travail mieux adapté à l’équilibre travail-vie personnelle, il s’agit pour l’entreprise d’imaginer de nouvelles approches, et notamment davantage de flexibilité.
Il pourrait y avoir un lien entre le fait qu’aujourd’hui les personnes ont moins envie d’être manager et que les exigences en matière d’équilibre vie privée-vie professionnelle ont beaucoup augmenté ?
Je pense, oui. Avant, la fonction de responsable était peut-être moins remise en doute et l’organisation du travail plus rigide facilitait le quotidien. Aujourd’hui, avec les nouvelles façons de travailler et de vivre, le poste de manager et les responsabilités techniques, émotionnelles et organisationnelles qui lui incombent font peut-être moins rêver.
Il faudrait donc découpler les compétences techniques des compétences émotionnelles ?
En effet les compétences techniques à elles seules ne suffisent pas ou plus à être un bon chef. Pour certains, les compétences humaines d’un responsable sont innées et pour d’autres, elles doivent s’acquérir. Et les entreprises devraient davantage soutenir les managers dans leurs diverses tâches spécifiques, afin de leur accorder plus de temps pour soutenir leurs collaborateurs.
Ce qui fait aussi que des collaborateurs peuvent également très bien évoluer dans une entreprise sans devenir chef ?
Bien sûr. Cela implique aussi une évolution du regard social, qui revaloriserait en quelque sorte le statut de collaborateur. Tout le monde n’a pas nécessairement envie d’être chef. Dans une étude réalisée par BVA en 2019, 79% des salariés ne souhaitent pas devenir manager. Mais il est certain que ces collaborateurs regorgent de multiples talents afin de faire avancer l’entreprise. Il suffit de placer les bonnes personnes aux bons endroits. Et la clé pour cela est de s’intéresser à ses collaborateurs.
Lise Grangier-Théoduloz est spécialiste Gestion de la Santé en Entreprise au Groupe Mutuel. Titulaire d’un bachelor HES en Économie d’entreprise et formatrice, elle travaille depuis 5 ans au Groupe Mutuel. Elle accompagne aujourd’hui les entreprises dans la mise en place de projets Gestion Santé en Entreprise, la réduction de l’absentéisme et la promotion du bien-être au travail.
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