L'énergie osmotique, une source renouvelable prometteuse pour l’avenir?

L'énergie osmotique, également appelée énergie bleue ou énergie par gradient de salinité, repose sur un phénomène naturel fascinant : l'osmose. Un processus qui se produit lorsque deux solutions de concentrations différentes sont séparées par une membrane semi-perméable. Dans la nature, le potentiel de l'énergie osmotique se manifeste quand de l'eau douce et de l'eau salée se rencontrent à l'embouchure des fleuves.

Pour l’exploiter, le principe est aussi simple qu’ingénieux : l'eau douce traverse naturellement la membrane vers le côté de l'eau salée, créant ainsi une augmentation de pression. Cette pression peut ensuite être exploitée pour produire de l'électricité. Pour l’imager, c'est un peu comme si la nature elle-même créait une chute d'eau invisible, que l'on peut ensuite utiliser pour faire tourner une turbine. Pour profiter de cette énergie, deux technologies principales ont été développées. La première, appelée « osmose à pression retardée » (PRO), utilise directement la pression créée par le déplacement de l'eau pour actionner une turbine. La seconde, l' « électrodialyse inverse » (RED), fonctionne différemment en utilisant des membranes à échange d'ions pour générer un courant électrique.

Ces technologies, bien que prometteuses, sont encore en phase de développement et d'optimisation. Les chercheurs travaillent notamment sur l'amélioration des membranes, élément clé du processus, pour augmenter leur efficacité et réduire les coûts de production. La Suisse, malgré son absence de façade maritime, n'est pas en reste dans ce domaine de recherche. L'École Polytechnique Fédérale de Lausanne (EPFL) s'est particulièrement distinguée par ses travaux sur les membranes utilisées dans les processus d'osmose. Objectif de ces recherches : rendre l'énergie osmotique plus viable économiquement, un défi crucial pour son développement futur.

Entre atouts et défis

Bien qu'il n'existe actuellement pas de centrale osmotique à grande échelle en Suisse, ces recherches témoignent de l'intérêt que représente cette technologie pour le pays. Elles s'inscrivent dans une démarche plus globale de diversification des sources d'énergie renouvelable, essentielle pour atteindre les objectifs de la transition énergétique, dans l’optique de se positionner comme expert et partenaire stratégique dans ce domaine.

L'énergie osmotique présente plusieurs avantages qui en font une option intéressante pour l'avenir énergétique. Tout d'abord, elle est renouvelable et n'émet pas de gaz à effet de serre ni de déchets toxiques. De plus, contrairement à l'énergie solaire ou éolienne, elle peut être produite de manière constante, 24h/24, indépendamment des conditions météorologiques. Le potentiel de production est également considérable mais reste cependant très contrasté entre les prévisions des concepts purement théoriques et celles des modèles plus réalistes.

Potentiel, théorie versus pratique

Ainsi, en fouillant un peu dans la littérature scientifique produite à ce jour, à l'échelle planétaire son potentiel théorique a été estimé à plus de 15 000 TWh. À titre de comparaison, la consommation électrique mondiale en 2023 s’élevait à 29 471 TWh. Mais dans la pratique, en intégrant les contraintes techniques ou environnementales réelles dans l’équation, son potentiel exploitable ne serait « que » de 600 TWh par an.

Comme toute technologie émergente, l'énergie osmotique fait en effet face à des défis importants. Les coûts de mise en place et d'exploitation restent élevés, principalement en raison du prix des membranes spécialisées nécessaires. L'efficacité des systèmes actuels est également limitée par rapport à d'autres sources d'énergie renouvelable plus matures. De plus, bien que généralement considérée comme une énergie propre, l'impact environnemental potentiel sur les écosystèmes estuaires où seraient implantées les centrales osmotiques nécessite encore d’être soigneusement évalué et géré. Enfin, la localisation de sites spécifiques où l'eau douce rencontre l'eau salée limite les possibilités d’implantation.

En France, la start-up Sweetch Energy se positionne par ailleurs à l'avant-garde de l'énergie osmotique. L’année dernière, elle poursuivait la fabrication de son premier démonstrateur, situé dans le sud du pays, là où le Rhône se jette dans la mer Méditerranée. Objectif : démontrer qu’il est possible d’atteindre 500 MW de capacité de production d'électricité décarbonée.

Pièce du puzzle durable

En comparaison avec d'autres énergies renouvelables comme l'éolien ou le solaire, l'énergie osmotique est encore à un stade de développement précoce. Cependant, sa capacité à produire de l'électricité de manière constante et son faible impact environnemental pourraient en faire un complément précieux dans un mix énergétique diversifié et durable. Pour la Suisse, pays à la pointe de l'innovation technologique, cette filière représente une opportunité de contribuer au développement d'une technologie d’avenir en se positionnant comme partenaire stratégique de référence.

Les prochaines années seront décisives pour déterminer si l'énergie osmotique peut passer du stade de concept de technologie prometteuse à celui de véritable source d'énergie viable à grande échelle. Dans ce sens, les avancées technologiques, notamment dans le domaine des membranes, seront cruciales pour réduire les coûts et augmenter l'efficacité des systèmes.

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