"On est en train de mourir à petit feu", a confié à l'AFP un producteur de l'Entre-deux-Mers, un secteur particulièrement touché, lors d'une réunion de préparation du cortège bordelais. "Il y a urgence. Il nous faut un plan social!", a lancé un autre.

Le plus grand vignoble AOC de France, avec ses 110'000 hectares cultivés, dont 85% en rouge, est en plein marasme. Des vignes ne sont plus cultivées. Dans beaucoup d'exploitations, les chais sont pleins et les trésoreries à sec.

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"Durant les années 1980-90, on a planté à outrance et, aujourd'hui, on se retrouve avec un million d'hectolitres de stock en trop", résume Didier Cousiney, à la tête du collectif organisateur de la manifestation. "On ne vend plus rien et il n'y a même plus de prix au négoce."

Au début novembre, tandis qu'un milliardaire américain rachetait un domaine prestigieux de l'appellation margaux, le CIVB, l'interprofession locale, a suspendu la cotation des vins vendus en vrac - environ 40% de la production - au motif que les prix affichés ne seraient plus représentatifs et déstabiliseraient tout le marché.

600 euros pour 900 litres

Pour l'appellation bordeaux rouge, la plus importante en volume, le tonneau de 900 litres est tombé aux alentours de 600 euros, soit quelques dizaines de centimes le litre, quand il faudrait le double pour couvrir les coûts actuels, indiquent les vignerons.

Le vignoble a déjà eu recours à l'arrachage, dans les années 2000, quand les cours ont pâti d'une surproduction mondiale. Seuls 3500 hectares avaient été arrachés, "car tout le monde y croyait encore", indique l'ancien responsable départemental du syndicat FNSEA.

Quinze ans plus tard, le collectif veut en arracher "au moins 15'000" moyennant 10'000 euros de prime à l'hectare, soit 150 millions au total. Le CIVB, qui parle plutôt de 10'000 hectares, juge "absolument nécessaire de réduire la voilure" face à la baisse de la consommation de vin en France (-15% depuis trois ans) et à l'effondrement du marché chinois (le volume exporté a diminué par deux).

Les discussions entamées avec les pouvoirs publics achoppent sur le conditionnement de la prime à une reconversion agricole des parcelles concernées par l'arrachage. La plupart des vignerons ne veulent pas en entendre parler.