Google et Meta ont ouvert le bal l'année dernière: les deux firmes ont réduit leurs programmes d'égalité, connus sous le sigle DEI (Diversity, Equity, Inclusion). Mi-juillet, Microsoft a fait les gros titres en supprimant des postes dans son équipe de diversité. Le géant du logiciel a souligné que l'ensemble du département ne serait pas fermé, après que des informations à ce sujet aient provoqué des remous.

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La raison principale? Les entreprises doivent faire des économies. En temps de crise, il semble qu'il n'y ait plus de place pour les promoteurs de la diversité dans les sociétés. Les programmes de PWC aux Etats-Unis, qui encourageaient spécifiquement les ethnies «traditionnellement sous-représentées», ont disparu. Désormais, l'entreprise recherche des «étudiants d'origines diverses».

Le tollé dans les médias sociaux n'a pas tardé à suivre, sur Linkedin règne une atmosphère de fin du monde en ce qui concerne la diversité. «La situation actuelle pour la bulle de la diversité, qui s'auto-célèbre souvent sur Linkedin, est sombre», écrit par exemple la top-voice de Linkedin Mina Saidze. Et d'ajouter: «Du moins si l'on lit les gros titres.»

Tout a commencé avec l'étude McKinsey

Le fait que les temps soient devenus plus difficiles pour la promotion de la diversité se dessine depuis fin juin. Un article du Wall Street Journal a provoqué des remous. Il remettait en question l'étude McKinsey de 2015, si souvent citée.

Celle-ci avait constaté qu'il existait un lien entre le profit et la diversité. Des équipes diversifiées rapportent plus d'argent, telle était la conclusion principale de l'étude. Elle a été considérée comme une percée: les politiques, les journalistes, les autorités et les investisseurs l'ont citée. Mais elle fait désormais l'objet de critiques.

La méthodologie ne peut pas être comprise, déplore le Wall Street Journal, car McKinsey ne révèle pas quelles entreprises ont été examinées. Et l'analyse de la performance des entreprises du S&P 500 montre qu'aucun avantage financier n'a résulté de la diversité de la composition des organes de direction.

McKinsey se défend et maintient son étude. «Nous avons dit clairement que notre recherche montre une corrélation et non une causalité et que ces deux choses ne sont pas identiques», explique un porte-parole de McKinsey. En d'autres termes: dans les entreprises performantes, les organes de direction sont composés de personnes diverses, mais cela ne signifie pas que la diversité est la raison de la bonne performance. C'est pourtant cette causalité qui s'est installée dans les esprits, notamment parce que l'étude parle constamment des avantages de la diversité pour l'entreprise.

Dans la pratique, les responsables de la diversité disparaissent

Si c'était effectivement le cas, les niveaux de direction des entreprises devraient aujourd'hui être beaucoup plus diversifiés. Un coup d'œil sur la pratique montre toutefois que l'on en est encore loin.

Le thème de la diversité semble ainsi connaître le même sort que la tendance à la durabilité, connue sous l'abréviation ESG (Environmental, Social, Governance). Il était en vogue d'inscrire ces thèmes sur la bannière de l'entreprise. Les managers s'extasiaient sur leurs objectifs de durabilité et présentaient leur stratégie ESG.

Puis le vent a tourné, là aussi d'abord aux Etats-Unis: des précurseurs comme le patron de Blackrock ont pris publiquement leurs distances avec le terme ESG, et c'est justement aux Etats-Unis que l'abréviation a été perçue comme un terme de combat de la gauche. A cela s'ajoutait le fait qu'il n'y avait pas non plus de lien de cause à effet entre l'ESG et la performance financière d'une entreprise. Et la clientèle finale était de plus en plus perplexe face aux placements vendus comme durables.

Mais en y regardant de plus près, on constate que les deux thèmes - diversité et durabilité - sont en train de changer: l'engouement est peut-être passé, mais les thèmes n'ont pas pour autant disparu du paysage.

En Suisse, les demandes auprès des entreprises suisses le confirment: la promotion forcée de la diversité est dépassée, l'objectif est de l'ancrer largement dans l'entreprise. Mais pour cela, une société a rarement besoin de plus d'un poste à 100%: pour beaucoup, le sujet est devenu un accessoire du service du personnel.

«En Suisse, nous comptons actuellement 0,8 ETP (équivalent temps plein) qui se consacrent à ce thème, répartis entre différentes personnes», indique l'assureur Helvetia. Chez AXA, on dénombre un responsable D&I, et chez Nestlé, ce sont 15 personnes qui consacrent une partie de leur travail à ce sujet. 

Thématique comme la durabilité

«Un certain degré de diversité est sans aucun doute une bonne chose, mais de nombreuses entreprises ont exagéré avec les arcs-en-ciel dans leurs logos. Dans notre société, l'égalité devrait aller de soi, il n'est pas nécessaire d'en faire constamment la publicité», a par exemple déclaré l'expert en marketing Frank Bodin à 20 Minuten.

La diversité devrait donc aller de soi. Une étude du cabinet de conseil EY présentée en avril montre que c'est de plus en plus le cas en Suisse par rapport au reste de l'Europe. Près de 90% des Suisses interrogés ont déclaré connaître l'attitude DEI de leur entreprise. C'est plus de 10% de plus que la moyenne européenne.

«La culture suisse met l'accent sur une réflexion approfondie avant de prendre des décisions, ce qui conduit à la minutie et à la cohérence dans les actions, explique Margit Vunder, Diversity and Inclusion Lead chez EY en Suisse. Une fois qu'elles se sont engagées, les entreprises suisses font preuve d'un dévouement sans faille pour mener à bien ce qu'elles ont commencé.»

En ce qui concerne les efforts sur ce thème, cela signifie donc que la Suisse a investi moins de ressources humaines dans ses départements DEI. En revanche, elle garde cette question en tête de sa liste de priorités.

Cet article est une adaptation d'une publication parue dans Handelszeitung.

Tina Fischer
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