Son entrée s'est faite en toute discrétion: une Tesla noire s'est garée à l'arrière de l'enceinte, directement dans une tente installée pour l'occasion.
Quelques minutes plus tard, en costume noire et cravaté, il passait tranquillement la sécurité installée à la porte de la salle d'audience.
Il témoigne devant la cour du Delaware où doit se dérouler le procès l'opposant au réseau social avant qu'il ne se décide à honorer son engagement et à débourser 44 milliards de dollars pour racheter Twitter fin octobre.
L'affaire pour laquelle il est appelé mercredi fait suite à la plainte d'un actionnaire du fabricant de voitures électriques, qui poursuit Tesla, son patron et certains membres de son conseil d'administration pour avoir autorisé en 2018 "le plus gros plan de rémunération jamais attribué à un dirigeant".
Ce dernier prévoit de verser à Elon Musk des actions Tesla en fonction de l'atteinte de plusieurs objectifs sur dix ans, un plan estimé alors à 56 milliards de dollars.
Après les avoir pratiquement tous remplis, le dirigeant a empoché 52,4 milliards de dollars en stock-options en quatre ans et demi, selon un document judiciaire du plaignant, Richard Tornetta.
De quoi alimenter sa fortune et l'aider à se hisser au rang d'homme le plus riche au monde.
Selon le plaignant, Elon Musk n'avait pas besoin de ces incitations financières pour parvenir à remplir ces objectifs.
Mais il a dicté ses termes aux administrateurs qui, au vu de leurs relations avec l'emblématique entrepreneur ou de leurs intérêts personnels, n'étaient pas suffisamment indépendants pour s'y opposer. Et ce alors qu'il ne travaillait même pas à temps plein pour Tesla dans la mesure où il est aussi à la tête de la société spatiale SpaceX et des start-up Neuralink et The Boring Company.
Richard Tornetta demande l'annulation du plan.
Les avocats représentant les accusés font valoir que le plan de rémunération d'Elon Musk est lié à la performance de l'entreprise, y compris en Bourse, et qu'il a fonctionné parfaitement dans la mesure où la valeur de Tesla a été multipliée par plus de dix depuis son adoption.
"Très inhabituel"
Le procès, sans jury, a débuté lundi par le témoignage d'Ira Ehrenpreis, responsable des rémunérations au sein du conseil d'administration de Tesla, suivi entre autres mardi par celui de l'actuelle présidente de cette instance, Robyn Denholm.
La juge chargée de l'affaire est Kathaleen McCormick, qui s'occupait aussi du dossier opposant Elon Musk à Twitter. Elle rendra sa décision plus tard, dans quelques semaines ou quelques mois.
Il est "très inhabituel" pour des plaintes sur les rémunérations des dirigeants d'arriver au stade du procès car elles sont souvent soldées par un accord ou rejetées par des juges qui estiment généralement qu'il s'agit de décisions stratégiques, remarque Jill Fisch, professeure en droit des affaires à l'Université de Pennsylvanie.
Mais dans le cas présent, la cour a décidé que le fait qu'Elon Musk possède environ 22% des parts de Tesla et en soit le directeur général "pouvait avoir un impact excessif" sur le conseil d'administration et sur les autres actionnaires, indique-t-elle.
Le procès intervient au moment où Elon Musk est sous forte pression depuis son acquisition de Twitter fin octobre, entre le départ de plus de la moitié des employés, la fuite des annonceurs, les avertissements de diverses autorités et le lancement confus de nouveaux produits.
Lors d'une intervention lundi, il a reconnu, sur le ton de la plaisanterie, que sa charge de travail avait "récemment beaucoup augmenté".