L’hydrogène détient un potentiel énergétique remarquable. En effet, sa combustion libère une quantité d’énergie trois fois supérieure à celle de gaz comme le propane ou le méthane pour une masse équivalente. La combustion de l’hydrogène produit de la vapeur d’eau, ne libérant pas de CO2, ce qui en fait une alternative propre aux énergies fossiles, contribuant à la réduction des émissions de gaz à effet de serre et à la lutte contre le changement climatique.
Si la combustion de l’hydrogène ne pollue pas, son utilisation reste cependant problématique puisque cet élément, en tant que gaz très peu dense, doit être comprimé ou liquéfié. Ce qui nécessite le recours à une quantité importante d’énergie qui, elle, peut ne pas être aussi propre. S’il pourrait un jour remplacer le carburant de nos véhicules ou encore le kérosène dans l’aéronautique, l’hydrogène que l’on produit aujourd’hui reste majoritairement problématique écologiquement parlant puisque 90% de sa production sont issus de sources fossiles, essentiellement du méthane. Les alternatives écologiques – par exemple par électrolyse, une démarche qui consiste à scinder la molécule d’eau en ses deux éléments constitutifs, à savoir l’hydrogène et l’oxygène, en utilisant de l’électricité d’origine renouvelable – sont, à l’heure actuelle, relativement coûteuses pour être envisagées à une échelle globale.
Plus qu’une solution idéale, l’hydrogène serait plutôt à envisager comme une énergie pouvant jouer un rôle-clé dans le cadre de la transition, comme le rappelait d’ailleurs l’Agence internationale de l’énergie dans un rapport paru en 2019.
Pour obtenir de l’hydrogène, il est nécessaire de passer par des processus industriels. Généralement, on le produit à partir d’eau ou d’hydrocarbures, soit par l’intermédiaire de procédés thermochimiques, soit par électrolyse de l’eau comme expliqué ci-dessus. Après avoir été stocké et éventuellement transporté, il est utilisé comme énergie avec une pile à combustible ou par combustion directe, voire comme matière première dans des procédés industriels – métallurgie, synthèse d’ammoniac et de méthanol. Aujourd’hui, parallèlement à ces processus techniques, on commence de plus en plus à évoquer l’hydrogène blanc.
L’hydrogène blanc, ou l’hydrogène naturel, fait référence à l’hydrogène que l’on trouve à l’état naturel, dans le sous-sol de la Terre, sans intervention humaine pour sa production. Techniquement, l’hydrogène naturel est exploitable, mais sa concentration dans les gisements varie, ce qui peut nécessiter des traitements pour obtenir un hydrogène pur et utilisable à grande échelle.
Des gisements d’hydrogène naturel auraient été identifiés dans plusieurs parties du globe, notamment en Russie, en Ukraine, à Taïwan, ou encore dans plusieurs régions d’Afrique. Cependant, à l’heure actuelle, leur cartographie complète demeure encore un enjeu pour les années à venir. Si certaines exploitations pilotes auraient déjà vu le jour, ces initiatives demeurent encore marginales à l’échelle mondiale.
En effet, pour l’instant, il semblerait que seul le Mali l’exploite depuis 2011 dans le village de Bourakébougou, situé à environ 60 kilomètres au nord-ouest de la capitale du pays, Bamako. La découverte fortuite du gisement malien remonte à 1987, lors d’un forage d’eau, et produit depuis un gaz constitué à 98 % d’hydrogène pour alimenter le village en électricité décarbonée.
L’hydrogène naturel présente en outre un intérêt certain pour des applications multiples :
- la production d’électricité via des piles à combustible ou des turbines à combustion directe,
- le transport, en l’utilisant comme carburant pour des véhicules lourds fonctionnant à l’aide de pile à combustible,
- l’industrie, comme matière première ou source d’énergie pour la production d’acier ou de produits chimiques.
Depuis peu, la Suisse a lancé des travaux exploratoires dans le but de sonder le potentiel en hydrogène naturel du pays. Un projet est en cours du côté alémanique, mené par l’Université de Berne avec le soutien de l’Office fédéral de l’énergie. Objectif : identifier dans le sous-sol helvétique des zones propices à la formation de cet hydrogène blanc. S’il est encore trop tôt pour s’avancer sur les résultats, les premières données récoltées indiqueraient un potentiel prometteur puisque la Suisse dispose dans son sol de roches susceptibles de produire de l’hydrogène. Un phénomène qui se concentrerait surtout dans les régions alpines telles que les Grisons, le Valais mais aussi le Tessin, résultant entre autres de la collision des plaques tectoniques, à l’origine de la formation des Alpes, qui a eu pour conséquence de faire remonter vers la surface des roches riches en fer.
Avant d’envisager une potentielle étape d’exploitation industrielle, il faut donc patienter que les études et travaux scientifiques démontrent l’existence de réserves naturelles d’hydrogène conséquentes. Ailleurs dans le monde, ce stade a déjà été franchi, notamment en France, dans les Pyrénées et en Lorraine, ainsi qu’en Australie et aux États-Unis, où des forages profonds sont en cours. En France, le gisement découvert il y a peu a donné un véritable coup de boost aux projets de prospection et d’exploitation de grande envergure puisque le réservoir naturel révélé pourrait contenir jusqu’à 46 millions de tonnes d’hydrogène, soit l’équivalent de la moitié de l’hydrogène produit dans le monde chaque année. Ce qui explique d’ailleurs que la France a rapidement entrepris la modification de la législation de son code minier afin de permettre l’exploration de l’hydrogène. Un aspect légal central qui, en Suisse, reviendrait aux Cantons.
Outre son fort potentiel en termes énergétiques ainsi que ses qualités durables, l’hydrogène à l’état naturel s’avère également des plus intéressants dans la mesure où il offre aussi des avantages d’ordre économique. En effet, le fait d’exploiter de l’hydrogène blanc permettrait de profiter d’une énergie bon marché puisqu’il est beaucoup moins cher à produire que l’hydrogène fabriqué.
En conclusion, l’hydrogène blanc offre un potentiel immense dans la transition énergétique mondiale. Sa caractéristique renouvelable, couplée à une faible empreinte carbone, en fait un candidat idéal pour remplacer progressivement les énergies fossiles. Toutefois, des efforts en matière de recherche et d’infrastructure sont nécessaires pour réaliser pleinement son potentiel. Affaire à suivre.
Thomas Pfefferlé
Journaliste innovation
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