On parle beaucoup aujourd’hui de santé mentale. Comment les entreprises peuvent-elles répondre à ces affections ?
On a pris conscience en effet ces dernières années de l’importance de la santé mentale. Les tabous liés à celle-ci ont également diminué, libérant la parole. En parallèle, nombre de conseils dans des domaines tels que le travail, la santé, l’éducation, le corps, le bonheur, sont extrêmement présents sur tous les canaux d’information, y compris les réseaux sociaux. Vouloir être au top sur tous les plans augmente encore la charge mentale.
Comment faire, du point de vue du travail en entreprise, pour les responsables d’équipes et les dirigeants ? A quoi s’agit-il d’être attentif ?
Les chefs d’entreprise ou les managers connaissent pour beaucoup déjà les problématiques psychiques liées au travail, et savent que des aspects comme la flexibilité et le temps de travail, ou l’adaptation des conditions de travail, sont très importants. Mais la question de la responsabilité se pose inévitablement, par exemple quand, et cela est assez fréquent, le collaborateur a un problème psychique plutôt lié à sa vie privée.
Votre conseil dans ces cas-là?
Si les problèmes sont d’origine privée, le manager devrait aussi être à l’écoute, dans la mesure du possible. Si une personne par exemple vit une situation difficile dans sa famille, elle aura peut-être besoin de certains aménagements d’horaires. Ou à l’inverse, elle dira qu’elle a besoin d’être au travail pour se sentir mieux. Le management idéal serait ainsi d’être à l’écoute et d’essayer de trouver des réponses sur-mesure. Et sans que le manager bien sûr se retrouve dans un rôle de thérapeute, ni n’accepte toutes les demandes.
Cela implique donc que le manager consacre le temps nécessaire à ces questions…
C’est exactement notre conseil, même si je sais aussi que pour les managers, il s’agit d’une exigence supplémentaire. Demander par exemple aux collaborateurs à intervalles réguliers comment ils se sentent, favoriser les échanges formels et informels, apprendre à les connaître, cela ne peut être que positif. Parfois, juste le fait d’échanger quelques mots et de pouvoir exprimer son état actuel de stress peut faire du bien au collaborateur. Souvenons-nous que faire tout le temps semblant que tout va bien coûte une énergie énorme.
Les difficultés psychiques ne sont pas toujours liées au travail. En ce sens, le manager n’est pas le responsable de la santé psychique de son collaborateur. Comment fixer les limites en tant que manager ?
Comme mentionné, il est important de garder en tête que le manager n’est pas un psychothérapeute. Dans le dialogue avec le collaborateur, il faut avant tout que le manager se sente bien avec lui-même. Car celui-ci a aussi le droit de ne pas être toujours prêt à accueillir les problèmes de ses collaborateurs. Dans ce cas, il peut se tourner vers une autre personne au sein de l’organisation à laquelle le collaborateur pourra s’adresser, ou, si l’état de ce dernier ne semble pas trop préoccupant, proposer de fixer un rendez-vous le lendemain. Ecouter quelqu’un qui est en souffrance peut aussi coûter de l’énergie. Il peut être bénéfique que le manager exprime ses limites.
L’entreprise a également un rôle à jouer, surtout sachant que 50% de la population souffrira au moins une fois dans sa vie de troubles psychiques…
Oui, en sensibilisant ses collaborateurs à la problématique de la santé mentale, que ce soit par des campagnes de sensibilisation, des affiches, des séminaires ou des semaines santé. En insistant aussi sur le fait que si l’on rencontre des problèmes psychiques, il est bon d’en parler à un professionnel et qu’il n’y a aucune honte à cela. Ainsi, les hotlines en entreprise peuvent être utiles dans un premier temps. A quoi j’ajoute qu’une culture générale de la bienveillance au sein des équipes est également très importante, puisqu’elle permet aux personnes atteintes de mieux passer les étapes de leur guérison tout en restant inscrites dans le monde de l’entreprise.
Dans ce contexte, vous mentionnez la formation ENSA, formation des premiers secours en santé mentale…
Oui, c’est une formule qui peut être intéressante pour les entreprises et permet d’avoir dans son personnel une ou deux personnes formées en la matière, en quelque sorte des secouristes en santé mentale. Répartie sur deux jours, cette formation est une piste dans la problématique de la santé mentale et donne des outils sur la manière dont vous pouvez orienter une personne en souffrance vers une aide professionnelle. Car la question de base est toujours la même : comment réagir dans ce genre de situation ?
Dr Carole Nielsen est spécialiste de la Gestion de la Santé en Entreprise (GSE) au sein du Groupe Mutuel depuis trois ans. Psychologue de formation, elle a effectué une thèse sur le trac chez les musiciens. Après cette expérience dans le domaine de la recherche, elle accompagne aujourd’hui les entreprises dans des démarches visant à améliorer la santé de leurs collaboratrices et collaborateurs.
A PROPOS DE CE BLOG
Avec plus de 2700 collaboratrices et collaborateurs répartis dans toute la Suisse, le Groupe Mutuel est au service de 1,3 million de clients individuels et de 25 500 entreprises. Seul assureur global de Suisse, le Groupe Mutuel se positionne comme le partenaire de référence dans le domaine de la santé et de la prévoyance pour les clients privés et les entreprises. En plus de gérer une fondation de prévoyance professionnelle, le Groupe Mutuel propose également aux entreprises des assurances perte de gain maladie selon la LAMal et la LCA ainsi que l’assurance-accidents selon la LAA.