L’inflation et la hausse des taux d’intérêt ne sont pas passées inaperçues auprès des propriétaires suisses. Selon une étude récente d’Helvetia et de Moneypark, la pression exercée sur les porte-monnaies alimente la sensibilité aux prix, freine les investissements dans les logements en propriété et réduit également l’importance de la durabilité dans l’habitat.
Par exemple, les investissements dans le solaire reculent au profit des dépenses consacrées au jardin. Quant à l’assainissement énergétique, il a perdu son caractère d’urgence. Certes, ces démarches ont un coût, mais elles peuvent également permettre, à moyen terme, de réaliser des économies intéressantes en limitant la consommation et les pertes d’énergie.
L’assainissement énergétique, un retour sur investissement
Selon l’architecte zurichois Beat Kämpfen, en réalisant une rénovation complète d’une maison (isolation, pompe à chaleur et panneaux photovoltaïques), on peut réduire de deux tiers sa consommation d’énergie. Pour une villa familiale, les coûts peuvent être compris entre 400'000 et 500'000 francs, avec un retour sur investissement atteignable après une dizaine d’années.
«Beaucoup de paramètres entrent en jeu, précise ce pionnier du solaire en Suisse. Il faut notamment tenir compte du type de bâtiment, de son exposition au soleil et du climat.»
Par conséquent, il conseille de faire au préalable une analyse énergétique avec un spécialiste, qui pourra développer un concept cohérent. Au-delà des coûts, le ressenti doit également entrer en ligne de compte. Par exemple, si les parois enregistrent une température de 16°C, il faudra chauffer l’intérieur à 24°C. Si elles atteignent 19°C, 20°C suffisent.
Identique pour toute la Suisse, le Certificat énergétique cantonal des bâtiments (CECB) permet d’évaluer la qualité de l’enveloppe et le bilan énergétique global d’un bâtiment, ainsi que ses émissions directes de CO2. Le CECB Plus ajoute un rapport de conseil en vue d’une rénovation énergétique. Il convient de compter environ 1000 francs pour chacune de ces deux étapes. Dans le rapport de conseil, l’expert propose souvent au propriétaire un package de mesures qui permettent de rénover le bâtiment au niveau Minergie. Pour donner un ordre de grandeur, construire selon ce standard implique un surcoût compris entre 3 et 7%.
Dans la plupart des cas, il est avisé de commencer par l’enveloppe (isolation des parois, caves, fenêtres et toitures), puis de remplacer la chaudière par une source d’énergie renouvelable, comme une pompe à chaleur, avant d’envisager une installation photovoltaïque. On pourra ensuite également s’intéresser au renouvellement automatique de l’air et à la mobilité électrique.
Concernant les pompes à chaleur, il faut savoir que les modèles air-eau sont meilleur marché que les géothermiques, mais ils occasionnent plus de bruit et sont moins efficaces. Pour ce qui est des panneaux solaires thermiques, leur efficacité est meilleure que les photovoltaïques, notamment pour chauffer l’eau. En revanche, selon Beat Kämpfen, leur installation est plus compliquée et coûteuse.
Potentiel encore peu exploité
Ces dernières années, de nombreux efforts ont été entrepris pour assainir le parc immobilier helvétique. Cependant, il reste encore beaucoup à faire. La grande majorité des bâtiments sont chauffés aux énergies fossiles. Par exemple, en ce qui concerne le canton de Vaud, cette proportion atteint deux tiers. «Le secteur du bâtiment est l’un de ceux qui ont fait le plus d’efforts en réduisant de près d’un tiers les émissions de CO2 depuis trente ans, souligne Frédéric Dovat, secrétaire général l’USPI Vaud. Mais on ne peut pas installer des pompes à chaleur partout. De plus, la lutte contre le réchauffement climatique est l’affaire de chacun. Tous les acteurs doivent mettre la main au porte-monnaie, y compris les locataires.»
Or les subventions étatiques restent trop faibles, tout comme la main-d’œuvre qualifiée. D’où la nécessité, selon lui, de développer des incitatifs fiscaux, comme réduire les impôts fonciers et sur la fortune: «Ces mesures bénéficieraient notamment aux propriétaires proches de l’âge de la retraite, qui peinent à obtenir des prêts bancaires.»
Dans le même ordre d’idées, octroyer des bonus pour la surélévation des bâtiments en cas d’assainissement énergétique permettrait également de lutter contre la pénurie de logements. «Le problème est qu’on se heurte souvent à des oppositions, ajoute Frédéric Dovat. Cependant, il faut être conséquent: si on veut des logements durables, il faut les payer et si on en veut suffisamment, il faut autoriser les nouvelles constructions.»
C’est pourquoi, il pointe l’intérêt des conventions par objectifs ciblant en priorité les immeubles qui émettent le plus de CO2. Il s’agit de procéder par paliers: on change d’abord les fenêtres, puis l’isolation de la toiture, avant d’envisager des panneaux photovoltaïques et ainsi de suite. Cela permet d’évaluer les améliorations étape par étape, tout en tenant compte de la capacité financière du propriétaire et des avancées technologiques.
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L’Etat de Genève a augmenté les subventions pour la rénovation énergétique des bâtiments. Une enveloppe exceptionnelle de 500 millions de francs permettra d’accélérer la rénovation du parc bâti. Le nouveau barème inclut des subventions doublées pour divers projets liés notamment à l’isolation thermique, l’efficacité énergétique globale ou l’installation de capteurs solaires thermiques et de systèmes de ventilation.